CHARLIE HEBDO: UN MESSAGE DES INSTITUTIONS CULTURELLES MILANAISES

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Di fronte alla inaudita barbarie, all’odio insensato, al vile omicidio, rivendichiamo con la forza della cultura la libertà, il confronto critico d’idee, tutti i valori che sono una conquista della nostra civiltà e che debbono essere difesi ogni giorno con determinazione e fermezza.

(Devant la barbarie inouïe, la haine insensée, le vil homicide, nous revendiquons avec la force de la culture la liberté, la confrontation critique des idées, toutes les valeurs qui sont une conquête de notre civilisation et qui doivent être défendues chaque jour avec détermination et fermeté )

 

Ferdinando Bruni, Elio De Capitani, Fiorenzo Grassi, Teatro Elfo Puccini,
Massimo Collarini, Presidente Fondazione I Pomeriggi Musicali
Luigi Corbani, Direttore generale de laVERDI di Milano
Sergio Escobar, Direttore del Piccolo Teatro di Milano/Teatro d’Europa
Alexander Pereira, Sovrintendente del Teatro alla Scala di Milano
Ernesto Schiavi, Direttore Artistico della Filarmonica della Scala
Andrée Ruth Shammah, Direttore del Teatro Franco Parenti

POUR QUE VIVE PARIS QUARTIER D’ÉTÉ

Une des initiatives les plus originales et populaires du paysage culturel français est menacée par une décision du Ministère de la Culture d’abaisser de 30% sa subvention. Autant dire signer son arrêt de mort. Sans commentaire.
Paris Quartier d’Été, c’est une idée de Jack Lang, mise en musique, en théâtre, en danse, en kiosque, en cirque par Patrice Martinet, l’actuel directeur du théâtre de l’Athénée, qui en assure la destinée depuis ses origines. L’initiative consiste à s’emparer de lieux divers de Paris, des plus consacrés aux plus inattendus, pour offrir spectacles et performances de très haute qualité internationale à des prix défiant toute concurrence, voire gratuitement. C’est ainsi qu’on vit investir la Défense, Les Arènes de Lutèce, le parc André Citroën, pour des concerts de musique classique qui amenèrent jusqu’à 70000 personnes (à la Défense).C’est ainsi que l’Opéra de Paris, le digne Palais Garnier accueillit une mémorable soirée kabyle avec la magnifique Cherifa, attirant un public qui n’y avait jamais mis les pieds. C’est ainsi que les kiosques des jardins parisiens, avec en premier lieu celui du Jardin du Luxembourg se mirent à revivre, au son des fanfares,  des orchestres de Jazz, des ensembles de “Musique du monde”. C’est ainsi qu’on vit le Palais Royal attirer de nouveau une foule estivale pour des spectacles de danse de toute première importance, source inépuisable de succès et de public. C’est ainsi aussi qu’on vit poindre des artistes inconnus qui firent un malheur, comme Shirley et Dino avec la carrière que l’on sait et qui s’en suivit.

Car ce furent non seulement des talents consacrés, mais aussi des inconnus qui devinrent célèbres, qui firent les beaux soirs du Paris d’été.
Oui Patrice Martinet a réussi à faire une manifestation authentiquement populaire avec une programmation exigeante, diversifiée, allant chercher au bout du monde des artistes éblouissants, il a donné une couleur et une âme à son Festival, en faisant de Paris et de ses recoins (jusqu’à la maison de Pierre Henry,à Picpus) des lieux animés, où quelque chose se passait.
Cette vie d’été qui offrait de la culture un visage divers, multicolore, ébouriffé, et en même temps bon enfant, souriant, simple, et non la couleur statufiée d’une culture de la distinction à la Bourdieu serait donc menacée par les décisions absurdes répondant sans doute aux logiques comptables qui dominent aujourd’hui dans les Palais de la République ?

Non, nous ne voulons pas la fin d’un des rares lieux qui soit ouvert, ouvert au ciel étoilé, ouvert au rêve et ouvert aux autres et à toutes les diversités, car rarement festival n’a autant donné à voir et à connaître de la grande scène du monde et des autres.

Alors, si vous partagez cette conviction, signez l’appel de Paris Quartier d’été sur son site en allant à l’adresse suivante: http://www.quartierdete.com/petition/?petition=4

METROPOLITAN OPERA 2010-2011 (vu à Budapest sur grand écran): DAS RHEINGOLD (James LEVINE, Robert LEPAGE) le 9 octobre 2010

Quand on ne peut traverser l’Atlantique, le MET vient à nous via les ondes, et investit 500 cinémas environ dans le monde pour présenter ses nouvelles productions. En France, cela coûte 27 Euros. C’ est une redoutable machine de guerre mise au point par Peter Gelb, le Manager du MET qui a commencé ses retransmissions aux Etats Unis, évitant ainsi les coûts de la traditionnelle tournée du MET de jadis, et attirant des foules de spectateurs. Le système a été étendu au monde entier  et l’on pouvait voir dans les salles ce 9 octobre la nouvelle production très attendue de Rheingold, première journée du nouveau Ring du MET confié à Robert Lepage et à la baguette de James Levine, qui fête sa quarantième saison au MET. Des expériences similaires ont eu lieu pour d’autres théâtres en Europe, mais elles restent ponctuelles et n’ont pas le retentissement de ce programme venu de New York et qui attire de plus en plus de public.
Ne pouvant voir ce spectacle ni à New York, ni en France, je l’ai vu à…Budapest, au Palais des Arts, ce bâtiment récent dédié à la musique et aux Beaux Arts, qui abrite un théâtre, une salle de concert, un auditorium et un Musée d’art contemporain, le fameux Musée Ludwig. Pas une place de libre, une queue impressionnante, Wagner fait recette ce soir!

