BAYERISCHE STAATSOPER (MUNICH) 2012-2013: DER RING DES NIBELUNGEN de Richard WAGNER, DIE WALKÜRE le 24 janvier 2013 (Dir.mus:Kent NAGANO, Ms en scène Andreas KRIEGENBURG)

Le prologue. ©Bayerische Staatsoper

NB: les photos sont celle de la saison précédente, avec des artistes quelquefois différents

Ce soir, un début très traditionnel, avec arrivée du chef, applaudissements, mais aussitôt après le rideau se lève sur une scène de guerre où Siegmund, au milieu se bat contre des adversaires en nombre, qui le désarment, mais il réussit à fuir et à arriver dans la maison de Hunding, qui descend des cintres: un vaste espace dominé au centre par un immense frêne, entouré de “servantes” qui semblent des sortes de vestales tenant chacune une torche électrique, et qui vont accompagner toute la scène. Le frêne, avec son tronc large percée de la fameuse épée, soutient le plafond comme s’il soutenait le ciel ou le monde, et sont pendus à ses branches des cadavres en décomposition, et à ses pieds deux cadavres en attente d’un nettoyage qui  a lieu en fond de scène (un peu comme la vision de la chevauchée des Walkyries de Krämer à Paris).
On est dans un tout autre univers que celui de Rheingold, on tombe dans l’histoire, et donc dans la guerre, dans la mort, dans une obscurité mystérieuse et lourde,

Acte I maison de Hunding ©Bayerische Staatsoper

et cette maison de Hunding, c’est une sorte de Walhalla terrestre: on y accueille les soldats morts, on nettoie les cadavres, on les pend aussi à ce frêne maudit où naguère Wotan planta son épée que personne ne put retirer, comme s’il s’agissait d’un rite apotropaïque dont les femmes qui portent des torches seraient les prêtresses ou les servantes. Comme au Walhalla, on y mange un festin royal sur une table somptueuse recouverte de tapis et remplie de mets et de fruits délicieux. La table royale de Louis XIV…Enfin, dans ce Walhalla qui n’a rien d’un paradis, un couple mal assorti, Hunding/Sieglinde, marqué par des relations d’une violence visible où la femme est méprisée voire niée (Hunding s’essuie les mains sur la robe de Sieglinde par exemple), marqué aussi par l’impossibilité qu’ont Siegmund et Sieglinde de se toucher ou de s’approcher, séparés par un large espace, par les servantes: ils se regardent et se parlent de loin. Mais ils boivent la même eau dans le même verre transmis de main en main par les servantes, sorte de Tristan et Isolde buvant le philtre.
Dans ce monde empreint de violence dont les femmes  gèrent les suites de la guerre (elles s’occupent des cadavres), l’amour fait irruption. L’Or du Rhin a réglé une fois pour toute la question de l’amour, et Wotan  va gérer des guerres qui vont alimenter son Walhalla en héros morts.

Acte I ©Bayerische Staatsoper

Bref dès le début de La Walkyrie on tombe dans la guerre, mais l’irruption de l’amour dans ce monde de sang va créer le contraste qui va construire le récit.
Andreas Kriegenburg ne reprend pas (ou moins) le fil scénique inauguré dans Rheingold. Il entre résolument dans l’histoire, et l’espace se remplit de tous les objets nécessaires au récit. Alors bien entendu, il faut accepter cette rupture, que le spectateur va prendre un certain temps à comprendre et accepter.  Après un Rheingold novateur et surprenant, une Walküre qui au départ paraît bien banale, puisque c’est le livret qui est scrupuleusement suivi, apparemment sans idées nouvelles, et donc dans une sorte d’habitude, même si tout n’est pas vraiment clair au départ. D’où mon “moui” initial à la mise en scène.
Il reste que les images sont réussies, les éclairages de Stefan Bolliger vraiment splendides, et que peu à peu on rentre dans cette logique qui finit par fasciner. On passe alors du “moui” au “oui”, d’autant que le travail musical est tellement réussi, et tellement lié à ce qui se passe sur le plateau, qu’il emporte la conviction.
Une des clés du travail scénique, outre le contraste guerre/amour qu’on rencontre dans le couple Sieglinde/Siegmund face à Hunding, Wotan/Brünnhilde, voire d’une certaine manière Wotan/Fricka, c’est que si l’opéra est la “défaite des femmes” (rappelons-nous l’essai fameux de Catherine Clément), Die Walküre est plutôt celle des hommes. Toute l’action est conduite à l’initiative des femmes: Sieglinde découvre et nomme Siegmund, Fricka impose à Wotan de défendre Hunding, Brünnhilde désobéit à Wotan pour le convaincre ensuite de la condamner de la manière qu’elle va décider, elle. Quant aux hommes, ils meurent ou bien sont vaincus puis convaincus (Wotan).

