LUCERNE FESTIVAL EASTER 2010: Claudio ABBADO dirige le Sinfonica della Juventud Venezolana Simon Bolivar au Festival de Lucerne-Pâques (19 mars 2010)

 

C’était l’autre soir à Lucerne la rentrée de Claudio Abbado, après deux mois passés au Venezuela et quelques concerts avec le Sinfonica de la Juventud  Venezolana Simon Bolivar qu’il fait venir pour quelques jours à Lucerne.  Tout d’abord, il était très en forme, sautant les marches, redirigeant avec sa baguette, souriant, énergique.  Que ceux qui s’inquiètent de sa santé se rassurent, il va très bien, et comme d’habitude, le contact avec les jeunes le galvanise.

Une conversation le lendemain avec quelques uns des tout jeunes membres de cet orchestre était édifiante : « là où il nous mène, nous allons », « on se rend compte que l’on joue mieux sans savoir pourquoi »,  « il nous fait faire des choses incroyables ».
Incroyable, voilà le mot. On a beau assister à dix concerts d’Abbado par an, on oublie à chaque fois l’énergie, la vigueur, le dynamisme, la jeunesse éclatante de liberté qu’il diffuse, aux musiciens comme au public. C’est comme une éternelle découverte de l’évidence : il se passe quelque chose de fort, de rare, de profond à (presque) chaque concert.
L’autre soir à Lucerne, c’était un soir de miracle. La conjonction d’un programme magnifique, d’une énergie farouche, et d’un orchestre absolument extraordinaire, en état de grâce. A peine le temps de sauter sur le podium et la paroxystique Suite Scythe de Prokofiev sonne. Je ne suis pourtant pas un grand amateur de cette musique certes puissante, composée à l’origine pour un futur ballet de Diaghilev, mais qui n’eut pas l’heur de plaire. Pour Diaghilev, Prokofiev fera « Chout ». L’orchestre joue fortissimo, à une vitesse ahurissante, la lecture est d’une clarté cristalline, la précision redoutable. Cela sonne, et cela nous écrase littéralement. Une merveille. Mais quel contraste avec la Lulu Symphonie, toute subtilité : même clarté, même précision, mais cette fois-ci au lieu de la puissance écrasante, le miroitement, le scintillement lyrique des notes. Une musique d’un lyrisme étonnant, là où on est habitué plutôt à la froide chirurgie d’un Boulez, la partie finale est à ce titre frappante, cela sonne comme le Mahler de la 9ème Symphonie, d’une tristesse irrémédiable, infinie. Et puis une voix, fraiche, lisse, à la tenue et à la technique parfaite, qui immédiatement EST Lulu, celle d’Anna Prohaska, jeune soprano en troupe à Berlin, qu’Abbado veut en Lulu. Abbado la veut tellement qu’il fait, pour elle un bis, le « Ach ich fühl’s » de la Flûte enchantée. Mis en perspective avec la musique de Berg, la musique de Mozart sonne là aussi dans sa tristesse déchirante. Un moment d’exception, chanté avec une douceur et une profondeur qui étonnent.
La symphonie Pathétique, un morceau de bravoure attendu pour tout chef et tout orchestre, et pour tous les publics est abordée ensuite dans une lecture qui rappelle Mravinski, mais qui à réécouter le vieux chef russe, va encore plus loin dans l’énergie et les contrastes. Les parties les plus lyriques sont exacerbées, la lecture est écorchée, bouleversante. Puis vient le 3ème mouvement, et cette explosion d’énergie devient ivresse sonore, un océan mouvementé, ( ah ! ces cordes !! 13 contrebasses, 15 violoncelles), à tel point que le public tente d’applaudir mais Abbado ne marque même pas un silence entre le troisième et le quatrième mouvement, qu’il enchaîne et qu’il rend lui aussi  renversant de profondeur, d’amertume, de douloureuse humanité. Je cherche à exprimer par des mots, que je sens bien faibles, bien vides, cette impression de plénitude qui saisit le spectateur. A la fin, sourires rassasiés, comblés par Abbado et cet orchestre magnifique plein  d’énergie, plein de « futur », d’enthousiasme, d’engagement et surtout impeccable machine à faire de la très grande musique (un ami me disait en plaisantant, « c’était bien Berlin, hein ? »), tout le public jusqu’aux quatrièmes galeries bondit littéralement  pour une « standing ovation » délirante.

Oui, il faut aller à Lucerne, pour vivre ces moments de pur  bonheur stendhalien. Une fois de plus, l’incroyable jeune homme de 76 ans a transformé un concert en moment, en moment de pure joie, pour lequel il vaut la peine de vivre.

CONCERT DU NOUVEL AN: quelques notes sur les éditions à posséder

Institution quelquefois plus médiatique que musicale , le concert du Nouvel An est souvent cependant l’occasion de mieux comprendre ce qui fait d’un chef d’orchestre glorieux (la plupart de ceux qui accèdent au podium du Musikverein le 31 décembre et le 1er janvier le sont) un véritable musicien. En effet, le programme proposé est souvent identique (quelques fantaisies çà et là cependant) et de toute manière tout le monde se retrouve au “Beau Danube Bleu” et à la “Marche de Radetsky”. Pour qui veut comparer les chefs, ou jouer à l’écoute aveugle avec ses amies et amis mélomanes, c’est un excellent moyen de juger, sur un morceau que tout le monde connaît à peu près par coeur. J’ai dans ma discothèque Willy Boskovski, Karajan (1987), Abbado 1988 et 1991, Kleiber 1989 et 1992, Muti en 1993 (il fera aussi 2000 et 2004) (soyons méchant, par curiosité presque malsaine), et Jansons. Je me suis amusé, sur un long trajet en voiture, à faire des comparaisons.
Le concert du Nouvel An à Vienne a été dirigé par Willy Boskovski, le premier violon des Wiener Philharmoniker de 1955 à 1979 et chef de l’orchestre Strauss, le spécialiste incontesté de ce répertoire pendant de très longues années, je me souviens qu’il dirigeait l’orchestre son violon en main, c’était dans la plus pure tradition viennoise, et les concerts de cette époque furent sans doute les plus “conformes” à l’esprit viennois, et c’était incontestablement l’orchestre, et Strauss, qui avaient la vedette. Acheter Boskovsky, c’est une garantie de qualité, d’esprit, d’authenticité et aussi de simplicité.

Ce n’est qu’en 1980 qu’on a commencé à y voir des chefs de renom se frotter à Strauss à Vienne, le premier fut Lorin Maazel, plusieurs fois appelé à diriger ce concert pendant les trente dernières années. En général les GMD (Generalmusikdirektor, directeur général de la musique) de Vienne, poste prestigieux s’il en est (ce fut celui de Mahler), comme Maazel, Abbado ou Ozawa sont invités presque obligatoirement à diriger ce concert:  l’an prochain, ce sera (logiquement) le tour de Franz Welser-Möst,  puisqu’il va occuper le poste de GMD à la Staatsoper en succédant à Seiji Ozawa. Depuis que le concert du Nouvel An est le phénomène planétaire et médiatique que l’on sait, la vedette reste Strauss, le chef, sans doute peu connu du très grand public (sauf Karajan en 1987) passe au second plan, sauf pour les mélomanes. C’est cette ignorance qui  a fait ainsi la fortune d’un André Rieu dans Strauss, hélas.

