WIENER STAATSOPER 2020-2021, NOUVELLE SAISON et NOUVELLE DIRECTION

Haus am Ring

Bogdan Roscic, (venu de Sony Classical) nouveau directeur de l’Opéra de Vienne où il succède à Dominique Meyer, commence son mandat avec une année à surprises motivées par l’épidémie de Covid-19. On ne sait en effet que sera le 6 septembre, jour de l’Ouverture, la situation en termes de circulation du virus, de distanciation sociale, de thérapies, même si les conditions en Autriche ont été moins dramatiques qu’ailleurs en Europe. Chargé de faire souffler un vent nouveau sur l’institution et la programmation, Bogdan Roscic propose effectivement beaucoup de changements, dans beaucoup de continuité aussi.
D’une certaine manière, l’évolution de la Staatsoper de Vienne est comparable – toutes proportions gardées- à celle du Grand Théâtre de Genève, avec les mêmes ingrédients, et une même volonté de changer de logiciel, même si sur le papier cela semble être une révolution. Méfions-nous quand même de la communication triomphaliste…
Des nouvelles productions qui renversent la vapeur, mais dont un certain nombre sont connues parce qu’elles viennent d’ailleurs. C’était attendu et c’était le motto de la nouvelle direction qui faisait fuiter habilement certains noms annonciateurs de crises cardiaques à Vienne, comme Frank Castorf.
Des « Wiederaufnahme » (reprises retravaillées) ou des « Musikalische einstudierungen » (retravail musical) avec des productions sorties du répertoire et qui y entrent de nouveau (Elektra de Kupfer par exemple), c’est en revanche un peu inattendu…
Et le répertoire, parce que dans cette maison on ne peut le changer du jour au lendemain, affiche des masse de granit historiques (Tosca…), et des productions nombreuses de Sven-Eric Bechtolf, c’est à dire une modernité qui-ne-fait-pas-peur  et souvent désolante.
Quelque chose change, c’est sûr, et une institution aussi installée dans l’histoire et la tradition doit le faire sans tout à fait heurter les habitudes…parce qu’à Vienne, les directeurs d’opéra ont souvent valsé, et pas au bal de l’Opéra.

Historiquement, il faut être clair. Vienne est une capitale musicale de premier plan, et la Staatsoper est le navire amiral de la musique à Vienne, c’est une institution énorme, où c’est la musique qui prime sur la scène, et cela a toujours été le cas. Les très grandes productions d’opéra, celles dont on se souvient, celles qu’on aimerait voir et revoir, ne viennent pas de Vienne. Il y a eu des productions qui ont marqué la « Haus am Ring », mais le temps d’une saison et d’un règne, pas sur toute une vie. Même le fameux Rosenkavalier de Otto Schenk, une référence, est plutôt meilleur dans sa version munichoise un peu postérieure. Mais on se souvient de la présence de Karajan, de Bernstein, de Kleiber, d’Abbado, de Muti, de Prêtre, d’Ozawa au pupitre, et plus récemment de Thielemann ou de Rattle. C’est là la force de cette maison, et de cet orchestre qui est le terreau du Philharmonique de Vienne, c’est ce qui fait et qui fera la gloire de Vienne, pas les productions (pas même celles des metteurs en scène que j’aime si dans la fosse il y a un quidam…).
Si l’on veut voir à Vienne des curiosités, ce sont des productions historiques, encore au répertoire, Il Barbiere di Siviglia (Gunther Rennert, depuis 1966, première dirigée par Karl Böhm avec Fritz Wunderlich), Tosca (Margarethe Wallmann depuis 1958, première dirigée par Herbert von Karajan avec Renata Tebaldi en Tosca !), La Bohème de Franco Zeffirelli depuis 1963, copie exacte de celle de la Scala, première dirigée par Herbert von Karajan avec Gianni Raimondi et Mirella Freni (tout comme à la Scala), ou la Salomé de Boleslaw Barlog de 1972, première dirigée par Karl Böhm) et cela ne dérange pas. Pour Bohème et Tosca, on se demande bien ce qu’une nouvelle production pourrait apporter, tant les nouvelles productions de Bohème et Tosca çà et là sont sans intérêt.
Plus important que les productions fétiches citées, ce qui est important à Vienne, c’est le répertoire, c’est la présence de nombreuses reprises qui font que le touriste de passage ou le viennois qui a envie d’entendre un opéra, le puisse pratiquement chaque soir, la plupart du temps (mais pas toujours) dans des conditions plutôt honnêtes et quelquefois pour des soirées musicalement exceptionnelles. Les tentatives de revenir sur le système de répertoire se sont toujours heurtées à l’hostilité du public et de la presse et ont conduit à l’interruption de plusieurs mandats par le passé.

Que cette maison soit celle qui, plus que toute autre en Europe, illustre une certaine histoire de l’opéra, son archive en ligne le montre, qui depuis 1869 retrace beaucoup de soirées avec leur distribution, et depuis 1955 toutes les soirées sans exception, une promenade dans les rêves, les mythes, qui enchante l’amateur d’opéra. Tapez Lilly Lehmann et vous aurez toutes les représentations où elle chanta à Vienne…
Voilà qui fascine ici.

Pour une maison à l’activité aussi énorme, il faut lister les titres pour se faire une idée globale, voici donc les nouvelles productions que nous reverrons point par point pour l’essentiel.

Nouvelles productions (10 et 2 opéras pour enfants):

  • 2020
  • Madama Butterfly (Septembre)
  • Die Entführung aus dem Serail (Octobre)
  • Eugène Onéguine (Octobre)
  • Die Entführung in Zauberreich (Octobre, opéra pour enfants)
  • Das verratene Meer (Décembre)
  • 2021
  • Der Barbier für Kinder (Janvier) adaptation pour enfants de Il barbiere di Siviglia de Rossini
  • Carmen (Février)
  • La Traviata (Mars)
  • Parsifal (Avril)
  • Faust (Avril)
  • L’incoronazione di Poppea (Mai)
  • Macbeth (Juin)

En italique, les productions créées ailleurs.
Hors opéras pour enfants, sur 10 nouvelles productions, seules deux (Parsifal, et Das verratene Meer) sont d’authentiques nouvelles productions…l’imagination ne semble pas vraiment au pouvoir…

Wiederaufnahmen (3 reprises retravaillées) :

  • Elektra
  • Don Carlos (Fr.)
  • Le nozze di Figaro

Musikalische Wiedereinstudierung (1 production retravaillée musicalement)

  • Der Rosenkavalier

Répertoire (26 titres):

  • Simon Boccanegra
  • L’elisir d’amore
  • La Fille du régiment
  • Salomé
  • Don Pasquale
  • Cavalleria/Pagliacci
  • A Midsummer night’s dream
  • Roméo et Juliette
  • Ariadne auf Naxos
  • Arabella
  • Werther
  • La Bohème
  • Tosca
  • Hänsel und Gretel
  • Die Fledermaus
  • Rusalka
  • Nabucco
  • La Cenerentola
  • Don Pasquale
  • Manon
  • Rigoletto
  • Turandot
  • Die Walküre
  • Die Zauberflöte
  • Les contes d’Hoffmann
  • Lohengrin

 

Vienne a eu jusque-là un plus grand nombre de productions de répertoire, à partir de la saison 2020/2021, la Staatsoper sera à peu près dans la bonne moyenne haute des autres théâtres de l’ère germanophone.