Chevauchée: le ballet “acapella” ©Bayerische Staatsoper

Cette domination féminine on la constate dans le premier acte, où le plateau est envahi de femmes, ou bien sûr dans le dernier acte, dans la scène finale où les servantes portent le bûcher et se blottissent aux pieds de Brünnhilde endormie, enserrées elles-aussi dans les flammes, et surtout dans cette chevauchée initiée par un ballet  sans orchestre, où les “servantes” au milieu de corps empalés  frappent martialement du pied, seul bruit admis, et entament une longue chorégraphie rythmée mimant la chevauchée qui a pour résultat de pousser le public à la guerre: cela a commencé par un “ça suffit” compris par la partie francophone de la salle, puis par un “basta” compris par les italophones et non, et puis par des cris divers, des mouvements violents qui chauffent la salle à blanc pour entendre ensuite une chevauchée guerrière et sauvage à souhait. Il faut applaudir à l’ironie du metteur en scène et à sa manière de préparer la salle à la scène de la chevauchée, que tout le monde attend, et qui elle-même est si ironique (comme Coppola en avait bien compris le sens dans “Apocalypse Now”!), une sorte d’apologie de la sauvagerie dans un acte qui finit par une sorte d’apothéose d’amour. Ce que le public attend dans La Walkyrie, c’est un chœur de femmes sauvages ! Et la chorégraphie retarde le moment tant désiré…

La Chevauchée ©Bayerische Staatsoper

Kriegenburg travaille avec une précision d’horloger les mouvements, les relations entre les personnages, la relation à l’espace, par un jeu avec le mur du fond, qui se rapproche jusqu’à réduire l’espace à quelques mètres, ou qui s’éloigne tant que les personnages en disparaissent presque du champ visuel lorsque dans les dialogues, ils refusent d’admettre le discours de l’autre (Wotan face à Fricka, ou face à Brünnhilde au troisième acte). Cette variation de l’espace on la note aussi lors de l’annonce de la mort, sur un plateau surélevé, couvert de cadavres, où les protagonistes doivent composer avec un sol jonché, dans la nuit glaciale et mystérieuse.
Il manie aussi l’ironie avec force, on l’a vu dans la chevauchée, mais aussi à l’ouverture du second acte, où la musique du prélude est accompagnée d’un “pas de deux” entre Brünnhilde et Wotan qui font les mêmes gestes ensemble avec leurs lances et leurs deux épées, mais bientôt les serviteurs retirent à Wotan lance et épée pour lui offrir un stylo et lui faire signer des papiers: le Wotan nouveau, celui de Walhalla, n’est plus le dieu guerrier qui guerroie en direct, mais le gestionnaire du pouvoir, il fait la guerre par procuration, envoyant ses enfants (Siegmund) ou ses héros au charnier,

Acte II ©Bayerische Staatsoper

du haut de son lointain bureau, perdu en fond de scène avec sa lance accrochée au mur et sous une fresque représentant une nature torturée.
Ce pouvoir-là, on le lit aussi par le ballet des valets, porteurs de verre qu’on boit ou qu’on casse selon les humeurs (et l’on est souvent de mauvaise humeur dans cet acte II), ou transformés en fauteuils sur lesquels on s’assoit, des fauteuils où les serviteurs montrent leur dos  qui sert de coussin et reposent leur tête comme sur un billot. Ils mesurent le temps, ces serviteurs qui illustrent le pouvoir: car ils disparaissent peu à peu, au rythme des renonciations de Wotan.
Même type de jeu entre Brünnhilde et Wotan, qui se cherchent, qui se touchent (Acte II) , ou qui se tournent autour, s’éloignent, disparaissent, se cherchent pour se retrouver au troisième (joli jeu dans la première scène où Wotan jette une à une les Walkyries pour découvrir enfin au milieu de la scène une Brünnhilde isolée et sans protection). Au fur et à mesure qu’on rentre dans ce travail, on en trouve les qualités et le prix: loin de la banalité, c’est bien la subtilité des rapports, la violence des situations qui est marquée: un exemple, Wotan désespéré à l’acte II se retrouve au fond de la scène assis à son bureau, avec une foule quémandeuse allant vers lui, d’un geste sec, il la fait s’écouler: il est encore malgré sa défaite devant Fricka celui qui a droit de vie et de mort, et préfigure l’envoi de Hunding ad patres (geh! geh!).