La soirée commence par un reportage d’une vingtaine de minutes sur la préparation du spectacle et les premières répétitions. Cette nouvelle production du Ring est pour le MET le spectacle le plus complexe jamais monté. Il a nécessité de consolider les dessous de la scène pour installer le dispositif impressionnant qui occupe l’espace: un plateau complètement désarticulé, composé d’éléments indépendants les uns des autres qui tournent sur eux mêmes par un système hydraulique et sont tantôt un plateau, tantôt un mur, tantôt un plan incliné, tantôt un escalier, tantôt tout cela à la fois, sur lequel sont projetés des vidéos. Certaines videos fonctionnent et varient selon l’intensité de la musique: vidéo, informatique, éclairages, décor unique et multiple délimitant des espaces variés, bref, un travail impressionnant.
La distribution est germano-américaine, à l’exception notable du gallois Bryn Terfel, qui signe son premier Wotan et de l’irlandaise Patrica Bardon (très bonne Erda). Bien sûr il est difficile, n’étant pas dans la salle, d’apprécier vraiment une voix, notamment son volume, mais sur le plan de la justesse, de la diction, de l’engagement et de l’interprétation, on peut dire que l’ensemble est une grande réussite. Bryn Terfel est un Wotan exceptionnel, il a à la fois l’autorité et l’assise, mais c’est aussi un interprète  de tout premier ordre, variant la couleur, le ton, l’émission. L’américaine Stéphanie Blythe est une surprise; une Fricka en tous points remarquable, voire stupéfiante de vérité et d’intelligence du texte même si le physique est un peu ingrat, mais la voix est splendide. Eric Owens est Alberich, je ne connaissais pas ce chanteur qui impressionne par sa puissance et la qualité de son engagement, Mime est Gerhard Siegel, comme toujours excellent. Les géants (Hans Peter König et Franz Josef Selig), les dieux, Dwayne Croft (Donner), Adam Diegel (Froh) Wendy Bryn Harmer (Freia),sont tous au meilleur, le Froh d’Adam Diegel devrait faire une belle carrière de ténor; seul Richard Croft déçoit dans Loge, la voix ne sort pas et l’interprétation reste assez neutre, sans la caractérisation marquée qu’on attend habituellement d’un Loge, alors que la mise en scène lui accorde une importance considérable; quant aux trois filles du Rhin, elles sont à la fois convaincantes et étonnantes tant la mise en scène exige d’elles des acrobaties peu communes. James Levine, très amaigri,  très fatigué, réussissant à peine à marcher dirige un Rheingold somptueux à tous égards, fluide, éclatant, contrasté, très différent d’il y a deux ans pour les adieux à la vieille production de Otto Schenk. Donc une très grande réussite musicale.
J’avais écrit il y a quelques mois ces mots

Enfin, last but not least, le MET est engagé dans l’entreprise la plus complexe de son histoire, aux dires de Peter Gelb, son directeur, en confiant le Ring à Robert Lepage, ce qui pourrait bien être la production que nous attendons tous. Jusque là les spectacles d’opéras de Lepage, son travail sur les contes, sur Shakespeare, ont montré que c’est un incomparable raconteur d’histoire, un conteur scénique qui fait à la fois rêver et frémir. Le Ring lui va comme un gant, et cela fait douze ou quinze ans que j’attends cela tant ses spectacles me faisaient désirer un Ring. Réponse dans deux ans.”

C’est bien l’histoire qui nous est racontée, de manière assez traditionnelle, mais soulignant de manière souveraine les relations entre les personnages, faisant de Wotan un personnage immédiatement contradictoire, presque un perdant, et de Loge au contraire le centre de l’attention. Lepage souligne l’humanité de Fasolt déchiré par le départ de Fricka et l’on se souviendra d’images stupéfiantes:  Alberich mêlé aux Filles du Rhin chantant “Rheingold, Rheingold”, Freia dans un filet de pêche couverte de l’or du Nibelung, et bien entendu la scène finale, où les Dieux grimpent sur l’arc en ciel, et entrent dans le Walhalla qui se referme comme une forteresse, pendant que Loge resté dehors contemple le spectacle; Mais ce qui domine et qui frappe, c’est évidemment la maîtrise technique et la performance technologique, même si on percevait quelques bruits suspects, la précision du dispositif video, la beauté des images et des couleurs, la justesse des costumes, élaborés entre une vision à la Matrix et ce qu’on se représente des contes scandinaves, à la fois traditionnels et très modernes, l’extraordinaire précision des éclairages, tout cela fait qu’à la fin on en sort à la fois étonnés et ravis. La retransmission est cependant pour mon goût trop centrée sur les visages (vus de beaucoup trop près) et les individus, on aimerait plus de vision d’ensemble. mais on n’est évidemment pas dans la salle “quand on n’a pas ce que l’on aime, il faut aimer ce que l’on a”.
Même si la Walkyrie en avril-mai prochain affiche complet, je vais essayer d’y aller car c’est bien trop tentant, en tous cas, on n’échappera pas à la semaine new yorkaise quand le Ring complet sera à l’affiche, à n’en pas douter, un événement se prépare et si vous n’allez pas à New York, réservez votre 14 mai pour aller voir La Walkyrie dans un cinéma près de chez vous!