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Nouvelles productions

 

Septembre 2020/Janvier 2021/Mars/Avril
Puccini, Madama Butterfly (12 repr.), MeS : Anthony Minghella Dir : Philippe Jordan (sept-janv)/Ramón Tebar (16 janv)/Joana Mallwitz (Mars-Avril) avec :
-sept. : Asmik Grigorian, Freddie De Tommaso, Boris Pinkhasovich
-janvier : Asmik Grigorian, Marcelo Puente, Boris Pinkhasovich
-mars-avril : Hui he, Roberto Alagna, Boris Pinkhasovich
Quelle drôle d’idée ! Non pas d’ouvrir avec Butterfly, mais avec cette production-là. On concède que la production Josef Gielen (Près de 400 représentations depuis la création en 1957 sous la direction de Dimitri Mitropoulos avec Sena Jurinak…) avait vécu depuis longtemps, sans avoir la qualité de la Tosca de Wallmann. Il était temps de la remiser.
Mais au lieu d’ouvrir sur une production maison, ce à quoi on pouvait s’attendre avec une nouvelle équipe de direction, on présente une production née en 2005, dont le metteur en scène est mort il y a douze ans (Anthony Minghella), passée successivement par l’ENO (où elle a été créée), puis le MET, avant d’atterrir à Vienne. Drôle de manière d’annoncer des nouveautés.
Les nouveautés elles sont dans la distribution, avec Asmik Grigorian dans Butterfly, et les deux ténors en alternance qui sont parmi les voix nouvelles intéressantes, Freddie De Tommaso et Marcelo Puente. Dans les reprises de l’année, on retrouvera du plus traditionnel (mais pas moins bon) avec Hui hé et Roberto Alagna, mais sans Jordan puisque c’est la jeune et talentueuse Joana Mallwitz (34 ans) qui dirigera en mars et avril… Un début en mode mineur et c’est dommage. 

Octobre 2020/Juin 2021
W.A.Mozart, Die Entführung aus dem Serail (8 repr.), MeS : Hans Neuenfels, Dir : Antonello Manacorda avec:
– oct: Lisette Oropesa, Regula Mühlemann, Daniel Behle, Michael Laurenz, Goran Juric
– juin : Brenda Rae, Regula Mühlemann, Daniel Behle, Michael Laurenz, Goran Juric
Jolie distribution dominée par Lisette Oropesa, une magnifique Konstanze. Je pense cependant que pour une œuvre aussi inscrite dans le répertoire et dans les gênes de la ville de Vienne où elle a été créée (au Burgtheater), le choix du chef Antonello Manacorda, assez irrégulier, peut surprendre, mais qui sait…
Quant à Neuenfels, qui signe la production, c’est sa deuxième apparition après une production du Prophète pendant la saison 1997-1998. On aurait pu tout aussi bien la reprendre d’ailleurs, puisque Manacorda a dirigé Meyerbeer à Francfort…Au lieu de cela on va chercher une production de Mayence de 1999, qui a même eu les honneurs d’une retransmission télévisée.
Il est vrai en revanche qu’une nouvelle production de Die Entführung aus dem Serail s’imposait vu la désastreuse production précédente (signée  Karin Beier et dirigée par Philippe Jordan, avec Diana Damrau) qui n’a duré que 10 représentations en 2006 (pour un ouvrage du répertoire aussi important, c’est un vrai trou noir).
Il est enfin dommage que la production des Herrmann (1989) créée par Harnoncourt n’ait probablement pas été conservée, parce qu’elle aurait été une reprise intéressante.
Là encore, risquer une nouvelle production maison pour un ouvrage aussi essentiel dans le répertoire de Vienne, n’aurait pas été un contresens.

Octobre-Novembre 2020
P.I.Tchaïkovsky, Eugène Onéguine
(5 repr.), MeS : Dmitry Tcherniakov, Dir : Tomáš Hanus avec Tamuna Gochashvili, Anna Goryachova, Andrè Schuen, Bogdan Volkov, Dmitry Ivashchenko
Dans ce Musée de la production moderne, il fallait évidemment une salle Tcherniakov. Le choix est tombé sur une de ses productions premières montrées en Europe occidentale (Barenboim l’avait déjà invité à Berlin pour Boris et Nagano à Munich pour Khovantchina, Eugène Onéguine, créée au Bolchoï et montrée ensuite à Paris (en 2008…) avec les forces du Bolchoï, dont il existe un DVD. Les viennois verront donc du jeune Tcherniakov, en souhaitant qu’il retravaille sa production. Solide distribution : on est heureux de voir l’excellent Bogdan Volkov dans Lenski.
Surprise du chef : Tomáš Hanus qu’on connaît sur un autre répertoire sera au pupitre. C’est plutôt un bon chef, on attendra donc avec confiance.

Décembre 2020
Hans Werner Henze, Das verratene Meer (4 repr.) MeS: Jossi Wieler & Sergio Morabito, Dir: Simone Young avec Vera Lotte Böcker, Bo Skovhus, Josh Lovell
Création à Vienne de cet opéra rarement proposé, créé à la Deutsche Oper de Berlin en 1990, sur un livret de Hans Ulrich Treichel d’après Le marin rejeté par la mer, de Mishima (1963).
C’est la première production maison de la saison, confiée à Jossi Wieler & Sergio Morabito, une garantie dans le monde de la mise en scène d‘aujourd’hui avec Bo Skovhus toujours impressionnant en scène et la jeune Vera Lotte Böcker qu’on a récemment découverte à la Komische Oper de Berlin dans Frühlingsstürme où elle était vraiment excellente. Dans la fosse, la très solide Simone Young.

Février-mars/mai-juin 2021
Georges Bizet, Carmen (11 repr.) MeS : Calixto Bieito, Dir : Andrés Orozco-Estrada (Février-mars-mai-juin)Alexander Soddy (9 juin) avec
– Février-mars : Anita Rashvelishvili, Charles Castronovo, Erwin Schrott, Olga Kulchynska
– Mai-juin : Michèle Losier, Dmytro Popov, Sergei Kaydalov, Vera-Lotte Böcker
Ne rions pas, après avoir fait le tour du monde de l’opéra depuis plus de 20 ans, la Carmen de Calixto Bieito, qui est même passée par Paris, arrive à Vienne pour remplacer la vieille production de Franco Zeffirelli ; j’y avais vu en son temps Baltsa, Carreras et Ramey, dirigés par Claudio Abbado (en 1990) (Soupir…), ce sera cette année Castronovo et Rashvelishvili, ce qui est bien, et Erwin Schrott, ce qui est moins bien, mais le rôle d’Escamillo-Matamore lui va bien…Au pupitre Andrés Orozco-Estrada, l’actuel directeur musical du Symphonique de Vienne, autrichien d‘origine colombienne, ce qui ne devrait pas être mal.
Enfin gageons que Bieito ne fera même plus peur au public de Vienne, c’est dire…

Mars 2021
Giuseppe Verdi, La Traviata,
(5 repr.) MeS : Simon Stone, Dir : Giacomo Sagripanti avec Pretty Yende, Frédéric Antoun, Igor Golovatenko
Tiens, une mise en scène récent mais bien entendue née ailleurs, la Traviata parisienne signée Simon Stone arrive à Vienne avec ici aussi Pretty Yende dans le rôle-titre et l’excellent Frédéric Antoun en Alfredo. Igor Golovatenko est Germont. Giacomo Sagripanti est pour la première fois dans la fosse viennoise, un chef correct, mais pour une  nouvelle Traviata à Vienne, d’autres chefs ne convenaient-ils pas mieux ?
La production de Simon Stone succède à celle de Jean-François Sivadier, vue aussi à Aix, qui n’était pas si médiocre et qui en valait bien d’autres, d’autant que la production de Simon Stone ne vaut pas cet excès d’honneur, ce n’est pas l’une de ses meilleures créations. Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ? Oui sans doute si on veut montrer à tous prix que la dernière actualité de la scène moderne arrive à Vienne. Inutile.
Voir: http://wanderersite.com/2019/09/le-bucher-des-vanites/