Il reste que si l’on veut acheter ou faire cadeau d’un concert du Nouvel An, c’est une bonne entrée en musique classique: on a un large choix, le concert de l’année étant publié dans les jours ou les semaines qui suivent le 1er janvier (un temps absolument record!). Ma vocation de mélomane est ainsi née à partir d’un cadeau de valses de Vienne qu’on me fit quand j’avais 8 ans, j’ai écouté et réécouté les valses de Vienne par l’orchestre hongrois de Yoska Nemeth, sans doute un des musiciens tziganes parmi les plus fameux du XXème siècle. C’est dire comme je suis attaché à cette musique. Si vous trouvez le disque en question, n’hésitez pas, c’est vraiment tout à fait remarquable et c’est un excellent moyen de rentrer dans l’univers des Strauss.

Et les autres?  J’aime bien Abbado 1 (1988) plus que Abbado 2 (1991) éclectique et surprenant (Mozart!), comme aime faire Claudio, mais au total un peu ennuyeux pour mon goût, disons que ces concerts ne sont pas les plus grands souvenirs de ma vie d’abbadien itinérant. Riccardo Muti comme souvent fait du beau son, mais tout cela reste assez plat, sans âme (j’écrirai un jour prochain sur ma relation très contrastée à ce grand chef, dont j’aime surtout les années 1975-1985, c’est à dire les premiers enregistrements fulgurants et l’éblouissant passage à Florence). J’ai acheté le disque de Mariss Jansons, chef que j’apprécie tout particulièrement, comme ceux qui me lisent le savent. Quelle surprise d’entendre un Strauss très symphonique,dans une interprétation très marquée par l’univers de Tchaïkovski, avec un orchestre massif qui semble quelquefois jouer Onéguine: si vous voulez une couleur autre, une vraie prise de risque interprétative, alors n’hésitez pas à en faire l’acquisition, c’est étonnant, c’est très fort, très intelligent, mais on n’est pas vraiment à Vienne.

Il reste…Carlos Kleiber. Eh, oui! A écouter et à réécouter, on a tout dans ces trois disques des deux concerts (1989 et 1992): on a d’abord la légèreté et la danse: Kleiber ne fait pas d’abord du symphonique, il fait danser l’orchestre, il n’appuie jamais sur les effets, il est étourdissant de vélocité (et l’orchestre suit d’une manière époustouflante), il virevolte, mais toujours avec un soin maniaque pour les effets instrumentaux (des rubatos des cordes à se damner, des flûtes de rêve) sans jamais insister, sans jamais appuyer, en cherchant toujours l’effet dansé: alors naît l’émotion profonde, intense (début du Beau Danube Bleu en 1989!comme je l’ai déjà souligné précédemment) . Il a arrive même à effacer toute lourdeur dans la Marche de Radetsky! Ne parlons pas de l’ouverture de “La Chauve Souris”, qu’il a dirigé si souvent à Munich;( je l’ai entendu pendant le Carnaval, il arriva en perruque déguisé en Boris Becker!) . Le disque de 1989 est un miracle, plus sans doute que celui de 1992. Si vous avez un seul concert à acheter, alors, pas d’hésitation, Vienne-Kleiber 1989. C’est absolument incomparable, à tous les niveaux, Strauss pour l’éternité. Rien de surprenant me direz-vous, certes, car à distance de 21 ans, personne n’a encore proposé mieux et Kleiber est une référence universelle, mais il vaut mieux encore une fois le dire et encore une fois le répéter: Kleiber 1989, c’est vraiment un monde fou fou fou!

MARISS JANSONS dirige la Symphonie n°2 de Mahler (Résurrection) au Barbican Centre de Londres (13 décembre 2009)

 

J’ai longtemps considéré la Symphonie n°2 (Résurrection) dirigée par Bernstein (la première version avec NewYork surtout) comme l’absolue référence. Puis vint en 2003, l’incroyable interprétation d’Abbado à Lucerne (il y en a un CD et un DVD), notamment lors de la répétition générale, qui nous avait tous assommés. Je me souviens de mon voisin (il y avait deux cents personnes en salle) qui ne cessait de murmurer “toll, toll” (en allemand, extra, formidable, génial!) les larmes aux yeux. Un miracle de ce type n’est plus jamais revenu, et j’ai attendu six ans pour réécouter en concert une Symphonie “Résurrection” (Dudamel, à Lucerne). Cette saison, Abbado y revient cette saison lors de son concert de retour à la Scala de Milan: l’attente est immense comme on le sait. Alors, j’ai voulu entendre ce que Mariss Jansons en faisait, lui qui est avec Boulez le chef que j’admire le plus après Abbado aujourd’hui. C’est ce qui a justifié une petite virée londonienne, toujours agréable par ailleurs, puisque je ne pouvais être à Pleyel le 17 décembre; c’était d’ailleurs moins cher à Londres, bien moins cher même, avec un prix maximum de 55£ (110€ à Paris: on ne commentera pas…).

Ce que l’on peut dire d’emblée c’est que ce concert à lui seul valait le voyage. D’abord parce qu’on reste frappé par la perfection technique de l’orchestre, à qui il est beaucoup demandé: la présence en coulisse d’un grand nombre de pupitres, notamment des vents, construit un système d’écho coulisses/salle qui amène le public à se concentrer d’une manière inhabituelle sur ces parties de l’œuvre qui du fait même  des musiciens jouant en coulisse, renforce l’attention et fait découvrir des éléments qu’on n’avait pas forcément remarqués (notamment des phrases à la limite de l’atonalité) et rend tellement forte la célèbre phrase de Wagner dans ParsifalZum Raumwird hier dieZeit“. C’est justement l’espace sonore qui se démultiplie dans une constante perfection et impose au déroulé de la symphonie une nouvelle couleur. Jansons construit avec une rigueur implacable l’architecture du texte: il isole par une pause très longue le premier mouvement (que Mahler avait d’abord appelé “Totenfeier“-cérémonie funèbre-) du reste de l’œuvre comme si ce premier mouvement, à lui seul autonome, construisait un socle, et que le reste était le parcours vers la lumière et la Résurrection. Dès le début, l’atmosphère est tendue: Jansons retient le son jusqu’à la limite du possible et de l’audible. Ainsi les fortissimi n’apparaissent qu’en contraste avec les sons à peine effleurés, pas de fioritures, des sons nets, souvent cassants, puis un développement mélodique d’une lenteur inattendue (1h35),  qui met le spectateur en tension permanente lui aussi et qui crée les conditions d’une intense émotion. On ne cesserait de trouver des perfections nouvelles, le dialogue du premier violon et de la flûte, tous les bois et les cordes  époustouflants, les harpes toujours mises en valeur, tout cela rend chaque phrase musicale  isolée et chargée de sens et en même temps en permanente écho avec le reste dans une solution de continuité d’une rare homogénéité. Le second mouvement est absolument magique, même si les fameux pizzicati étaient encore plus éthérés et suspendus chez Abbado; il est vrai aussi qu’Abbado a une conception plus aérienne de la symphonie, alors que la vision de Jansons est, au départ au moins, pleinement chthonienne, pour s’élever peu à peu vers l’Ether. Ainsi pourrait-on s’étonner du contrôle qu’il exerce sur chaque pupitre, de cette machine à la fois parfaitement huilée, qui pourrait être un peu mécaniste, qui dès le départ a un sens, une âme, un souffle, parce qu’on sent une intime liaison entre chaque musicien et son chef et l’on ne fait pas simplement des notes, mais on fait ensemble de la musique. Cette vision est animée de bout en bout et conduit le spectateur qui est de plus en plus tendu avec une force inattendue et surprenante vers un final à couper le souffle: les trente dernières minutes créent une tension insupportable à cause de la rétention permanente du son, dans une vision majestueuse et grandiose que renforcent les interventions des deux solistes, BernardaFink et RicardaMerbeth: BernardaFink est magnifique, la voix a une grande étendue, une grande pureté, et son intervention dès “Urlicht” accentue la couleur de l’attente grave de la dernière partie de l’œuvre. RicardaMerbeth reste un peu moins expressive, mais son intervention finale reste spectaculaire. Le LondonSymphony Chorus quant à lui est un bon chœur qui intervient de manière correcte, sans plus, et qui marque une distance avec l’incroyable orchestre que nous entendons, dans une salle  à l’acoustique malheureusement  trop sèche, comme je le remarquais hier, qui aujourd’hui gêne encore plus et empêche l’expansion de cette musique céleste.