Annonce de la mort ©Bayerische Staatsoper

Enfin, soulignons la complexité de la scène de la mort de Siegmund. Siegmund tombe en fond de scène, loin du public, Sieglinde se précipite pour se blottir contre le cadavre encore chaud. Wotan est “ailleurs”, et ne voit pas la fuite de Brünnhilde et Sieglinde, il passe en proscenium, le long de ces cadavres qui jonchent le sol, scène de guerre typique, puis retourne en arrière scène auprès de Siegmund, et s’agenouille, se prosterne. Rideau.
Ce travail très précis, intelligent, esthétiquement très soigné trouve en écho une véritable vision musicale en cohérence. Tout le monde a noté l’extraordinaire lenteur du rythme de la première partie de l’acte I, une lenteur qui pèse, qui ritualise totalement ce qui se passe en scène, le jeu des servantes, celui des femmes qui nettoient les corps, l’éclatement du couple apeuré Siegmund (côté jardin) et Sieglinde (côté cour), la violence rentrée  de Hunding, sa relation tendue à Sieglinde, son objet plus que son épouse, qui à la fois justifie la peur initiale, mais aussi agit comme déclencheur. Tout cela contraint les chanteurs à dire plutôt que chanter le texte, et cela crée une tension qui confine presque à l’agacement (quand cela va-t-il éclater?). Cette pesanteur, c’est bien le travail de Nagano qui le crée, et qui va ensuite exploser et se délivrer au moment du retour de Sieglinde et du duo d’amour. Alors, la musique devient source d’énergie, de force, elle se dynamise, dans une clarté inouïe: cette tension musicale, quelquefois glaciale, quelquefois lyrique, ne quittera plus le plateau. On ne peut qu’admirer aussi le jeu musical du duo Fricka/Wotan, où jamais l’orchestre ne couvre les voix (Nagano est très attentif à ce qu’on entende les chanteurs et le texte). Son approche n’a pas convaincu certains, et on a entendu quelques huées: injustifiées et profondément injustes: Kent Nagano montre dans sa manière de conduire la musique à la fois intelligence et adaptabilité, et surtout conscience de l’inévitable homogénéité qui doit se créer entre plateau et fosse.
A cet orchestre qui ce soir était profondément en phase avec le plateau, correspond un plateau qui peut être difficilement égalé aujourd’hui: Simon O’Neill, désormais un des Siegmund du “Ring-Tour” mondial, a cette voix claire, et suave, qui tranche avec la noirceur de Hunding: cette opposition construit le premier acte. Une voix bien posée, soucieuse de la diction comme souvent chez les chanteurs de l’école anglo-saxonne (il est néo-zélandais), puissante; il n’a pas en scène le charme fascinant d’un Kaufmann, ni même d’un Vogt, mais il tient la route comme on dit, même s’il va au-delà de ses forces (son second “Wälse” a été tenu au-delà du raisonnable et a bien fatigué les mesures qui suivirent) et qu’à la fin du second acte, très tendu, la voix perd un peu de son éclat, mais aucune faute de chant.
Hunding, c’est Hans-Peter König, magnifique comme toujours:  c’est la basse wagnérienne du moment, il n’y a rien à dire ni surtout à redire: c’est parfait, c’est exactement la voix du rôle, la couleur du rôle, et surtout le profil voulu par la mise en scène. Dans celle de Lepage, où Hunding est plus placide et presque tendre avec Sieglinde, il chantait autrement: force de l’adaptation et de l’intelligence du propos.
Wotan, c’est ce soir Tomasz Konieczny (il sera Alberich dans Siegfried et Götterdämmerung), un baryton encore jeune, à la voix claire, puissante, très colorée, au timbre vraiment magnifique. Je l’avais vu à Budapest en 2006 et j’avais noté cette voix en pensant “tiens, un futur Wotan”. Il faudra courir l’entendre lorsqu’il passera près de chez vous. Pour moi, Bryn Terfel reste en ce moment la référence, mais Konieczny n’en est pas si loin. Il a cette intelligence du texte (malgré de petits problèmes de prononciation) qui fait que chaque parole est colorée différemment, que chaque mot pèse. Et de plus, il tient la distance, son troisième acte est vraiment bluffant, très émouvant, très engagé. Il obtient un triomphe mérité.
Du côté des dames, le groupe des Walkyries est très correct: on a toujours des craintes car c’est toujours difficile à distribuer et on vire souvent des Walkyries à des furies hurlantes ou pire, aux chèvres bêlantes. Rien de tout cela ici.
Petra Lang en Sieglinde, c’est plutôt surprenant à ce stade de sa carrière où elle aborde Brünnhilde. Et on pouvait craindre d’une artiste qui n’est pas toujours contrôlée ni rigoureuse. Eh bien non! elle a chanté tout le premier acte et notamment la partie très lente du début avec une rigueur, un contrôle du son et une diction du texte exemplaires,  évidemment, la puissance de la voix libérée ne peut ensuite que provoquer l’admiration: c’est une voix, énorme, et quand elle chante comme ce soir, c’est magnifique. le duo final avec Brünnhilde est prodigieux. Et on entend évidemment la Brünnhilde du Crépuscule derrière cette Sieglinde là. Elle fut ce soir extraordinaire.