Avril 2021
Richard Wagner, Parsifal (4 repr.) MeS Kirill Serebrennikov, Dir: Philippe Jordan avec Jonas Kaufmann, Elina Garanča, Wolfgang Koch, Georg Zeppenfeld, Ludovic Tézier
Deuxième authentique production maison qui remplace la très récente production d’Alvis Hermanis (12 représentations depuis 2017) d’une œuvre qui il faut bien le dire, était l’objet chaque année de distributions très solides et souvent de chefs remarquables. Quelle raison peut justifier le retrait au bout de si peu de temps? Peut-être sa qualité discutable, peut-être les déclarations d’Hermanis, politiquement très peu correctes, qui ont singulièrement freiné sa carrière ces dernières années. mais ce sont des conjectures. (Et un grand merci au lecteur qui m’a rappelé que la production Mielitz, médiocre, avait été retirée en 2017).
Parsifal est donc un symbole, et c’est Philippe Jordan qui en assurera la direction. Il ne pouvait en être autrement à partir du moment où il y a un directeur musical dans la maison.
C’est Kirill Serebrennikov qui en assurera la mise en scène, mais sa situation en Russie impose la présence d’un dramaturge qui est Sergio Morabito. D’autres théâtres ont fait ainsi travailler Serebrennikov par personne interposée, et le message pacifique de Parsifal convient à la situation difficile à laquelle il doit faire face.
Une distribution hors normes, pour quatre représentations seulement où ce sera la ruée, avec deux prises de rôle, Ludovic Tézier, en Amfortas, deviendra-t-il le lointain successeur d’Ernest Blanc ? Et Elina Garanča aborde Kundry face au Parsifal de Jonas Kaufmann, au Gurnemanz de Georg Zeppenfeld, et au Klingsor de Wolfgang Koch, remarquables tous, voire exceptionnels mais moins nouveaux dans ces rôles.
Une distribution de feu. C’est la production à ne rater sous aucun, mais aucun prétexte.

Mai 2021
Charles Gounod, Faust
(4 repr.) MeS: Frank Castorf Dir: Bertrand de Billy avec Juan Diego Flórez, Adam Palka, Nicole Car, Boris Prygl
Castorf à l’opéra de Vienne !! je présume que des défibrillateurs supplémentaires seront installés dans la salle pour soigner les crises cardiaques.
Pour faire au mieux, on devrait souhaiter que le Burgtheater accueille le Faust de Goethe du même Castorf, pour établir un discours cohérent entre ces deux Häuser am Ring…
La production est connue, elle vient de Stuttgart et Wanderersite en a rendu compte, c’est évidemment une production d’une prodigieuse intelligence, qui travaille sur le mythe de Faust dans un contexte français et parisien (stupéfiant décor de Alexander Denić) .
C’est Bertrand de Billy qui dirige, on espère qu’il connaît la production et c’est Juan Diego Flórez et Nicole Car qui chantent Faust et Marguerite, ce qui nous garantit un chant impeccable. Bien heureusement, c’est le seul survivant de Stuttgart, Adam Palka, qui reprend Mephisto, où il avait été totalement bluffant. Wanderer y sera, peut-il en être autrement ?
Voir: http://wanderersite.com/2016/11/f-comme-faust-f-comme-france/

Mai-juin 2021
Claudio
Monteverdi, L’incoronazione di Poppea (5 repr.) MeS : Jan Lauwers, Dir: Pablo Heras Casado avec Kate Lindsey, Slávka Zámečniková, Xavier Sabata, Christina Bock, Willard White, Vera-Lotte Böcker.
Autre production importée, cette fois de Salzbourg où elle a été présentée en 2018 avec William Christie en fosse. On y retrouve Kate Lindsey entourée du remarquable Xavier Sabata, de Willard White  notamment. La production fortement marquée par le corps, qui souligne où illustre les sentiments et attitudes des personnages avait été assez bien accueillie à Salzbourg, même si certains l’avaient vertement critiquée. Dans la fosse, Pablo Heras Casado  aborde un répertoire où on l’entend très peu, mais la direction de Willima Chrisite avait été critiquée à Salzbourg. Raison de plus pour faire le voyage.

Juin 2021
Giuseppe Verdi, Macbeth,
(6 repr.), MeS Barrie Kosky, Dir: Philippe Jordan avec Luca Salsi, Roberto Tagliavini, Martina Serafin, Freddie De Tommaso
Si la distribution est loin de me convaincre pour les deux protagonistes, car Macbeth exige bien plus que deux grandes voix, et Luca Salsi n’a pas vraiment la subtilité exigée pour un rôle où se sont illustrés un Bruson ou un Cappuccilli. Un Tézier aurait été bienvenu. Quant à Serafin, dans le répertoire italien…(soupir…). Reste Tagliavini, excellent, et Freddie De Tommaso, la voix de ténor émergente qu’on va voir partout. La manière de distribuer le répertoire italien lourd (comme le Macbeth de Verdi) me laisse quand même quelquefois rêveur hors d’Italie, notamment pour ce genre d’œuvre.
Jordan dans la fosse, cela montre aussi l’importance accordée à cette dernière production de la saison…
Car et c’est là le point fort, ce Macbeth venu de Zurich est simplement la plus belle mise en scène de Macbeth de Verdi qu’on ait vu depuis Strehler. Barrie Kosky fait un Macbeth noir, avec un espace de jeu de quatre m2, éclairé, un drame à deux où les deux protagonistes se meuvent et s’étouffent. Un des plus beaux spectacles de ces dernières années, à voir absolument si on l’a raté à Zurich, où le rapport scène salle était idéal.
Voir: http://wanderersite.com/2018/10/les-corbeaux-volent-la-ou-est-la-charogne/

 

Wiederaufnahmen (Reprises retravaillées)

 

Septembre 2020/Juin 2021
Richard Strauss, Elektra (7 repr.), MeS: Harry Kupfer, Dir: Franz Welser-Möst /Alexander Soddy (19 & 22 sept) avec
Septembre: Ricarda Merbeth, Doris Soffel, Camilla Nylund, Derek Welton
Juin: Ausrine Stundyte, Michaela Schuster, Camilla Nylund, Derek Welton

On est évidemment curieux d’entendre Ausrine Stundyte (on connaît l’Elektra de Merbeth)qui devrait mieux lui convenir que Salomé – du moins pour mon goût. Belle distribution, avec Nylund et Doris Soffel, et l’Orest de Derek Welton ne devrait pas décevoir non plus.
Franz Welser-Möst pour son grand retour à Vienne dans une de ses œuvres fétiches, mais surtout le retour (après l’intermède raté Uwe-Eric Laufenberg) de la très belle production de Harry Kupfer, violente et glaciale, créée par Claudio Abbado en 1989, une des rares productions de Kupfer au répertoire de Vienne. Comme le grand metteur en scène vient de disparaître, ce sera aussi un hommage. Par chance, la production n’a pas été détruite. Une excellente initiative.

 

Septembre-Octobre 2020
Giuseppe Verdi, Don Carlos (version originale)
(5 repr), MeS: Peter Konwitschny Dir: Bertrand de Billy avec Jonas Kaufmann, Ildar Abdrazakov, Igor Golovatenko, Eve-Maud Hubeaux, Malin Byström, Roberto Scandiuzzi
Autre belle initiative, la reprise de ce Don Carlos spectaculaire, qui se déroule sur scène, en salle, dans les corridors, avec son ballet délirant et si juste « le rêve petit bourgeois d’Eboli » . D’une part, la production Peter Konwitschny est cohérente et sans concessions, d’autre part elle rend justice au grand opéra spectaculaire. En fosse, Bertrand de Billy et une distribution rompue à cette œuvre (à part Golovatenko…on rêverait là aussi Tézier) où il y a certes  Kaufmann (magnifique dans Carlos) et Byström, mais on remarque en Eboli celle qui à Lyon nous avait tant plu, Eve-Maud Hubeaux, qui entre à Vienne « alla grande », avec le Grand Inquisiteur de Lyon, Roberto Scandiuzzi et le Philippe II de Ildar Abdrazakov, qui le chantait à Paris.