Au total, une attente récompensée au delà de nos espérances. Certes on sait combien le répertoire mahlérien est dans les gènes du Concertgebouw depuis  Mengelberg (et poursuivi par tous les chefs qui le dirigèrent), mais nous avons eu là, au-delà de la démonstration technique qui confirme à mon avis la toute première place de cet orchestre dans le panthéon mondial, un moment musical d’exception, un des plus grands concerts qui nous ait été donné d’entendre, sur des présupposés opposés à ceux d’Abbado, mais avec un résultat bien proche en terme d’émotion. Sans doute pour moi l’exécution d’Abbado en 2003 à Lucerne reste la référence miraculeuse et sans doute un peu magique, mais ce 13 décembre au Barbican Centre, grâce à Mariss Jansons et à l’orchestre du Concertgebouw, le public (debout, en délire)  a vécu un de ces moments pour lesquels il vaut la peine de vivre.

MARISS JANSONS dirige Smetana, Martinu, Brahms à Londres (12 décembre 2009)

Mariss Jansons est un chef peu médiatique, discret, mais qui là où il passe, traîne après lui tous les coeurs…A Munich, il fait exploser les abonnements de l’Orchestre de la Radio Bavaroise, tandis que le Münchner Philharmoniker connaît une crise importante et renonce à prolonger le contrat de Christian Thielemann, un chef pour moi trop bien considéré pour ce qu’il apporte vraiment à la musique. A Amsterdam, où il dirige le Concertgebouw, Jansons a réussi en quelques années à le reporter au sommet de la hiérarchie des orchestres, après une période Chailly un peu mouvementée. Le Concertgebouw est ce week end à Londres, au Barbican Center, pour deux concerts: ce soir, l’ouverture de la Fiancée vendue, de Smetana, le concerto pour deux orchestres à corde, piano et percussion de Martinu, et la 4ème symphonie de Brahms, demain après-midi, la Symphonie n°2 de Mahler “Résurrection”. Je venais à Londres pour Mahler et Jansons, et puis il restait des places excellentes et peu chères (12 £) pour ce soir, je n’ai pas hésité, et j’ai eu raison ô combien. D’abord, parce que j’ai découvert une oeuvre que je ne connaissais pas (Martinu) et ensuite parce que Brahms a été littéralement grandiose.

Dès les premières mesures de l’ouverture de la Fiancée Vendue, on remarque l’infinie légèreté des cordes, qui émettent un son à peine audible, tout le début jouant sur le contraste entre l’audible et l’inaudible, puis se développe en un crescendo impressionnant, très difficileà jouer. Manière de présenter l’incroyable qualité de cet orchestre, que d’aucuns n’hésitent pas à mettre au premier rang mondial, devant Vienne et Berlin. Le concerto de Martinu est une pièce symbolique de la période où Martinu (dont la veine de compositeur a succcessivement puisé dans la musique populaire de Moravie ou de Bohème,  chez Dvorak ou Debussy qu’il admirait tout particulièrement,  mais aussi chez les madrigalistes anglais)  s’intéresse au baroque et à la forme du concerto. Voulant composer une pièce marquant son retour au pays (nous sommes en 1938), l’histoire s’engouffre dans la composition puisque la Tchécoslovaquie disparaît (avec Munich) et c’est en Suisse en 1940 que l’oeuvre sera créée. Ainsi l’ambiance de l’écriture qui devait être positive et optimiste, devient plus sombre et même pathétique. Le premier mouvement est vif, dynamique, immédiat exige beaucoup des cordes, cela ressemble apr moments à du Chostakovitch, le largo est sans doute le meilleur moment de la partition, laisse entrer la mélancolie, la tristesse (le début est saisissant) et le piano est omniprésent, comme une sorte d’obsession. Le dernier mouvement retrouve la dynamique du premier, mais après le largo, c’est une certaine dissonnance qui domine, avec une fin complètement suspendue. Jansons arrive à dessiner ces différents moments, en marquant fortement la présence du piano (au centre du dispositif entre les deux orchestres), et soulignant la déconstruction qui domine le dernier mouvement. Une oeuvre à découvrir et à réécouter.

Dans Brahms, j’ai l’habitude d’écouter Abbado (comme dans Mahler d’ailleurs, d’où ma curiosité pour demain) que je trouve toujours “juste”. Abbado est un architecte inventif: si c’était un architecte (jouons au portrait chinois!), ce serait sans doute Borromini, avec ses formes légères, sa créativité, sa liberté de ton, ses acrobaties techniques et sa virtuosité. Si Jansons était architecte, ce serait Bernin, avec sa force, son sens aigu de la forme,  son regard grandiose sur le monde, mais aussi son humour et lui aussi sa virtuosité.

C’est ce grandiose qui frappe dans l’approche de Brahls par Jansons. Au début la lenteur surprend (elle m’avait même gênée il ya deux ans pour un Deutsches Requiem à Lucerne, un peu trop terrestre et appliqué pour mon goût). Il n’y a pas aujourd’hui d’application, il n’y a que de la construction géniale, qui fait ressortir les moindres détails, qui soigne d’une manière incroyablement précise les équilibres sonores, et les différentes strates de la partition. Il est servi par un orchestre (les bois font merveille!) complètement engagé dans l’aventure, au son chaleureux, rond (on déplore l’acoustique un peu sèche de la salle, en rêvant à celle, miraculeuse, du Concertgebouw d’Amsterdam), et large en même temps. Ce Brahms respire de grandes étendues, on est au seuil de Sibelius. Certes Brahms surprit, notamment dans le dernier mouvement, inspiré par des formes baroques de la passacaille ou de la chaconne, et très novateur dans sa variation finale. C’est ce que Schönberg admira notamment dans cette symphonie. Jansons imprime largeur des sonorités, étendue des tempi, avec une précision diabolique dans les détails, sans jamais faire jouer trop fort, dans un miracle d’équilibre et d’émotion (l’andante et le scherzo -allegro giocoso-  m’ont complètement bouleversé). Triomphe à la fin du concert et deux bis en cohérence, deux danses étourdissantes (la très fameuse Danse hongroise n°1 de Brahms, et la Danse slave n°7 de Dvorak) , qui ont fini de tournebouler le public (souvent jeune et très “cool” d’ailleurs, vive Londres!). J’attends avec d’autant plus d’impatience le concert de demain (en matinée, à 15h).