Wotan/Fricka ©Bayerische Staatsoper

Extraordinaire aussi Elisabeth Kulman dans Fricka. Autant hier dans Rheingold je l’avais trouvée pâle est sans caractère (était-ce alors voulu?), autant ce soir elle fut tout simplement la meilleure Fricka entendue depuis longtemps, elle a la puissance, les aigus, la couleur, l’engagement, la violence, l’ironie et surtout la présence fascinante. Une immense prestation qui laisse augurer d’une belle carrière, car la voix est intrinsèquement et belle, et ronde, et claire.
Enfin, Evelyn Herlitzius était Brünnhilde, avec ses qualités immense et ses défauts, des sons parfois rauques, incontrôlés, des aigus trop forcés quelquefois qui provoquent des accidents (dans le duo final avec Sieglinde, elle a perdu trois secondes le son: rien ne sortait plus de la gorge): la voix d’Herlitzius n’est pas si grande, c’est une voix moins naturellement forte que construite par la technique et par l’intelligence. D’où un surdimensionnement, très lisible quand on compare à Petra Lang aussi à l’aise dans les hauteurs que l’autre est tendue. Mais voilà, j’aime Herlitzius parce qu’en scène, elle a toujours quelque chose à dire, à exprimer. Elle a une présence irradiante. Son dernier acte et sa scène finale avec Wotan c’est du pur sublime, le texte est tantôt hurlé, tantôt murmuré, mâché avec une intelligence inouïe et une force émotive peu commune. Ah! combien de frissons m’ont traversé entre ce Wotan bouleversant et cette Brünnhilde prodigieuse de vérité, de finesse, de justesse. Dans ces cas-là, on passe sur les petits défauts, les frissons d’émotion s’en accommodent. Tout est au rendez-vous, le jeu, le chant, le texte: et on lit la pleine compréhension des enjeux de la mise en scène.
Oui ce soir tout a concouru à la réussite de la soirée, un cast exceptionnel et équilibré, une direction musicale d’une intelligence exemplaire qui s’adapte à chaque moment et à caque mouvement scénique, une mise en scène au total pas si simple, qui apparaît une lecture un peu banale du livret et qui finit par se révéler avoir plusieurs entrées, plusieurs points de vue, et qui est vraiment un parfait exemple d’analyse fine, tout en proposant une vraie vision. Oui, l’aventure continue mais c’est déjà hélas la moitié du chemin.
Ce Ring sera reproposé en juillet lors du Festival, pensez-y…sacrifiez celui de Paris, et avec l’économie faite, allez à Munich!
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Scène finale ©Bayerische Staatsoper

BAYREUTHER FESTSPIELE 2011: Quelques mots sur le LOHENGRIN retransmis par ARTE en ce 14 août