Janvier-Février 2021
W.A. Mozart: Le nozze di Figaro
(5 repr.) MeS: Jean-Pierre Ponnelle (reprise par Grischa Asagaroff) Dir: Philippe Jordan avec Andrè Schuen, Federica Lombardi, Louise Alder, Philippe Sly, Virginie Verrez
On devrait conserver les productions Ponnelle qui circulent encore précieusement, tant elles ne vieillissent pas, avec leurs images magnifiques et leur élégance intrinsèque. Certes, aujourd’hui, la mode est à la trilogie Da Ponte confiée à un seul metteur en scène mais je ne suis pas si sûr que ce soit une idée géniale de notre théâtre contemporain. Il fait donc accueillir ce retour de Ponnelle à Vienne avec une joie sans mélange. Philippe Jordan dans la fosse retrouvera Mozart dans la ville où le compositeur vécut, et où il créa Le nozze di Figaro. Distribution qui ne me convainc pas où l’on entendra cependant avec plaisir l’Almaviva Andrè Schuen, originaire du Sud Tyrol (italien) mais d’origine ni germanophone ni italophone, mais ladine (la langue des Grisons, troisième langue du Sud-Tyrol) que les spectateurs d’Angers ont déjà entendu.

 

 

Musikalische Neueinstudierung (reprise musicale)

 

Décembre 2020/juin 2021
Richard Strauss, Der Rosenkavalier
( 7 repr.) MeS: Otto Schenk. Dir: Philippe Jordan avec

  • Décembre : Krassimira Stoyanova, Günther Groissböck, Daniela Sindram, Jochen Schmechenbecker, Erin Morley, Piotr Beczala
  • Juin : Martina Serafin, Albert Pesendörfer, Adrian Eröd, Jennifer Holloway, Louise Alder, Freddie De Tommaso.

Voilà une œuvre fétiche de l’opéra de Vienne, voilà une mise en scène historique de la maison (Otto Schenk, 1968, antérieure à sa production munichoise et un peu moins de 400 représentations) créée en fosse par Leonard Bernstein, voilà aussi la dernière production d’opéra dirigée par Carlos Kleiber… un monument en somme.
Le directeur musical ne peut faire autrement que la diriger, d’autant que Philippe Jordan est un bon straussien et qu’il n’e l’a dirigée que deux fois à Paris, une fois sous Mortier, et une fois sous Lissner.
Il est légitime qu’il retravaille la lecture avec l’orchestre et qu’il « créée des habitudes » dans une œuvre rebattue pour l’orchestre de la Staatsoper et reprise presque chaque année au répertoire.
En décembre, il dirigera un cast excellent  (Krassimira Stoyanova, Günther Groissböck, Daniela Sindram, Jochen Schmechenbecker) avec le chanteur italien de Piotr Beczala, un peu moins excitant en juin (Martina Serafin, Albert Pesendörfer, Adrian Eröd, Jennifer Holloway, Louise Alder, Freddie De Tommaso).
Il n’importe, Rosenkavalier à Vienne c’est un « Hausoper », un opéra qui est chez lui. Il s’agit donc d’un enjeu fort pour le directeur musical.

 

 

Chefs engagés :

Philippe Jordan, Directeur musical : Parsifal, Der Rosenkavalier, Madame Butterfly, Le nozze di Figaro, Macbeth

Bertrand de Billy : Don Carlos, Faust, Tosca, Werther, Ariadne auf Naxos
Giacomo Sagripanti : La Traviata, L’Elisir d’amore, La Fille du régiment
Pablo Heras Casado: L’incoronazione di Poppea
Antonello Manacorda : Die Entführung auf dem Serail
Franz Welser-Möst : Elektra
Alexander Soddy : Elektra, Carmen, Salomé
Ramón Tebar: Madama Butterfly
Joana Mallwitz: Madame Butterfly
Simone Young: Das verratene Meer, A Midsummer Night’s Dream
Sebastian Weigle: Arabella
Christian Thielemann: Ariadne auf Naxos
Andrés Orozco-Estrada: Carmen
Marco Armiliato: Cavalleria Rusticana – I Pagliacci, Don Pasquale
Cornelius Meister: Die Fledermaus, Hänsel und Gretel, Lohengrin
Adam Fischer: Die Walküre, Die Zauberflöte
Tomáš Hanus: Eugène Onéguine, Rusalka
Stefano Montanari: Il barbiere di Siviglia
Eun Sun Kim: La Bohème
Gianluca Capuano: La Cenerentola
Axel Kober, Les contes d’Hoffmann
Evelino Pidò: Manon, Roméo et Juliette, Simon Boccanegra
Paolo Carignani: Nabucco, Rigoletto
Pier Giorgio Morandi: Tosca
Giampaolo Bisanti: Turandot

On le voit, parmi les chefs engagés, on remarque quelques chefs de premier plan, comme Christian Thielemann et le retour de deux chefs qui avaient rompu de manière spectaculaire avec Dominique Meyer, Franz Welser-Möst l’ex-GMD de l’Opéra de Vienne et Bertrand de Billy, ce dernier très sollicité, dirigeant trois opéras français, Ariadne auf Naxos une longue série de Tosca, l’une des reprises importantes de l’année, comme on va le voir.

Pour le reste, on remarque quelques noms intéressants comme Gianluca Capuano (La Cenerentola), Cornelius Meister (qui dirige trois productions dont un Lohengrin de fin de saison, Andrés Orozco-Estrada, qui succède à Philippe Jordan à la tête du Wiener Symphoniker (c’est une courtoisie normale que d’inviter le voisin) Sebastian Weigle à qui est confié Arabella. Stefano Montanari, nouveau venu à Vienne pour il Barbiere di Siviglia, nouveau également Giacomo Sagripanti, invité tout septembre pour diriger L’Elisir d’amore et La Fille du régiment .
Dans le regard sur le répertoire, nous avons relevé une sélection de titres qui pourraient être intéressants.

Novembre 2020/Mars 2021
Richard Strauss, Ariadne auf Naxos
(7 repr.) MeS Sven-Eric Bechtolf, Dir : Christian Thielemann (Novembre), Bertrand de Billy (Mars) avec
– Novembre : Camilla Nylund, Jennifer Holloway, Stephen Gould, Erin Morley
– Mars : Lise Davidsen, Angela Brower, Brandon Jovanovich, Erin Morley
Christian Thielemann, adoré à Vienne, revient pour Strauss, un de ses compositeurs de prédilection pour une petite série d’Ariadne auf Naxos en novembre. En mars, ce sera Bertrand de Billy, décidément très sollicité dans cette saison.
Les deux distributions, très différentes, sont vraiment d’un (très bon) niveau comparable, avec dans l’une la très belle primadonna de Camilla Nylund, et en mars la présence de Lise Davidsen, entendue dans ce rôle à Aix. Mise en scène de Sven Eric Bechtolf, rien à dire.