TEATRO ALLA SCALA 2009-2010: PLACIDO DOMINGO fête 40 ans à la SCALA (9 décembre 2009)

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La première fois de Placido Domingo à la Scala, ce fut le 7 décembre 1969, il y a quarante ans: lister les rôles qu’il y a interprétés serait long, soulignons qu’on l’a entendu dans des grands Verdi (Bal masqué, Ernani, Don Carlo, Trovatore, Aida) dans des Wagner (Parsifal, La Walkyrie), dans Carmen, dans Samson et Dalila etc…Il a participé à 13 premières. Le programme de salle ce soir retraçait cette relation privilégiée à ce théâtre, qui lui en est largement reconnaissant. Le public de la Scala a ses favoris, Placido Domingo en est un. A ma connaissance jamais contesté (comme Mirella Freni), au contraire de Luciano Pavarotti, qui lui n’était pas très aimé ici.

C’était donc la fête ce soir, la grande fête, tous les fans, tous le public des habitués, ceux qui venaient à la grande époque chaque soir au “Loggione”(la 2ème galerie, le poulailler) occuper les places vendues au dernier moment et qui ont espacé leurs visites, tous étaient revenus pour cette soirée de gala (Smoking de rigueur) qui fêtait le grand ténor. Atmosphère fébrile, grande joie des retrouvailles: la Scala (au moins au loggione) est une grande famille, on y retrouve amis, connaissances régulières ou perdues de vues, et c’était un grand rendez-vous du souvenir, de la nostalgie, et du présent, vu la prestation encore étonnante que nous avons entendue.
Le programme (Wagner, Prélude et mort d’Isolde, La Walkyrie, acte I, direction Daniel Barenboim, avec Placido Domingo, Nina Stemme, Kwanchoul Youn était prometteur. Le travail fait par Daniel Barenboim avec l’orchestre se lit clairement dans cette très belle interprétation du prélude et mort d’Isolde, les musiciens ont longuement ciselé la partition avec le chef, une certaine lenteur, pianissimis de rêve,équilibre des sons, tout y est. Dans la Walkyrie, l’orchestre est moins à l’aise, attaques décalées, sons déséquilibrés, cuivres trop forts, on sent qu’il n’ont pas encore approfondi cette partition qu’ils n’ont pas joués depuis un peu moins de quinze ans, on sent aussi qu’au milieu de la préparation de Carmen, il n’y a pas eu beaucoup de répétitions. Du coup c’est souvent un peu fort, pas toujours homogène ni lié, et la disposition des chanteurs, au devant de la scène de chaque côté du chef, ne permet pas vraiment aux voix de dominer l’orchestre. Il faut néanmoins le dire, c’était une soirée incroyablement émouvante, ce n’est pas le plus beau premier acte entendu avec Domingo (en mai dernier au MET, sur scène, il était plus en forme) Il reste que la performance est toujours mémorable. Certes, toute la première partie est plus retenue, il se ménage visiblement avant d’aborder les deux “Wälse”qui lancent vraiment le duo Siegmund-Sieglinde. Puis, malgré quelques menus problèmes notamment dans les notes de passages, la voix s’épanouit, et révèle encore un timbre ensoleillé, velouté, une puissance retrouvée, une présence et un engagement qui secouent, seul des trois chanteurs, il essaie d’interpréter, d’être Siegmund, ce qui est difficile quand Sieglinde chante à 3 m de là avec le chef entre les deux: voilà  une erreur; il fallait leur laisser un peu d’espace pour interpréter, il fallait les rapprocher. Mais Domingo essaie de suppléer, le finale est impressionnant (ah! ces Notung! ah! ce dernier vers “So blühe denn Wälsungenblut”, tiré, avec violence avec effort certes, mais avec les tripes, avec un sens inné de la musicalité, de l’élégance. Quel artiste!
Face à lui, on pouvait penser que Nina Stemme donnerait une réplique mémorable, mais acoustique ou disposition (et volume!) de l’orchestre, la voix n’est pas vraiment sortie, du moins pas au niveau de puissance et d’assise que nous lui connaissons (Tristan à Londres il ya deux mois), peut-être aussi n’est-elle pas une Sieglinde: en tous cas elle n’avait pas l’engagement de son incroyable partenaire, et elle pâlissait face à lui. Kwanchoul Youn, habitué du rôle de Hunding, a été solide, et très honnête, comme à son habitude, ce chanteur n’est pas toujours exceptionnel, mais il ne déçoit jamais (son Gurnemanz à Bayreuth est vraiment intéressant). A 21h25, explosion du public, debout, saluts à n’en plus finir, plusieurs fois Domingo revient seul, poussé par Barenboim qui l’étreint visiblement ému; à 21h50, nous étions encore dans la salle à hurler. Une grande émotion, de celles qu’on n’oublie pas, une soirée évidemment mémorable, une exécution qui l’est un peu moins, mais ce soir on pardonne tout, parce qu’on est éminemment heureux.

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Il faut aller à LUCERNE

kkl2.1259958180.JPGIl FAUT aller à Lucerne. C’est vraiment aujourd’hui en Europe le Festival le plus complet en matière musicale. J’en ai déjà parlé à propos des concerts de Claudio Abbado en 2009, raison de plus pour 2010 puisque Abbado dirigera le Lucerne Festival Orchestra dans Fidelio (Stemme/Kaufmann), les 12 et 15 août, et la 9ème de Mahler, tant attendue, les 20 et 21 août. Mais Abbado n’est pas la seule raison de rendre une visite à Lucerne, puisqu’on pourra y entendre le Concertgebouw, les Berliner Philharmoniker, le San Francisco Symphony Orchestra, le Cleveland Orchestra, le Gewandhaus de Leipzig et bien d’autres encore. L’orchestre des jeunes du Festival (la Lucerne Festival Academy) sera dirigé comme chaque année par Pierre Boulez qui anime l’académie et les deux artistes étoiles seront cette année Hélène Grimaud et Esa Pekka Salonen. Ce dernier proposera le 10 septembre (avec son orchestre le Philharmonia) le fameux Tristan und Isolde, mis en scène par Peter Sellars avec les vidéos de Bill Viola, que les parisiens purent voir à l’Opéra Bastille; cette production fut conçue pour l’auditorium Dysney de Los Angeles, elle devrait s’adapter à l’espace conçu par Jean Nouvel.