Incontestablement c’est un beau cadeau que cette retransmission (presque) en direct. C’est un signe de changement que la nouvelle direction veut donner, après avoir inauguré les projections sur grand écran en plein air à Bayreuth même, les projections en streaming, et tout en continuant à publier des CD et DVD des productions en cours. Et c’est en même temps un joli coup pour Arte dont on peut saluer l’action en matière de retransmissions d’opéras et de concerts.
Sur la production elle-même, rien de spécial à ajouter à ce que j’ai écrit suite à la représentation du 27 juillet , publié le 30 juillet sur ce blog. Je confirme ce que j’y écrivais: en dépit des craintes,  Annette Dasch réussit à imposer son personnage, grâce à sa présence, grâce aussi à l’élégance de son chant, malgré une voix peu adaptée au rôle, Petra Lang est toujours aussi impressionnante, Klaus Florian Vogt montre une fois de plus douceur, élégance,  phrasé exceptionnel, clarté du discours. Oui, la voix n’est pas immense, mais elle remplit la salle du Festspielhaus sans problème et la prestation est remarquable. Ceux qui disent que Vogt est “un peu juste” ou qu’il est un “ténorino” sont de très mauvaise foi. Même dans d’autres salles que Bayreuth, Vogt est un artiste qui passe très largement la rampe.  Donc le spectateur n’est pas frustré, il a devant lui  un authentique Lohengrin, de la grande lignée des Lohengrin glorieux.
Je suis toujours aussi frappé par Georg Zeppenfeld et sa composition en Henri l’Oiseleur à la mode Ionesco. Les gros plans permettent de voir combien l’artiste (je devrais dire les artistes tant c’est le cas de tous) est concerné par l’action scénique. Samuel Youn est égal à lui même; seul Jukka Rasilainen déçoit un peu: la voix semble fatiguée, et convient plus à l’excellent Kurwenal qu’il chante au Festival qu’à Telramund (rappelons qu’il remplaçait Tomas Tomasson, souffrant, et que j’avais fort apprécié).
Avec la télévision, on a une vision assez précise du travail de mise en scène, du traitement des foules, du jeu des chanteurs. On pourra discuter à l’infini des mérites de Neuenfels, on peut aussi le vouer aux gémonies, mais on ne peut discuter et le sérieux de l’entreprise, et la précision du travail théâtral qui frappe immédiatement. Hans Neuenfels est évidemment un vrai et un grand metteur en scène. Certes, son point de vue est radical, sa vision est d’une rare crudité, et ce type de travail continue d’alimenter les discussions sur les approches scéniques, sur le “Regietheater” sur théâtre et opéra . Mais c’est heureux ! Heureusement, le théâtre est vivant, il est vie, il est débat. Que la TV ce soir nous donne cette image de Bayreuth est aussi un bien pour ceux qui penseraient que le temple wagnérien est un temple fossile. Bayreuth est un lieu permanent de discussions, et la presse allemande en  guette les moindres soubresauts. Dernier bruit en date: le choix éventuel de Frank Castorf comme metteur en scène du Ring 2013 amènerait de facto le retrait de Kyrill Petrenko, le chef prévu…
Revenons à ce Lohengrin. J’étais un peu intrigué par les conditions de retransmission. Connaissant la salle, il n’y a aucune possibilité d’y installer des caméras sans provoquer des réactions violentes d’un public qui attend 10 ans une place et qui verrait éventuellement le gel de plusieurs dizaines de places d’un très mauvais œil. Les caméras n’étaient donc pas au Parkett, où le spectateur peut à peine se mouvoir, alors imaginons la TV…
Les caméras étaient souvent en hauteur, deuxième galerie de face (probablement dans les espaces de travail, tour de lumière etc…), dans les cintres au dessus de la scène (belles images, inhabituelles), et sur les côtés des coulisses pour les gros plans. Elles étaient donc situées là où le spectateur n’est jamais. Et ce sont des plans tout nouveaux qu’on a pu ainsi voir. Encore une bonne surprise.
Je me suis demandé aussi pourquoi le choix de Lohengrin dont la mise en scène pouvait indisposer certains spectateurs (la commentatrice d’Arte l’a d’ailleurs souligné, mais Madame Gerlach devrait varier un peu son vocabulaire et ses appréciations). J’ai donc procédé par élimination. Comme toutes les mises en scènes sont âprement discutées, elles auraient toutes provoqué des réactions violentes de toute manière!
Les maîtres chanteurs et Tristan sont déjà en DVD et sont des productions déjà anciennes. Par ailleurs, Les Maîtres Chanteurs sont très longs (trop long sans doute pour le temps télévisuel: rien que l’acte III dure 2 heures) et Tristan n’est pas non plus un des opéras les plus courts. Parsifal aurait pu convenir, car le côté spectaculaire de la mise en scène de Stefan Herheim, les changements à vue auraient pu convenir à la TV, mais vu les angles de prise de vue, certains effets étaient très difficiles à rendre à l’écran, notamment les effets du troisième acte avec les miroirs et la salle en reflet. Par ailleurs, Parsifal est un opéra lui aussi assez long. Restent Tannhäuser et Lohengrin, qui durent chacun à peu près autant et qui sont deux oeuvres réputées “plus faciles”. Proposer pour la première retransmission en direct une nouvelle production et une production si critiquée (dont la distribution est pour le moins contrastée)  était peut-être risqué pour le spectacle et la suite de son exploitation. Reste donc Lohengrin qui a plein d’avantages: la production est récente (un an) et elle a pu être déjà rodée musicalement (notamment la direction d’orchestre, aux dires de tous bien meilleure cette année que l’an dernier), elle est déjà connue scéniquement et au total n’a pas été si mal accueillie par la presse et le public, et Hans Neuenfels est une gloire du théâtre allemand. La musique est plus accessible à un large public que celle de Parsifal ou de Tristan et la distribution est solide (sans compter la présence d’Annette Dasch, qui en Allemagne est une figure exploitée par les magazines people). En somme on comprend ce choix, et au total, c’est un choix cohérent.
Voilà donc une soirée de plus à Bayreuth pour moi, inattendue, mais très satisfaisante: le téléspectateur a pu réellement se rendre compte de ce qu’est ce Festival aujourd’hui. Merci encore Arte.

BAYREUTHER FESTSPIELE 2011: LOHENGRIN, le 27 juillet 2011, dir.mus: Andris NELSONS, ms en scène: Hans NEUENFELS

« Quand 80 rats chantent, c’est autre chose que quand 80 hommes casqués chantent. Cette optique surpasse toute bizarrerie. » Voilà ce que répond Hans Neuenfels, metteur en scène de Lohengrin au Festival de Bayreuth (production de 2010), dans le programme de salle, à ceux qui s’étonneraient de voir un Lohengrin où le chœur est costumé en rats, des rats, noirs, blancs, roses. Il ajoute « je fais remarquer, à ce propos, que le rat est un animal extrêmement intelligent, un rongeur dangereux, vorace, qui se reproduit vulgairement, et aussi drôle que dégoûtant. Les rats dévorent tout, ce sont de véritables acrobates de la survie. Et ils existent en masse. » Enfin , une définition de Lohengrin : «Jamais tu ne devras m’interroger, voilà le point chaud. Les personnages rôdent autour de la question interdite comme des souris ou des rats entourant un morceau de lard ». Ces rats omniprésents dans ce Lohengrin ont souvent masqué dans les comptes rendus critiques ce qui est à mon avis l’une des grandes mises en scène de ces dernières années, d’un pessimisme noir et d’une désespérance existentielle.