Décembre 2020/Janv-Fév 2021/Mai 2021
Giacomo Puccini, Tosca
(12 repr.) MeS: Margarethe Wallmann, Dir: Bertrand de Billy (déc.)Pier Giorgio Morandi (Janv-fév-mai)
Qu’il soit entendu que Tosca à Vienne doit être vu une fois par tout visiteur, c’est une production muséale (1958) et Dominique Meyer avait pris soin de faire restaurer les productions les plus anciennes. Qu’il soit aussi entendu qu’avec 12 représentations, c’est une production alimentaire, avec un prix d’appel, la présence d’Anna Netrebko pour les trois premières (au-delà ce serait hasardeux) avec Monsieur…Dès la quatrième, c’est au tour de l’excellente Saioa Hernandez, qui ne chantera cette saison qu’une représentation.
Décembre : Anna Netrebko/Saioa Hernandez, Yusif Eyvazof, Wolfgang Koch
Janv-Février : Sonya Yoncheva, Roberto Alagna, Alexey Markov
Mai : Anja Harteros, Massimo Giordano, Luca Salsi
On a là une palette de possibilités selon les goûts, avec quatre Tosca qui sont des grands noms (Netrebko, Harteros), des petits noms (Yoncheva) un véritable espoir (Hernandez), palette de ténors aussi desquels on retiendra Alagna évidemment, et Giordano en l’espérant plus en forme qu’à Lyon, et trois Scarpia de choix, Koch pour l’intelligence, Markov pour l’élégance, Salsi pour la grosse voix, mais pour rien d’autre tant il n’a pas le profil pour le personnage. Bref, en douze représentations, une sorte de voyage dans les possibles pour Tosca.

Décembre 2020
Jules Massenet, Werther
, (4 repr.) MeS : Andrei Serban, Dir : Bertrand de Billy avec Piotr Beczala, Gaelle Arquez, Daniela Fally, Clemens Unterreiner.
Andrei Serban fut dans les années 1990 un exemple de metteur en scène ébouriffé. Il s’est coiffé depuis et représente une sage modernité aux yeux du très conservateur Opéra de Vienne. D’où plusieurs productions de répertoire, jouées assez souvent, comme ce Werther qui remonte à 2005 et repris plusieurs dizaines de fois depuis. Intérêt de cette reprise, la présence de Bertrand de Billy en fosse, mais surtout de Piotr Beczala, un Werther exemplaire et Gaelle Arquez en Charlotte.

Janvier 2021
Antonín Dvořák, Rusalka
(4 repr.) MeS : Sven-Eric Bechtolf Dir : Tomáš Hanus avec Piotr Beczala, Elena Zhidkova, Kristine Opolais etc…Bechtolf, la fausse modernité et le vrai conformisme, directeur du théâtre au Festival de Salzbourg jusqu’à 2016. Ce n’est pas de la mise en scène que vient l’intérêt mais du chef, pleinement dans son répertoire, voire une référence, et une belle distribution, avec Opolais, Zhidkova, deux bêtes de scène, et Beczala, moins bête de scène, mais lui aussi référence dans ce type de rôle.

Avril 2021
Wagner, Die Walküre
(4 repr.), MeS Sven-Eric Bechtolf, Dir : Adam Fischer avec Andreas Schager, Mika Kares, Günther Groissböck, Camilla Nylund, Martina Serafin.
Là où Walküre passe…le wagnérien fait halte. Avril sera un mois wagnérien à Vienne avec ce Parsifal exceptionnel dont on a parlé et cette Walküre. En arrangeant son emploi du temps, on peut voir la dernière de Parsifal (11 avril) et la première de Die Walküre (14 avril). Adam Fischer est un chef solide, qui fréquente le Ring depuis des décennies, la mise en scène de Bechtolf est attendue, c’est à dire sans intérêt, et la distribution entre Schager, Kares, Groissböck et Nylund est plutôt très flatteuse. Il reste que je me demande ce qu’on continue de trouver à Martina Serafin.

Juin 2021
Richard Wagner, Lohengrin
(4 repr) MeS : Andreas Homoki, Dir : Cornelius Meister avec Kwangchul Youn, Klaus Florian Vogt, Sara Jakubiak, Tanja Ariane Baumgartner, Adrian Eröd.
Continuons la promenade wagnerienne. La production de Homoki, qu’on voit aussi à Zürich est faite pour les amateurs de Dirndl et culottes de peau, la direction de Cornelius Meister ne devrait pas être négligeable, la distribution solide mais pas exceptionnelle, même avec Vogt, le Lohengrin de ce début de XXIe siècle. Vous pouvez combiner avec l’autre production de Zurich, le Macbeth miraculeux de Kosky, qui est présenté dans la même période. Cela vous fera du Zurich sur Danube.

Mai 2021
Jacques Offenbach, Les contes d’Hoffmann
(5 repr.), MeS : Andrei Serban, Dir : Axel Kober avec Juan Diego Flórez, Sabine Devieilhe, Miche!le Losier, Erwin Schrott etc…
Andrei Serban, production de 1993, qui a sans doute épuisé ce qu’elle avait à dire. Axel Kober, bon chef, mais surprenant dans ce répertoire qui n’est pas le sien. Enfin dans la distribution, à part Erwin Schrott qui dans ce rôle (Lindorf etc..) c’est à dire le méchant, en fera des tonnes. On note Michèle Losier dans la Muse, Sabine Devieilhe en Olympia et Juan Diego Flórez dans Hoffmann, celui qui fut le plus grand chanteur pour Rossini et le répertoire romantique à la faveur de l’âge se lance dans le répertoire fin XIXe, Werther, Faust et Hoffmann…soit. L’intelligence, le phrasé, la technique restent… et on l’aime.

 

Conclusion :
Au-delà du souhait que la saison se réalise complètement et dès septembre, c’est une saison un peu bizarre, qui semble une manière de dire : « c’est le changement », en s’appuyant sur une dizaine de productions de metteurs en scène d’aujourd’hui, comme un défilé muséal de mises en scènes contemporaines (enfin pas toutes, parce que certaines sont de vieux souvenirs), de metteurs en scène qui souvent jamais n’ont travaillé dans la maison. Donc c’est la carte de visite d’un futur qu’on espère plus original, plus inventif et moins « conforme » (dans l’autre sens…). Avec Vienne, dernier bastion d’un théâtre plutôt traditionnel, qui rentre dans l’ordre moderne, le « mortierisme » se sera installé dans tous les grands théâtres d’opéra d’Europe occidentale ou peu s’en faut. Mais c’est un faux mortierisme, parce que Gérard Mortier était un intellectuel et un vrai créateur dans son ordre. Ici, on a de la gestion de productions achetées ou louées ailleurs. Le panier de la ménagère, c’est possible une saison mais pas deux. Vienne devra ou bien aller plus loin et se montrer créatif et simplement plus intelligent, ou bien le spectateur verra le même style partout et la routine s’installera.
Du point de vue musical, on est à Vienne et des chefs invités stimulants sont attendus. Vienne est pour moi d’abord un Opéra pour grands chanteurs et grands chefs : grands chanteurs cette année ? Un peu mais pas trop, et quand même pas mal de jeunes artistes qui commencent la carrière et qui vont se faire entendre, ce qui est positif. Grands chefs d’aujourd’hui ? Un peu mais vraiment pas trop. L’impression est celle d’un « plan plan » un peu plus coloré que précédemment, mais pas fondamentalement différent avec d’autres noms d’une qualité comparable. Sans doute la nouvelle direction procède-t-elle prudemment, à l’instar d’un Aviel Cahn à Genève, mais Aviel Cahn a un projet lisible et affirmé, ici il ne l’est pas encore, sinon par l’effet d’annonce : mais à vouloir s’afficher moderne, on arrive à faire sourire : reprendre après 20 ans et une douzaine de théâtres la fameuse Carmen de Bieito, c’est touchant dans la volonté de se montrer risque-tout (on pouvait en dire de même quand cette Carmen a été montrée à Paris). Il valait mieux garder la vieille production Zeffirelli…
Évidemment, d’un point de vue économique avec deux seules vraies nouvelles productions d’opéra sur une dizaine, c’est plutôt de bonne gestion.
En fait, à part la production de Parsifal, vraiment exceptionnelle, les bonnes idées on les trouve dans les reprises de vieilles (et excellentes) productions de la maison, L’Elektra de Kupfer, créée par Claudio Abbado en 1989 et reprise jusqu’à 2012, Le nozze di Figaro de Ponnelle (243 représentations de 1977 à 2010) une production que personne n’a oubliée, d’une suprême élégance, et l’intelligent et spectaculaire Don Carlos de Peter Konwitschny (2004), dont la dernière reprise remonte à 2013. Il reste qu’on aura par ailleurs plaisir à (re)voir le Kosky, le Tcherniakov, le Lauwers etc…Car ces considérations n’empêchent pas les productions présentées d’être intéressantes, mais comme elles sont connues et appréciées, c’est autant de risque que l’équipe de Vienne ne prend pas, Attendons la saison suivante pour nous faire une idée plus précise du nouveau cours que prend cette vénérable maison.