Lucerne est à 90 km de la frontière française à Bâle, et à trois heures de Genève environ. Le voyage vaut le coup, croyez-moi: la région est splendide et même en Suisse on peut trouver en s’y prenant assez tôt des logements pas trop chers, et les hôtels pullulent au bord du lac des Quatre Cantons. Lucerne a en outre un Musée des Transports très important, et une collection de peinture avec des pièces maîtresses du XXème siècle, la collection Rosengart et bien sûr Tribschen où Wagner résida. En plus, cerise sur le gâteau, le Palais des Congrès où se déroule le festival, est l’un des bâtiments les plus réussis de Jean Nouvel, un authentique chef d’oeuvre de l’architecture contemporaine.

Certes, on le sait, la Suisse reste un pays cher (un peu moins depuis l’Euro), et les billets du festival ne sont pas donnés (prix maximum autour de 200-220 Euros), mais en s’y prenant à temps, on peut aussi trouver de bonnes places Galerie IV autour de 30-35 Euros. Il n’est d’ailleurs pas trop difficile d’avoir des places même vers mai juin  (sauf évidemment pour les concerts les plus demandés). L’ambiance des soirées de concerts a beaucoup changé depuis 10 ans, le public qui était un peu froid il ya  quelques années est devenu très enthousiaste, notamment avec Abbado (là c’est carrément du délire), et aussi Dudamel ou Jansons. Et l’ambiance  générale du festival est plutôt bon enfant, et pas vraiment snob.

Pour connaître en détail le programme voici le lien:

http://www.lucernefestival.ch/en/festivals/lucerne_festival_summer_2010/

Mais le festival de Lucerne, c’est aussi en automne Lucerne Piano (du 23 au 29 novembre) et le festival de Pâques ( du 19 au 28 mars) avec cette année l’orchestre des jeunes du Vénézuéla et Abbado, Dudamel, et le jeune Diego Matheuz, mais aussi l’orchestre de la Radio Bavaroise (avec Haitink et Harding), le Concentus Musicus dirigé par Harnoncourt.

C’est (à peu près) seulement à Lucerne qu’on peut entendre le Lucerne Festival Orchestra(LFO), cet orchestre magique fondé par Abbado qui surprend à chaque fois par la perfection technique, l’engagement, la chaleur du son, la sympathie (orchestre rempli de jeunes, qui entretient avec le public un rapport affectif très fort). Dix jours (12 août-21 août) qui ouvrent chaque année le festival. Soyez sans illusion, cet orchestre n’est probablement pas près de visiter Paris, bien qu’il se soit déjà déplacé à Rome, Londres, Tokyo, New York, Pékin, et qu’il doive en septembre 2010 aller à Madrid. En fait rien que cet orchestre vaut le voyage à Lucerne. Les concerts Mahler-Abbado-LFO sont sans doute parmi les événements musicaux les plus marquants de cette décennie, absolument inoubliables (et incroyables), cette expérience vaut la peine d’être vécue, et comme dit Stendhal “c’est pour ces moments là qu’il vaut la peine de vivre” .
Certes, il y a d’autres Mecques musicales, Salzbourg par exemple, où l’on entend souvent quelques uns des  mêmes orchestres, mais à Lucerne, les orchestres sont chez eux, puisque le Festival a été fondé pour la musique symphonique par Arturo Toscanini en 1938, après l’Anschluss; et  de plus l’ambiance de Lucerne n’a rien, mais rien à voir avec celle, compassée de Salzbourg.

L’intendant Michael Haefliger (le fils de Ernst Haefliger) dirige ce festival en authentique manager culturel, c’est un musicien, un vrai mélomane, enthousiaste et discret, qui sait réunir d’incroyables plateaux pour notre bonheur, et qui investit toute son énergie pour faire construire dans les prochaines années (et ce n’est pas gagné) une salle modulable destinée au théâtre musical. C’est aussi cette modestie et cette compétence qui donnent une couleur toute particulière aux moments vécus à Lucerne.

Il y a très peu de visiteurs français, malgré le proche voisinage et la presse française ne rend pas régulièrement (c’est  regrettable) compte des soirées de Lucerne, même si les concerts d’Abbado et du LFO ont quelquefois été commentés dans Le Monde, par exemple, ou quelquefois Le Figaro. Les germanophones liront avec profit les critiques de Peter Hagmann dans la NZZ (Neue Zürcher Zeitung), le journal de langue allemande aux pages culturelles de référence.

Voilà mon conseil de mélomane, j’espère bien vous avoir convaincus qu’un détour par Lucerne s’impose, vous ne le regretterez pas, et comme moi, vous y reviendrez chaque année.sallelucerne.1259958196.jpg

Les programmes 2010 (actualisés au 18 août 2010) de Claudio ABBADO

Vous aimez, comme moi, Claudio Abbado.
Vous considérez, comme moi qu’il est le plus grand des chefs vivants aujourd’hui et que tout au long de sa carrière on lui doit (entre autres)

– d’avoir fait de Simon Boccanegra une des références de l’opéra verdien
– d’avoir imposé une Carmen sans récitatifs mais avec les dialogues
– d’avoir imposé Luigi Nono sur les scènes et dans les concerts
– d’avoir imposé la version originale de Boris Godounov
– d’avoir imposé des morceaux inconnus du Don Carlo de Verdi (notamment le fameux “lacrimosa” concluant la mort de Posa)
– d’avoir mis au répertoire des théâtres “Il viaggio a Reims” de Rossini
– d’avoir mis au répertoire des théâtres “Fierrabras” de Schubert
– d’avoir, dans Parsifal, fait interpréter les enfants et les jeunes chevaliers par des voix d’enfants et non de femmes
– d’avoir, toujours dans Parsifal, inséré des cloches asiatiques pour les deux “Verwandlungmusik” avec une profonde modification des effets
– d’avoir fondé l’Orchestre des Jeunes de la Communauté Européenne
– d’avoir fondé le Chamber Orchestra of Europe
– d’avoir fondé le Gustav Mahler Jugendorchester
– d’avoir fondé le Mahler Chamber Orchestra
– d’avoir refondé le Lucerne Festival Orchestra
– d’avoir fondé l’Orchestra Mozart
– d’être le plus grand interprète actuel de Gustav Mahler

– Et d’avoir toujours soutenu la puissance sociale de la musique, d’avoir toujours voulu travailler avec des jeunes, d’avoir su oser au nom d’une forte idée de la nécessité de la culture dans tous ses effets, d’être en ce sens un authentique visionnaire.
Il ya donc quelque raison de signaler son activité aux mélomanes français, qui auront l’occasion de le revoir à Paris le 11 juin prochain salle Pleyel, c’est pourquoi je vous signale les concerts officiels prévus pour l’instant, mais il y en aura d’autres:

MARS
LUCERNE, KKL
19 mars

Prokofiev: Suite Scythe
Berg: Lulu-Suite (Anna Prohaska)
Tchaikovsky: Symphonie n° 6
Orchestre des Jeunes Simon Bolivar

ROME, Auditorium Parco della Musica
26, 28 & 29 mars
Mendelssohn: Symphonie n°4, Italienne
Mozart: Concerto pour violon K 216
Mozart: Symphonie n°41, Jupiter
Orchestra Mozart

AVRIL
BOLOGNA, Teatro Manzoni

1er avril
Beethoven: Egmont, Ouverture
Schumann: Concerto pour violoncelle (Natalia Gutman)
Beethoven: Symphonie n°2
Orchestra Mozart