Car le Lohengrin vu à Bayreuth ce 27 juillet est exceptionnel, l’accueil triomphal littéralement indescriptible du public qui a hurlé, battu des pieds, applaudi debout pendant plus vingt minutes en dit long sur un succès qui est le plus gros succès, le plus grand triomphe depuis une dizaine d’années. Grande mise en scène, distribution parfaite, direction musicale grandiose, la recette est simple, au fond pour faire naître un triomphe historique, dont tous les spectateurs parlaient encore le lendemain.

Il n’y a pas grand-chose à dire sur les chanteurs, tant chacun s’est engagé pour défendre le travail collectif de manière exemplaire. J’avais bien des doutes sur Annette Dasch, et le premier acte laissait craindre des difficultés : la voix est petite, sans grande étendue, mais cohérente avec la vision de la mise en scène, elle n’est que fragilité et doute dès le début, où elle entre en scène transpercée de flèches (comme Saint Sébastien) qu’on lui arrache une à une, et où elle n’est plus que douleur. Face à un ouragan comme l’Ortrud de Petra Lang, cette fragilité vocale devient un atout de mise en scène et produit du sens. D’ailleurs, elle est totalement extraordinaire de vérité dans les deux autres actes. Actrice prodigieuse, voix qui distille une immense émotion, Annette Dasch fait ici mentir ceux qui prédisaient une catastrophe… Face à elle,  l’Ortrud immense, véritable phénomène de la nature, de Petra Lang, dont j’ai déjà dit beaucoup de bien dans le compte rendu du Lohengrin de Budapest. L’étendue, la puissance de la voix sont phénoménales, sans compter l’homogénéité, la sûreté des aigus et la présence scénique.Depuis Waltraud Meier, on n’a pas entendu mieux, et c’est peut être encore plus suffocant que Waltraud Meier. A cette Ortrud répond un nouveau Telramund, Tomas Tomasson (remplacé à la représentation TV par Jukka Rasilainen, meilleur Kurwenal que Telramund), un baryton islandais qui n’a pas forcément le volume habituel, mais qui possède un art du phrasé, une qualité de chant, une élégance qui laissent rêveurs. Un chanteur magnifique, qui sait jouer de qualités éminentes et qui propose un personnage tout en tension. Saluons aussi le Roi Henri halluciné de Georg Zeppenfeld qui lui aussi remporte un énorme succès : la voix est somptueuse et de plus quel personnage que ce roi sans pouvoir, qui tient à peine sur ses jambes, un roi de carton-pâte avec sa couronne que Ionesco ne démentirait pas ! quant au héraut du coréen Samuel Youn, c’est une très grande prestation : lui aussi est un technicien hors pair, lui aussi est particulièrement attentif à la technique vocale, à la respiration, au volume, si nécessaires dans ce rôle.  Enfin le Lohengrin de Klaus Florian Vogt, bien connu à Bayreuth pour ses magnifiques Walther, qui a la lourde tâche de succéder à Jonas Kaufmann,  est dans ce rôle totalement prodigieux : une voix claire et sonore qui domine sans difficulté l’orchestre, un phrasé modèle, un art des « diminuendo », des notes filées, grâce à un contrôle supérieur de la respiration, une douceur inouïe, tout cela produit un des plus beaux Lohengrin que j’ai entendus dans cette salle. Miraculeux en salle. Miraculeux dans cette salle si amicale aux voix, et notamment aux voix de volume moyen.  Vogt produit moins d’effet à la TV. Miraculeux aussi (et comme toujours)i le chœur dirigé par Eberhard Friedrich, qui chante dans des conditions pas toujours faciles (derrière des masques de têtes de rats le plus souvent) qui joue tout en chantant l’agitation d’un troupeau de rats, d’une présence à couper le souffle. Grandiose, lui aussi. Bien sûr on attend tout cela du chœur de Bayreuth, mais c’est toujours une source d’étonnement que cette extraordinaire phalange, qui semble pouvoir accomplir tous les rêves des metteurs en scène (qui sont aussi quelquefois les cauchemars de certains spectateurs) tout en chantant merveilleusement.

Cette distribution est magnifiquement soutenue par Andris Nelsons , un jeune chef d’envergure, 32 ans, élève de Mariss Jansons le plus jeune chef engagé par Bayreuth l’an dernier (31 ans). Son Lohengrin est d’abord en adéquation totale avec la mise en scène, jamais pompeux, jamais tonitruant, mais lyrique, mais dramatique, mais plein de douceur mélancolique, voire d’ironie, avec des cordes extraordinaires, un sens du rythme, une précision, une clarté vraiment étonnantes. Le tempo peut sembler quelquefois un peu lent, mais colle tellement au déroulement de l’action. Un magnifique travail. Un très grand chef.