IN MEMORIAM STELIO VINANTI, IL PRIMO DEGLI ABBADIANI

 

Stelio Vinanti

Cari lettori, probabilmente non conoscete Stelio Vinanti. Solo chi viveva a Milano dai tempi in cui Claudio Abbado era alla Scala lo conosceva, solo i vecchi loggionisti, quelli che facevano parte degli “Amici del loggione”, lo conoscevano allora per la sua alta statura, per le sue rabbie improvvise, per la sua passione per la musica, per Claudio Abbado, per la cultura in tutte le sue forme. 
Il virus lo ha portato via mentre si trovava in una casa di riposo milanese. Quindi, per chi lo conosce e per chi, dopo aver letto il mio pezzo avrebbe sicuramente voluto conoscerlo, tengo a evocare questi ricordi di questa figura di habitué che frequentava la Scala e tutti teatri e le sale da concerto in Italia, di un vero appassionato di musica, e del primo degli abbadiani.
Merita di essere ricordato, tanto più che è impossibile andare a Milano per onorarlo tutti insieme.
Che razza di carattere!! Gli era facile infiammarsi al di là della ragione per difendere le sue passioni e le sue idee, persino le sue chimere. Era un uomo sgargiante, che passava le sue giornate nella sua tana, aperta sul giardinetto di una casa di charme nel centro di Milano, una casa di operai con giardino di fine Ottocento, un po’ in stile “cottage” inglese in versione casolare lombardo; quella tana era piena di carte, libri, articoli di giornale ritagliati, e in un angolo un paio di occhi enormi, quelli di Claudio Abbado, che sembravano guardarlo e tenere d’occhio l’allegro casino che vi regnava.
Quando scendevamo laggiù, ci mostrava un articolo di giornale, ci chiedeva cosa pensavamo di un tale e tale concerto, di una tale e tale produzione scaligera, e se non eravamo d’accordo con lui, si arrabbiava. Considerava anche che con la scomparsa di Abbado, la Scala non fosse più quel luogo magico da frequentare assiduamente.

Vienna, 13 ottobre 1989, da s. a d.: Guy Cherqui, Stelio Vinanti, Claudio Abbado (con relativo autografo), Mirella Freni

Claudio lo amava molto, si conoscevano da molto tempo, e avevano stabilito tra di loro una di quelle relazioni che quando ci si ritrova il tempo passato senza essersi visto viene cancellato.Lui, questo pilastro delle sale da concerto, in una città dove il piccolo ambiente degli amanti della musica e dell’opera si incontrava in tutti gli appuntamenti importanti e dove tutti si conoscevano, era una delle figure che non passavano inosservate, chiacchierando con tutti, sorridendo sempre, lasciando a quelli con cui parlava l’impressione di essere indispensabili, unici al mondo. Per lungo tempo aveva lavorato per gli Amici del Loggione del Teatro alla Scala, un’associazione nata ai tempi di Paolo Grassi, che, oltre ad organizzare eventi per preparare i soci alle nuove produzioni scaligere, organizzava incontri, mostre, ecc.… e lui si occupava in modo specifico degli eventi.  È lì che l’ho incontrato, mentre preparavo un evento intorno a Bizet. E siamo diventati subito amici.
Amici al punto che la sua scomparsa è un vuoto enorme, come una delle parti essenziali della mia vita che se ne è andata, perché Stelio è stata una delle amicizie più forti dei miei anni milanesi, è stato anche per me una fonte infinita di conoscenze diverse, mi ha insegnato tante cose, mi ha invitato a tante letture (“Come? Ma non hai letto questo? Ma non è possibile” diceva nel suo modo teatrale irresistibile). Andare a trovarlo era la certezza di vivere non solo un momento stimolante, ma spesso forte, e di ritornare a casa con tante idee in testa.
È stato naturalmente uno dei fondatori del Club Abbadiani Itineranti, accolita di appassionati che hanno seguito i concerti di Claudio Abbado dopo la sua partenza da Milano nel 1986, prima informalmente, poi formalmente, fondando un’associazione. Dal 1986 fino al 2013 ci siamo incontrati tutti regolarmente ai concerti di Claudio a Vienna, Berlino, Lucerna e altrove. Quando ritornavamo a Milano la sera in macchina ascoltando cassette o CD, discutendo della produzione o del concerto appena visto, quanti litigi omerici tra Klagenfurt e Tarvisio, tra Monaco e il Brennero, tra Ferrara e Milano!

Con la sua figlia Alessandra alla Scala poco prima della chiusura dovuta al virus

Tale era Stelio, un personaggio colto e curioso di tutto, così immerso nel suo mondo che spesso dimenticava il mondo reale, ma fortunatamente aveva con sé la sua ammirevole moglie Francesca, insegnante al conservatorio, e due figlie eccezionali che ovviamente hanno fatto carriera nella cultura, soprattutto nel mondo teatrale, che hanno agito con lui come il figlio del re francese Jean le Bon (Giovanni II il Buono) che gli diceva nel cuore della battaglia “Padre tieni a destra! padre tieni a sinistra!”.
A tutte e tre rivolgo il mio pensiero tanto ma tanto affettuoso.
Sì, Stelio viveva nel suo mondo e noi lo amavamo per questa singolarità, che a volte ci infastidiva con i suoi eccessi, ma che per gli stessi eccessi ci affascinava anche. Era un personaggio alla Balzac, un César Birotteau della musica, o uno di questi maniaci di Molière che piegano l’entourage alla mania: era un personaggio di finzione perso in un mondo che non faceva per lui.
Aveva accumulato documenti incredibili su tutta la vita culturale italiana ed europea a partire dagli anni Settanta, il suo archivio è un pozzo senza fondo, con le conoscenze, i commenti e i sentimenti che lo accompagnavano: se avesse voluto scrivere, o trasmettere tutti i tesori che conosceva, avremmo senza dubbio uno dei grandi ricordi musicali o teatrali della fine del XX secolo. Mi ha anche trasmesso la sua passione per Luca Ronconi, per lui l’altro compagno di strada. Ma Stelio era anche un uomo fragile, un insicuro; preferiva immergersi nelle sue passioni da solo o con pochi amici e non avrebbe mai affrontato il mondo: stava troppo bene in questo regno di cui era il monarca assoluto.
Originario di Belluno, non lontano dalle Dolomiti, gli piaceva negli ultimi anni ritirarsi da lupo solitario nella sua “casera”, una piccola casa di boscaioli in fondo di foreste per dipingere, disegnare e sognare.
La sua salute ormai era peggiorata, e da più di un anno si trovava in una casa di riposo, dove aveva trasformato la sua stanza in una dépendance della sua tana, piena di giornali ritagliati e soprattutto di superbi disegni dei residenti, che aveva colto con un tratto di incredibile sicurezza.
Là dove si trovava, aveva questa meravigliosa capacità di ricreare un mondo tutto suo.
In fondo era un artista, più solitario e più fragile di quanto si possa pensare, immerso nella carta stampata, con poco senso pratico (il suoi faccia a faccia con il computer o più tardi con lo smartphone erano omerici), un personaggio d’altri tempi, dedicato solo all’arte e alla musica, dedicato ai suoi idoli: è stato per noi l’emblema dei nostri anni di folli passioni per la musica, per Claudio, per il teatro, per l’arte, e allo stesso tempo ha rappresentato per noi l’estremo del possibile. Da qui questa alternanza, anche in una sola serata, tra indimenticabili risate ed esplosioni di rabbia da cui uscivamo esausti.
Stelio, dove tu sia, sei adesso tra tuoi idoli. Sono sicuro che stai già trovando il tuo piccolo angolo confortevole, tra i tuoi sogni, le tue fantasie e le tue passioni. E anche se ti porteremo per sempre dentro di noi, ci lasci terribilmente soli.