FERRARA,Teatro Comunale
11 avril
REGGIO EMILIA, Teatro Valli
13 avril

Rachmaninov: Rapsodie sur un thème de Paganini (Yuja Wang)
Rachmaninov: Concerto pour piano n°2 (Yuja Wang)
Beethoven: Symphonie n°8
Mahler Chamber Orchestra

MAI
BERLIN, Philharmonie
14,15 & 16 mai

Schubert: Trois Lieder
Schönberg: Gurrelieder (Extraits)
Brahms: Rinaldo, Cantate
Christianne Stotijn
Jonas Kaufmann
Berliner Philharmoniker

JUIN

Tous concerts annulés

AOÛT
LUCERNE, Lucerne Festival, KKL
12 & 15 août

Beethoven: Fidelio (version de concert)
20 & 21 août
Mahler: Symphonie n°9
Lucerne Festival Orchestra

SEPTEMBRE
BOLOGNA, Basilica Santo Stefano
18 septembre

BOLOGNA, Teatro Manzoni
19 septembre
PAVIA, Certosa di Pavia
21 septembre
JESI, Teatro Pergolesi
25 septembre

Bach: Airs de la Passion selon St. Matthieu (“Ich will dir mein Herze schenken” + “Erbarme dich, mein Gott”)
Air de la Passion selon St. Jean (“Es ist vollbracht”)
Pergolesi: Stabat Mater
Julia Kleiter
Sara Mingardo
Orchestra Mozart

OCTOBRE
MADRID, Auditorio Nacional 
17 & 18 octobre 2010

Lucerne Festival Orchestra
Mahler Symphonie n°9

PARIS, Salle Pleyel
20 octobre 2010

Lucerne Festival Orchestra
Mahler Symphonie n°9

NOVEMBRE
BOLOGNA, Teatro Manzoni
21 novembre
FERRARA, Teatro Comunale
23 novembre

SCHUMANN:
Ouverture de Geneviève
Concerto pour piano
Symphonie n°3, Rhénane
Radu Lupu
Orchestra Mozart

BOLOGNA, Teatro Manzoni
28 novembre

Beethoven: Symphonie n°5
Orchestra MozartCertains concerts ne sont pas encore ouverts à la réservation, préparez-vous!

La chute du Mur de Berlin…la musique comme “Passe Muraille”

S’il ya un domaine où la différence entre République Fédérale Allemande et République Démocratique Allemande (la DDR) n’est pas si profonde, c’est bien la musique classique et la scène musicale, et les observations faites au moment de la chute du mur, le rôle joué par la musique, les organisations d’un côté et de l’autre du mur montrent qu’au-delà des différences idéologiques, évidemment énormes, les différences du point de vue de l’organisation des théâtres à l’Est et à l’Ouest ne sont pas si importantes. En ces temps d’anniversaire, il m’apparaît intéressant de rappeler quelques faits.

La musique et le théâtre, la scène, sont des éléments importants de la formation “à l’Allemande”: depuis longtemps les universités forment en “Theaterwissenschaft” des étudiants qui deviennent ensuite critiques ou metteurs en scène, des académies préparent les acteurs, il y a de vrais cursus universitaires partout, et bien avant que le concept d'”études théâtrales” arrive dans l’université française. Il y a entre 250 et 300 théâtres en Allemagne, recensés dans le fameux “Deutsche Bühnen Jahrbuch”, le répertoire annuel des scènes allemandes,dont la plupart, dans une écrasante majorité, sont publiques, supportées essentiellement par les villes ou les Länder (le théâtre engloutit en général l’essentiel des budgets culturels des municipalités) et ces salles jouent des centaines de soirées par an, opéra, opérette, ballet, théâtre. Dans les villes petites ou moyennes, le théâtre municipal (Stadttheater) propose à la fois lyrique, ballet et théâtre. Dans les villes plus importantes, il y a un opéra, et un théâtre municipal, quelquefois, comme à Mannheim ou à Karlsruhe, deux salles dans le même bâtiment. Cela signifie que la proposition en matière d’opéra est beaucoup plus forte et ouverte qu’ailleurs en Europe, et que le marché des chanteurs y est très large. Cela veut dire aussi que si l’on ne peut s’attendre partout à des soirées mémorables, au moins, chaque allemand (et notamment chaque jeune) pour un prix raisonnable peut en n’importe quel point du territoire, avoir accès à l’essentiel des grands standards du répertoire à 30 km à la ronde (qui habite Mannheim, outre Mannheim, peut aller à Heidelberg (13km), Ludwigshafen (2km), Darmstadt (50 km), Francfort (80 km), Stuttgart (120 km), Pforzheim (80km), Karlsruhe (58km) ou même Baden Baden (90km) ou Strasbourg (130km). cela veut dire enfin que les troupes locales sont très enracinées, que les spectateurs sont très attachés à leurs acteurs, leurs chanteurs, leurs théâtres. Ce système du répertoire, très coûteux certes,  permet aux jeunes chefs, aux jeunes chanteurs, de travailler un répertoire large en ayant l’assurance d’un salaire mensuel (la plupart des artistes en troupe ont un statut qui s’approche de celui de fonctionnaire municipal). La même chose vaut pour les acteurs. Et ce système permet  au jeune public de se faire une vraie culture par le contact non avec le disque mais avec le spectacle vivant et ça, c’est irremplaçable. La tradition allemande est celle d’un théâtre public, vécu comme un service public, qui n’est pas un luxe, mais une nécessité sociale. La chute du mur a donné l’occasion de réfléchir sur ce système, beaucoup ont pensé qu’il ne tiendrait plus longtemps vu ses coûts, on discute toujours (notamment à Berlin!) de l’avenir des théâtres, mais pour l’instant, les choses tiennent encore, car toute fermeture de théâtre est vécue comme une blessure, à Berlin comme ailleurs en Allemagne.