A cet engagement musical, correspond un travail scénique à la fois exemplaire et d’une grande intelligence. L’idée de départ est une sorte d’expérience scientifique (qui échoue à la fin), d’où les rats qui sont des rats de laboratoire (noirs les mâles, blanches les femelles), créatures mi hommes mi rats, qui sont à la fois désopilants (manière de marcher, de remuer les mains) et terribles (par exemple au début du deuxième acte, lorsqu’ils s’attaquent au fiacre accidenté de Telramund et Ortrud qui ont cherché à fuir en emportant des valises de billets. Vision spectrale que ce cheval mort, que ce fiacre noir accidenté, que ces valises ouvertes, et que les rats s’empressent de réduire à néant. Dans le monde de Neuenfels, mais aussi de Wagner qui a écrit cette histoire, l’utopie n’existe pas,  et l’amour n’en est pas une.  L’échec final est terrible : les rats, les hommes meurent, l’humanité disparaît …Restent en scène Lohengrin, seul au milieu d’une marée de cadavres, lui qui n’est vraiment un humain, et le jeune frère d’Elsa, sorte d’enfant monstrueux né d’un œuf de cygne, qui déchire lui-même son cordon ombilical en le jetant en pâture aux rats.  Dans un monde où les héros sont incapables de s’unir, il ne pouvait naître qu’un monstre. Terribles images aussi que celle d’Elsa, dans une sorte de cage de verre adorant un cygne de porcelaine et au bord de la consommation…une sorte de double de Leda, et Ortrud, qui n’hésite pas elle, par bravache, par dérision, à chevaucher ce cygne de manière fortement suggestive. Le tout dans une ambiance aseptisée, blanche, à la lumière crue, où dans la fameuse scène du mariage au deuxième acte Ortrud et Elsa sont cygne noir et cygne blanc, comme deux faces d’une même réalité vouée à l’échec et au néant. L’ultime apparition des deux femmes, au troisième acte, s’inverse : Elsa est vêtue de noir, en deuil de son amour et Ortrud apparaît en reine blanche vêtue d’une couronne de pacotille, porteuse d’une victoire à la Pyrrhus : toutes ces images sont marquantes, impressionnantes, souvent même bouleversantes.

Certes, ainsi racontée par bribes, cette mise en scène peut paraître étrange, et de lecture difficile : elle exige en fait attention et tension (on sort vidé),  mais elle est d’une grande clarté et d’une grande efficacité : elle nous montre un monde sans concessions, sans espoir, où toute croyance (la croix du 2ème acte est brisée) est bannie, où les hommes sont inhumains, comme des rats de laboratoire conduits par des envies animales, où ne se meuvent que les intérêts et les noirs desseins : dans cette vision, les bons comme les mauvais les blancs et les noirs, les rois et le peuple, tout le monde est dans le même bateau, une sorte de nef qui coule : plus de pouvoir, plus que le ridicule des insignes du pouvoir dont on va se contenter. Lohengrin devient le formidable échec de toute utopie, et de la plus grande, celle de l’amour. Le duo du troisième acte, où Elsa évite systématiquement le contact avec Lohengrin et où le lit nuptial est entouré de barrières qui en limitent l’accès est frappant : plus frappant encore le ballet érotique entre Elsa et Lohengrin qui dans les dernières minutes avant le rideau final, se jettent l’un sur l’autre comme si le ballet nuptial ne naissait que de la certitude de son impossibilité, comme si de cette impossibilité naissait le désir.

Reinhard von der Thannen pour les costumes et le décor, Hans Neuenfels pour la mise en scène ont effectué un travail d’une exceptionnelle qualité, avec une lecture lucide et désespérée de notre monde. Hans Neuenfels passe pour un provocateur permanent : il lit le monde, il le métaphorise. Il nous dit là que nous sommes tous des rats, que l’humanité sombre : c’est le privilège du théâtre, de l’artiste, de transfigurer notre réel, et même de le noircir et la présence en salle de la chancelière Angela Merkel est une ironie suprême, pouvoir réel et pouvoir fantoche étaient ce soir mélangés, voire confondus à Bayreuth. Soirée inoubliable.

PS: Vous pourrez voir ce Lohengrin en direct sur ARTE le 14 août à 17h15. c’est la première fois qu’un opéra est ainsi retransmis en direct à Bayreuth.

BUDAPEST – PALAIS DES ARTS 2010-2011 : LOHENGRIN de Richard WAGNER (Dir.mus: Adam FISCHER) le 12 JUIN 2011