Uno dei nostri ultimi incontri

IN MEMORIAM STELIO VINANTI, LE PREMIER DES “ABBADIANI”

Stelio Vinanti

Chers lecteurs, vous ne connaissez sûrement pas Stelio Vinanti. Seuls, ceux qui vivaient à Milan depuis les temps où Claudio Abbado était à la Scala le connaissaient, seuls les vieux “loggionisti” ceux qui faisaient partie des “Amis du loggione” ont connu à l’époque sa haute stature, ses coups de gueule, sa passion pour la musique, pour Claudio Abbado, pour la culture sous toutes ses formes.
Le virus l’a emporté alors qu’il était dans une maison de retraite milanaise. Alors, pour ceux qui le connaissent et pour les autres aussi qui auraient sûrement aimé le côtoyer, je tiens à écrire ces souvenirs d’une figure des habitués qui fréquentaient la Scala et les salles de concert, d’un vrai mélomane, d’un abbadien de choc.
Il mérite d’être évoqué, puisqu’il est impossible de se rendre à Milan pour l’honorer tous ensemble.

Pour un caractère, c’en était un, facile à s’enflammer au-delà du raisonnable pour défendre ses passions et ses idées, voire ses chimères. C’était un flamboyant, qui passait ses journées dans son antre, au rez-de-jardin d’une ravissante maison dans le centre de Milan, dans ces maisons de travailleurs de la fin du XIXe, un peu dans le style cottage anglais revu à la lombarde ; ce rez-de-jardin était un amoncellement de papiers, de livres, d’articles de journaux découpés, et dans un coin une paire d’yeux énormes, ceux de Claudio Abbado qui semblaient le surveiller et veiller au joyeux bordel qui régnait là. Quand on y descendait, il nous montrait un article de journal, nous demandait ce que nous pensions de tel ou tel concert, de telle ou telle production de la Scala et si nous n’étions pas d’accord avec lui, il s’enflammait. Il considérait d’ailleurs qu’Abbado parti, la Scala n’en valait plus tout à fait la peine.

13 octobre 1989: Vienne, après Don Carlo: de gauche à droite Guy Cherqui, Stelio Vinanti, Claudio Abbado (avec l’autographe), et Mirella Freni au fond

Claudio l’aimait beaucoup, il se connaissaient depuis très longtemps, et avaient établi entre eux une de ces complicités qui font que lorsqu’on se retrouve le temps n’a pas de prise.
Lui, ce pilier des salles de concert, dans une ville où le petit milieu mélomane se retrouvait à tous les rendez-vous importants et où tout le monde de la musique se connaissait, il était une des figures de référence discutant avec tous, toujours souriant, laissant à tous quand il leur parlait l’impression qu’ils étaient seuls au monde. Il avait longtemps travaillé aux Amici del Loggione, les amis du Poulailler de la Scala, une association fondée aux temps de Paolo Grassi qui outre animer des soirées pour préparer les membres aux nouvelles productions de la Scala, organisait des événements, rencontres, expositions etc… et il y était plutôt chargé de l’événementiel.  C’est là que je l’ai connu, en préparant un événement autour de Bizet. Et nous fûmes immédiatement amis.
Amis au point que sa disparition est un énorme vide, comme un des pans essentiels de ma vie qui s’en va, parce que Stelio a été une des amitiés les plus fortes de mes années milanaises, il a été aussi pour moi une source infinie de savoirs divers, il m’a appris tant de choses, m’a invité à tant de lectures (« Come ? Ma non hai letto questo ? Ma non è possibile» disait-il de ce ton théâtral qu’il prenait alors de manière irrésistible). Aller lui rendre visite était la certitude non seulement de passer un moment stimulant, mais souvent fort, et de repartir avec plein d’idées dans la tête.
Il a été aussi parmi les fondateurs naturels du Club Abbadiani Itineranti qui a suivi Claudio après son départ de Milan en 1986, d’abord informellement, puis bientôt formellement par la fondation d’une association. Et depuis 1986 ou 1987 et jusqu’à 2013, nous nous sommes tous régulièrement retrouvés aux concerts de Claudio à Vienne, à Berlin, Lucerne ou ailleurs. Combien de retours en voiture à Milan dans la nuit écoutant des cassettes, ou des CD, discutant de la production ou du concert qu’on venait de voir, combien d’engueulades homériques entre Klagenfurt et Tarvisio, Munich et le Brenner, Ferrare et Milan.

Avec sa fille Alessandra à la Scala peu avant la fermeture due au virus

Tel était Stelio, un personnage cultivé, curieux, tellement plongé dans son monde qu’il en oubliait souvent le monde réel, mais il avait heureusement auprès de lui son épouse Francesca, admirable, enseignante au conservatoire, et deux filles exceptionnelles qui ont évidemment fait carrière dans la culture, et notamment dans le théâtre, qui jouaient à trois le rôle du fils de Jean le Bon à la bataille « Père gardez-vous à droite! Père gardez-vous à gauche !». À toutes les trois j’adresse mes pensées tellement affectueuses.
Oui, Stelio vivait dans son monde et nous l’aimions pour cette singularité, qui nous agaçait quelquefois par ses excès, mais qui pour les mêmes excès nous charmait aussi. C’était un personnage balzacien, un César Birotteau de la musique, ou un de ces maniaques de Molière qui plient la maisonnée

à sa manie : c’était un personnage de fiction perdu dans un monde qui n’était pas fait pour lui.
Il avait accumulé des documents incroyables sur toute la vie culturelle italienne et européenne depuis les années 70, son archive est un puits sans fonds, avec les connaissances, les commentaires et les ressentis qui allaient avec : s’il avait voulu écrire, ou transmettre tous les trésors qu’il connaissait, sans doute aurions-nous une des grandes mémoires musicales ou théâtrales de la fin du XXe. Il m’a d’ailleurs aussi transmis sa passion pour le metteur en scène Luca Ronconi. Qui était pour lui l’autre compagnon de route.
Mais Stelio était aussi un fragile, peu sûr de lui; il préférait se plonger dans ses passions de manière solitaire ou avec quelques amis et ne se serait jamais confronté au monde : il était trop confortable dans ce royaume dont il était le monarque absolu.
Originaire de Belluno, non loin des Dolomites, il aimait d’ailleurs les dernières années se retirer tout seul dans sa « casera », une petite maison de bûcheron au fond des bois pour peindre, dessiner, et rêver.

Sa santé s’était dégradée, il était depuis plus d’un an dans une maison de retraite, et il y avait transformé sa chambre en annexe de son antre, pleine de journaux découpés et surtout de dessins superbes des pensionnaires qu’il saisissait par des traits d’une sûreté incroyable. Là où il était, il avait cette merveilleuse capacité à se recréer un monde à part, un monde à lui.