Pourquoi préciser tous ces points, sinon pour dire qu’en DDR, oui dans l’ex-DDR et en République Fédérale, le système était à peu près le même, et que sur le plan du théâtre et de l’opéra, la réunification n’a rien changé à son fonctionnement, même si elle a changé les hommes, évidemment (mais pas toujours) et même si le théâtre à l’Est a beaucoup, mais beaucoup souffert dans les nouveaux Länder, de la réunification au départ. Je me souviens y avoir fait un voyage d’études en 1992, et tous les directeurs rencontrés disaient qu’il y avait une chute du public énorme, qui menaçait le maillage culturel de l’ex-DDR. En effet, il y avait un très grand nombre de salles, le public des salles sous le régime communiste était garanti par les usines environnantes qui achetaient des abonnements. Or, vers 1992, les entreprises fermaient les unes après les autres, provoquant chômage et désarroi, et bien sûr, plus d’abonnements de garantie pour les théâtres, d’autant que le public disait-on était plus intéressé par les feuilletons ou les émissions de la télévision que par les théâtres, qui rappelaient la période communiste: il a donc fallu revoir les politiques publiques, fermer des salles; mais, 20 ans après, les choses sont stabilisées. Un seul exemple: je me souviens à l’époque avoir visité le très charmant théâtre de Altenburg, en Thüringe. Il était dans une situation désespérée: je suis allé voir son site internet…je ne commente pas, je vous y renvoie, vous constaterez vous-mêmes ce qu’une petite structure de l’ex-Allemagne de l’Est peut produire aujourd’hui !(http://www.tpthueringen.de/frontend/index.php).
Parlons de Berlin: pour des raisons à la fois politiques et géographiques, c’est l’ex-DDR qui avait sur le territoire de l’ex-Berlin Est toutes les grandes scènes historiques de la ville, à commencer par la Staatsoper, le Deutsches Theater, et le Berliner Ensemble, mais aussi la Komische Oper (le théâtre de Felsenstein) et la Volskbühne am Rosa Luxemburgplatz. Car tout le quartier du centre (Mitte) se situait à Berlin Est. De facto dépositaire de la tradition historique théâtrale et lyrique, la DDR s’en est évidemment emparée pour redorer son blason et montrer qu’en matière d’identité culturelle allemande, elle n’avait pas de leçons à recevoir. D’ailleurs ses artistes (Theo Adam, Peter Schreier) essaimaient les scènes …de l’ouest et les enregistrements de l’époque pour les mêmes raisons, et ses orchestres (Gewandhaus de Leipzig et Staatskapelle de Dresde) continuaient d’être ce qu’ils sont encore, des orchestres de référence!  (Mais il ne fallait pas trop être révolutionnaire, bien des jeunes metteurs en scène (Frank Castorf) vont être sanctionnés par le régime)

Je me souviens d’une tournée triomphale du Staatsoper de Berlin Est, au théâtre des Champs Elysées, qui présenta une Walkyrie bien sage au demeurant mais magnifiquement chantée, avec Theo Adam dans Wotan, début avril 1973. La musique de Berlin Est était alors une vraie référence. Cette situation aboutit bien sûr au trop plein  berlinois d’aujourd’hui: trois opéras et trop d’orchestres et de grandes institutions théâtrales publiques coûtent très cher à Berlin aux finances chancelantes. Mais voilà, on ne ferme pas un théâtre si facilement à Berlin et en Allemagne, surtout là où chacun porte en lui une marque historique profonde. Ironie de l’histoire, la Staatsoper Unter den Linden ferme pour trois ans à la fin de la présente saison. Elle va s’installer à l’ouest, au Schiller Theater, à quelques centaines de mètres et dans la même avenue que son grand rival, la Deutsche Oper (l’opéra de l’ex Berlin Ouest). Pendant trois ans, l’Opéra à Berlin sera à Charlottenburg, et l’on passera d’un trottoir à l’autre pour goûter à l’un (Opéra de l’ex Berlin Est) ou à l’autre (Opéra de l’ex Berlin Ouest) , au style de programmation assez différent. Quant à la Komische Oper, marquée par la tradition à la fois de l’opéra populaire (tous les opéras sont donnés en allemand), et celle de la mise en scène (Felsenstein est passé par là), elle se spécialise de plus en plus dans des mise en scènes un peu particulières (Calixto Bieito par exemple), sous l’impulsion de Andreas Homoki, son directeur, qui part à Zürich dans deux ans. C’est l’avenir de cette salle (l’ex Est) qui pose le plus de problèmes.

Mais l’Est théâtral a depuis longtemps irrigué l’Ouest: bien des metteurs en scènes fameux des années passées sont des transfuges de l’Est, à commencer par Götz Friedrich,  décédé il y a quelques années, qui fut le premier metteur en scène “new look” de Bayreuth (avec son Tannhäuser), et qui ironie là aussi, fut longtemps directeur de la Deutsche Oper (de l’Ouest), Harry Kupfer, à qui l’on doit à Bayreuth un Ring et un mémorable Vaisseau Fantôme, à Berlin un autre Ring, fut lui aussi un hiérarque du théâtre à l’Est puisqu’il dirigea la Komische Oper à la fin des années 70:  il resta quant à lui à l’Est. Parlons aussi de Ruth Berghaus, dont les mises en scènes ensanglantèrent bien des opéras allemands ou autrichiens. Enfin, Frank Castorf, l’un des plus brillants metteurs en scène d’aujourd’hui, qui dirige la Volksbühne de Berlin a fait mettre au fronton du théâtre en lettres lumineuses “OST” (EST), revendiquant une identité culturelle marquée, et désireuse de s’identifier comme “Ossie” (venant de l’est, en langage populaire).
On le voit, la pénétration de l’Est dans le monde de l’Ouest a commencé bien avant la chute du mur, et cette chute au total a posé peut-être plus de problèmes aux artistes locaux, puisque Berlin a été l’objet de convoitises multiples!

Dernier point, si Barenboim dirige depuis bientôt vingt ans la Staatsoper de Berlin, ce n’est pas un hasard, l’artiste, très engagé par ailleurs, trouve sans doute symbolique d’être installé dans le théâtre historique de la capitale allemande, lui l’israélien d’origine argentine, qui défend la cause palestinienne et fonde un orchestre de jeunes qui justement transperce transcende ou ignore les Murs: l’ouverture et la disponibilité qui sont des caractères de cette ville vont bien à sa personnalité. Ce n’est pas un hasard non plus que l’année même de la chute du Mur, les Berliner Philhamoniker aient choisi à la surprise générale et de l’élu lui même Claudio Abbado pour mener leur révolution post Karajanesque! Ce n’est pas un hasard si Rostropovitch, ou Bernstein, se soient retrouvés au pied du Mur pour de mémorables concerts, ils ont porté les uns ou les autres le message social et politique de la musique. Et ce n’est pas non plus un hasard enfin, bien qu’on ne l’ait pas assez rappelé ces derniers jours que les premières grandes manifestations de Leipzig, qui allaient d’exporter à Berlin et provoquer la fin du régime, aient été portées par l’orchestre du Gewandhaus et de son chef Kurt Masur, qui a rencontré l’histoire à cette occasion!

Il y a bien des choses à rappeler sur les moments musicaux de cette période, sur les échanges Est/Ouest, sur le nouveau paysage musical et artistique des “nouveaux Länder” et de Berlin mais il n’y a pas eu rupture, il y a eu élargissement, remise en cause, changements de personnes, enjeux d’ambitions personnelles fortes, mais autour d’idéaux et de croyances qui étaient assez communes, et qui avaient déjà transcendé les murs et les frontières: la musique passe les murailles!

Gustavo Dudamel et l’orchestre national des jeunes du Venezuela Simon Bolivar à la Salle Pleyel (24 octobre 2009)

Il y a un phénomène Gustavo Dudamel: partout où il se produit, et quel que soit l’orchestre, il provoque un enthousiasme exceptionnel, voire délirant chez le public, mais aussi dans l’orchestre. Il ne s’agit pas vraiment de saluer une interprétation nouvelle, une voie inconnue dans laquelle ce jeune chef prodige nous entraînerait, il s’agit d’abord de prise incroyable sur les publics et les orchestres, de chaleur communicative, de sympathie innée, mais aussi de technicité hors pair au pupitre. C’est bien ce qui s’est passé hier 24 octobre à la Salle Pleyel, où le concert s’est terminé dans un délire comme la vénérable salle n’en connaît guère depuis quelques années, pour la première visite en France (il est temps! tous les pays d’Europe l’ont déjà reçu) de l’orchestre national des jeunes du Venezuela Simon Bolivar.