Le Festival Wagner de Budapest dirigé par Adam Fischer, a désormais pignon sur rue. Il entraîne un public nombreux, et notamment beaucoup d’autrichiens, attirés par la qualité musicale des productions. Quand le soleil s’en mêle, sur fond de Danube, la fête est totale, calquée sur  les rites, sinon les rythmes, du Festival de Bayreuth. Depuis quelques années, Adam Fischer présente chaque année une production nouvelle, en alternance avec les productions des années précédentes, ce fut d’abord Parsifal, puis le Ring, puis Tristan. C’est cette année Lohengrin, en alternance avec Tristan et Parsifal. Ce sera l’an prochain Tannhäuser, en alternance avec le Ring.
Ce 12 juin, on peut dire que ce fut un Lohengrin en état de grâce, ce qui au fond convient bien au personnage…
Les conditions de production sont particulières: le Palais des Arts est une salle de concert dont l’espace scénique est aménageable, et qui a une fosse. Ce qui veut dire qu’on y donne essentiellement des concerts, mais qu’on peut y voir aussi des ballets, et aussi des opéras. Les productions doivent tenir compte des particularités du lieu: décors à combiner avec l’architecture de la salle, utilisation fréquente de la vidéo, pas de dégagements, pas de profondeur, mais des contraintes d’utilisation (en hauteur, on utilise les balcons de l’auditorium par exemple), et les décors sont adaptés autant que faire se peut au décor de la salle, ce fut le cas l’an dernier, c’est encore le cas cette année dans une production signée László Marton, assez sage, qui représente un monde militarisé (en uniformes bien connus des ex-pays de l’Est) que l’arrivée de Lohengrin démilitarise (chemises aux couleurs criardes). Rien de révolutionnaire dans cette vision, mais la production a l’avantage (par rapport à celle de Tristan l’an dernier) d’être lisible et esthétiquement assez propre (belle entrée d’Elsa, de la salle, en voile noir par exemple). Mais ce qui frappe d’emblée c’est la qualité imprimée par les choix musicaux: l’orchestre est remarquable de netteté, de finesse, de dynamique. La direction d’Adam Fischer est très équilibrée, laissant se développer le son et le symphonisme, faisant bien apparaître tous les pupitres, isolant les cuivres au deuxième balcon, ce qui élargit l’espace sonore. Il y a des moments proprement impressionnants (final du deuxième acte, d’une belle tension avec l’utilisation somptueuse du grand orgue de la salle!). Cela confirme l’opinion que j’ai depuis longtemps d’Adam Fischer, un chef un peu négligé quelquefois notamment en France, qui  a d’éminentes qualités de raffinement et d’intelligence musicale, très classique dans son approche mais toujours impeccable. En tout cas ce soir, ce fut tout simplement grandiose.
Grandiose aussi grâce à la distribution réunie, faite de chanteurs hongrois et de grandes vedettes internationales. Burkhard Fritz, prévu à l’origine en Lohengrin, a été remplacé par un ténor hongrois en troupe à Mannheim, vraiment remarquable de technique, faisant des mezze voci inhabituelles, modulant à l’extrême son chant,  avec une belle puissance et un beau volume.

 


Photo: Zsuzsa Pető
Source: Palace of Arts – Budapest

Son nom, István Kovácshazi est à retenir. La mise en scène en fait une sorte de professeur nimbus, étudiant attardé, petites lunettes fines, chemise blanche, gilet noir porteur d’un étui à violon (les violons du paradis?). Au total très convaincant. Lui répond une Elsa de luxe, la finnoise Camilla Nylund, voix solide, très dominée, quelquefois un peu froide, qui compose un personnage un peu perdu, un peu “ailleurs” elle aussi, avec de très beaux moments au premier et deuxième acte, la voix est étendue et sûre: elle n’a pas de vrai caractère, et c’est dommage, mais l’ensemble est de très haut niveau.

Photo: Zsuzsa Pető
Source: Palace of Arts – Budapest

Face à ce beau couple, celui, tout à fait extraordinaire, du Telramund de Béla Perencz et de l’Ortrud incroyable de Petra Lang. Béla Perencz, membre de la troupe de l’opéra de Budapest, compose un Telramund intense, puissant, avec de très réelles qualités de diction et d’émission et Petra Lang est d’une intensité, d’une violence, et d’une puissance proprement ahurissantes: je ne sais si j’ai déjà entendu pareille Ortrud, sans doute encore plus impressionnante que Waltraud Meier, ou en son temps à Bayreuth, d’Elisabeth Connell. On l’entendra à Bayreuth cet été dans Ortrud, j’avais exprimé ma déception de voir disparaître Herlitzius de la distribution,mais devant ce que j’ai entendu là, tout doute est effacé: Petra Lang  devrait être l’ouragan attendu à Bayreuth: elle remporte un triomphe mérité, et impose un personnage presque définitif, le final est à ce titre inoubliable.
Des deux autres protagonistes, le héraut de Michael Nagy avec son très beau timbre chaleureux, sa puissance, ses qualités de diction surnage, voilà  qui excite la curiosité devant son prochain Wolfram à Bayreuth.


Photo: Zsuzsa Pető
Source: Palace of Arts – Budapest

Quant à Alfred Muff, la voix a évidemment un peu vieilli et il éprouve quelques difficultés (puissance), mais le travail sur le texte, la dignité de la prestation scénique, la noblesse de la voix restent convaincantes.
Ce fut donc un Lohengrin anthologique, une des grandes représentations de cette oeuvre, sans doute une des meilleures soirées Wagner entendues à Budapest. Vaut le voyage, allez!

Photo: Zsuzsa Pető
Source: Palace of Arts – Budapest