Au programme, le concerto pour violon de Tchaïkovski (soliste Renaud Capuçon) et la Alpensinfonie de Richard Strauss . Ce qui a frappé dans le concerto pour violon, c’est non l’interprétation acrobatique mais froide de Capuçon, qui joue la virtuosité technique plus que la sensibilité, mais la couleur de l’orchestre qui accompagnait, le regard très présent du chef sur le soliste, la finesse des attaques, l’épaisseur du son, le sens des rythmes. Je connais Dudamel depuis neuf ans, il a depuis ses débuts (sa première tournée européenne remonte à 2000, et je l’ai entendu à Hanovre pour la première fois lors d’EXPO 2000, il avait 19 ans) une incroyable technique de direction, c’est un chef authentique, qui sait rassurer un orchestre, qui domine parfaitement sa partition (il dirigeait hier sans) et qui a des gestes d’une précision et d’une lisibilité exceptionnels. Sans doute avoir dirigé un orchestre de jeunes pendant 10 ans lui a-t-il appris à être un pédagogue du pupitre avant d’être un chef, il accompagne l’orchestre et le conduit: un maestro et un vrai maître au sens de ces botteghe médiévales où les compagnons apprenaient auprès d’un maître. Mais il a en plus mûri ses approches, un peu superficielles me semblait-il y a quelques années, il mûrit vite: quelle différence entre son Mahler 2005 et son Mahler 2008! C’est cela qu’on sent dans ce Tchaïkovski tout sauf démonstratif, la poésie est là présente, non dans le violon, mais dans l’orchestre. Surprenant.

La Alpensinfonie de Strauss, sorte de Wanderung (randonnée) dans la montagne, du matin au soir, de la nuit à la nuit, surprend par sa fluidité et la maîtrise du son malgré l’incroyable nombre d’exécutants(l’orchestre se déplace toujours en grand nombre, ils sont plus ou moins 200 sur le plateau), l’option “scénique” de faire débuter et finir dans une semi pénombre montre aussi le souci du spectaculaire et une approche moins traditionnelle du concert classique, qui est au Venezuela un authentique phénomène de jeunes. On est frappé par la virtuosité technique des pupitres (les bois et les cuivres notamment) et la manière de suivre pas à pas les propositions du chef. On est aussi frappé par les contrastes, les pianissimi obtenus sont d’une finesse rare, et les fortissimi ne sont pas renforcés par le nombre des musiciens: ce qui domine, c’est la clarté de la construction, la lisibilité de l’approche, la volonté de souligner certaines couleurs, ici Mahler, là Wagner, de jouer le lyrisme très charnel, la violence de la nature et d’une nature qui reste domptée par la musique, une nature authentiquement culturelle. Il en résulte une ambiance qui s’impose au public qui suit dans un silence impressionnant avant d’exploser dès la dernière note.


Hier soir, Frédéric Mitterrand, Ministre de la culture, remettait en fin de concert la croix d’officier de la légion d’honneur à José Antonio Abreu, fondateur du Sistema des orchestres vénézuéliens, où plus de 300 orchestres de jeunes, 300000 jeunes sur 26 millions d’habitants (1%) sont engagés dans la pratique orchestrale, comme une alternative à la vie désœuvrée des bidonvilles et des cités pauvres, en une pyramide qui conduit au sommet à faire partie de cette phalange miraculeuse, qui est l’une des plus virtuoses au monde, et sans doute l’une des plus enthousiastes et engagées. Abreu reçoit désormais une pluie de prix, car son œuvre unique au monde replace la musique et l’art au centre du tissu social, et surtout, permet à un public neuf, sans préjugés, de s’emparer de la musique classique. Gustavo Dudamel me disait qu’au Venezuela, les concerts de musique classique sont remplis de jeunes, et de plus en plus de pays notamment en Amérique Latine, cherchent à reproduire le miracle vénézuélien. Gustavo Dudamel recevait ensuite, très ému, la croix de chevalier des Arts et Lettres, et le concert se termina, pour la joie du public où de nombreux drapeaux du Venezuela étaient agités et créaient une ambiance de folie à Pleyel, par trois bis, le Mambo du West Side Story de Bernstein, une danse très rythmée sans doute d’un compositeur sud américain, et la Marche de Radestsky en guise d’adieu. Un grand moment, une magnifique soirée, un public estomaqué et ravi. Merci les jeunes!


LUCERNE FESTIVAL 2009: A STAR IS BORN: le chef Andris Nelsons (31 Août 2009)

 

A STAR IS BORN

CONCERT Andris NELSONS
Lucerne : 31 août 2009

Programme:

Britten : 4 Interludes extraits de “Peter Grimes”

Berlioz :  Nuits d’été (mezzosoprano : Vesselina Kassarova)
Debussy : La Mer
Ravel : La Valse

Le Festival de Lucerne ne se limite pas aux concerts magiques du Lucerne Festival Orchestra, l’orchestre de la Lucerne Festival Academy dirigé par Pierre Boulez a donné des preuves passionnantes de son engagement, Mariss Jansons a emporté la salle dans un concert Haydn-Chostakovitch avec le Concertgebouw qui restera dans les mémoires, nous avons aussi entendu la rare 10ème de Mahler dans la reconstitution de Deryck Cooke par le Gewandhaus de Leipzig dirigé par Riccardo Chailly qui a également enthousiasmé. Lucerne est une authentique fête de la musique, si proche de l’Italie (250 km) et de la France (100 km à peine) !

Mais nous nous arrêterons sur le passage d’un seul soir du City of Birmingham Symphony Orchestra dirigé par son nouveau chef, le jeune Andris Nelsons.  Programme franco-anglais assez éclectique, qui a littéralement électrisé les auditeurs et fait découvrir  une star future de la baguette. Il ne faut manquer sous aucun prétexte les futures apparitions de ce chef de 30 ans, pur produit de l’école du Nord, élève de Mariss Jansons (il lui a pris cette manière de prendre la baguette de la main gauche et de diriger par la main droite). J’ai rarement vu d’un chef émaner une telle énergie que  ce sont ses mouvements et ses gestes  qui, croirait-on,  font naître la musique. Il sculpte dans les airs la partition avec une clarté telle qu’il obtient de l’orchestre une prestation littéralement étourdissante. On savait le CBSO un très bon orchestre depuis que Rattle l’avait hissé à un niveau international, on ne savait pas qu’il était un orchestre tout à fait exceptionnel, au son somptueux, à la technicité à toute épreuve : une véritable alchimie naît entre musiciens et chef qui emporte tout sur son passage. Pas un moment de relâchement dans un programme qui a déchaîné le public dès les interludes du Peter Grimes de Britten et surtout la remarquable prestation de Vesselina Kassarova dans les nuits d’Eté, la voix est claire, bien posée, très présente, l’interprétation est vibrante. Quant à l’énergie développée par la mer de Debussy, et la Valse étourdissante de Ravel, elle fait littéralement palpiter , puis exploser le public qui est littéralement possédé par le chef et son orchestre, et qui hurle son juste enthousiasme. « A star is born ». A suivre