Artiste dans l’âme, plus solitaire et plus pudique qu’on ne pourrait croire, homme du livre et du papier, peu doué de sens pratique, (ses face à face avec l’ordinateur ou plus tard le smartphone étaient homériques) personnage d’un autre âge, dédié seulement à l’art et à la musique, dédié à ses idoles, il était pour nous à la fois l’emblème de nos années de passions folles pour la musique, pour Claudio, pour le théâtre, pour l’art, et en même temps il représentait pour nous l’extrême du possible. D’où cette alternance, y compris en une soirée, entre éclats de rires inoubliables et colères dont nous sortions épuisés.
Stelio, là où tu es tu as rejoint tes idoles. Je suis sûr que tu es déjà en train de te trouver ton petit coin entre tes rêves, tes chimères et tes passions. Et même si nous continuerons de te porter en nous, tu nous laisses terriblement seuls.

Une de nos dernières rencontres, il y a quelques mois

STAATSOPER BERLIN 2020-2021: PRÉSENTATION DE LA SAISON LYRIQUE

 

La Staatsoper Unter den Linden

Le paysage berlinois a trois salles d’opéra ce qui est un résultat de l’histoire, bien que la ville au XXe ait toujours eu plusieurs salles d’opéra

  • La Deutsche Oper Berlin est l’ex-opéra de Berlin-Ouest, lui-même héritier du Deutsches Opernhaus, ouvert en 1912
  • La Komische Oper de Berlin, héritière du Metropol Theater créé à la même adresse en 1898, puis installé dans d’autres lieux de Berlin-Mitte, un théâtre d’opérettes et de revues.
  • La Staatsoper de Berlin, située au centre historique institutionnel de Berlin, à deux pas de la Cathédrale ou du Palais impérial. C’est l’opéra historique de Berlin, inauguré en 1742, avec dans la fosse l’orchestre symbolique de la ville, la Staatskapelle Berlin fondée quant à elle au XVIe siècle.

Ces deux derniers théâtres sont situés dans ce qui était Berlin-Est avant la chute du mur , où se trouvaient aussi les principaux théâtres et l’essentiel des Musées. Ainsi, Berlin Ouest a dû ouvrir des lieux de spectacles nouveaux, dans des quartiers qui n’étaient pas a priori des quartiers de vie nocturne.
À la chute du mur, Berlin s’est retrouvé avec trois salles d’opéra dont deux à peu près similaires, la Deutsche Oper et la Staatsoper, toutes situées sur l’axe central de la ville à plusieurs kilomètres les unes des autres, et deux principales salles de concert, la Philharmonie à l’Ouest, construite à deux pas du Mur et le Konzerthaus à l’Est, qui est la salle de concerts historique…
La Komische Oper, héritière de la très riche tradition d’opérette de la ville et d’oeuvres musicales légères, a un rôle très différent, c’est des trois le théâtre qui a la couleur la plus claire (opéra populaire, genres très diversifiés).

Bebelplatz

La fonction « historique » de la Staatsoper est aussi soulignée par sa situation, donnant sur la prestigieuse Unter den Linden et sur la Bebelplatz, l’ex Forum Fridericianum, délimité par la Staatsoper, l’Université Humboldt et la cathédrale catholique Sainte Edwige, la plus ancienne église catholique de Berlin. C’est donc une des esplanades les plus emblématiques du passé de la ville.
Cette position prestigieuse est renforcée depuis 1992, par la présence comme directeur musical de Daniel Barenboim, qui, licencié de manière brutale et humiliante par Pierre Bergé, alors tout puissant président du Conseil d’administration de l’Opéra de Paris, se trouvait être disponible. À quelque chose malheur est bon : il aurait peut-être raté Berlin alors qu’il n’aurait de toute façon pas fait très long feu à Paris, à cause des errances de la politique culturelle (si politique il y a d’ailleurs) à cause de la valse des excellences à la tête de l’Opéra et aussi à cause de sa propre personnalité, qui s’accommode mal d’une tutelle même légère.

À la Staatsoper de Berlin, les intendants passent (Georg Quander, Peter Mussbach, Ronald Adler (commissaire), Jürgen Flimm, Matthias Schultz), Barenboim reste. La ville tient plus à son directeur musical qu’à ses intendants, c’est un peu comme le Roi et ses gouvernements. L’illustration parfaite de l’adage « L’intendance suivra… ».
De fait, Daniel Barenboim, par sa puissance de feu, ses réseaux, sa capacité à mobiliser des fonds, mais aussi ses positions politiques (notamment sur la question de la Palestine et d’Israel, qui lui fait honneur) et bien sûr son génie musical est devenu le vrai successeur de Karajan à Berlin en termes de pouvoir (et Karajan ne régnait que sur Berlin-ouest…).

À ce titre aussi, au début du mois de janvier 2020, le récent concert de Kirill Petrenko avec Daniel Barenboim comme soliste était une sorte d’entrevue du Camp du Drap d’Or, au pied musical…Les deux phares musicaux berlinois, l’ancien et le nouveau, se rencontraient. C’était obligatoire.
Les longs travaux de consolidation et restauration de la Staatsoper (sept ans) ont installé à portée de corridor l’opéra, la Fondation Barenboim-Saïd et la Pierre-Boulez Saal, siège du West-Eastern Diwan orchestra.  Administration, salles de répétitions, Fondation Saïd-Barenboim sont donc géographiquement solidaires : au cœur de Berlin – le mélomane ne s’en plaindra pas, c’est Barenboim-Quarter dont la Pierre-Boulez Saal, un outil architectoniquemement extraordinaire (un « cadeau » de Frank Gehry à Barenboim), est en quelque sorte la salle de musique privée du Maître, qui y dirige, qui y joue et qui a la main sur tous les programmes en patron de la Fondation.
Barenboim, maître de maison de tout ce dispositif, dirige à l’opéra essentiellement Wagner, mais aussi un certain nombre de premières de toutes sortes : ces dernières années il a abordé un répertoire qui lui était tout à fait étranger, comme le répertoire italien, voire français (jamais on aurait imaginé l’entendre dans Les Pêcheurs de Perles de Bizet ou Medea de Cherubini) ou russe (il va revenir à Bastille dirigeant La Dame de Pique) qu’il abandonne ensuite aux Kapellmeister de la maison ou à des jeunes chefs qu’il choisit et dont il lance la carrière..

Ce système a donné des productions de référence qui ont fait de la Staatsoper de Berlin le théâtre vers lequel tous les regards se portent, avec la présence de metteurs en scène parmi les plus emblématiques du dernier XXe siècle, Chéreau (avec qui Barenboim avait prévu plusieurs productions pour Bastille quand il devait en être le directeur musical), Kupfer (long compagnonnage depuis le Ring de Bayreuth) et maintenant Dmitry Tcherniakov, qui a signé à Berlin de très nombreuses productions, de Rimsky-Korsakov à Prokofiev en passant par Wagner : on lui doit notamment un Tristan et un Parsifal qui vont entrer de plain-pied dans la légende.
Plus que d’autres, Barenboim travaille par affinités électives, c’est un homme de fidélités à des metteurs en scène, à des chanteurs : à ce titre sa production des Meistersinger von Nürnberg est un hommage à tous les chanteurs avec qui il a fidèlement travaillé dans sa carrière.
La programmation n’en est pas pour autant un concerto pour Barenboim et orchestre.  Il est bien trop prodigieusement intelligent pour éviter qu’on lui fasse de l’ombre, notamment dans une ville où il a peu de rivaux…Daniel Barenboim a toujours veillé par exemple pour les raisons expliquées plus haut à entretenir des relations excellentes avec le Philharmonique de Berlin, du temps d’Abbado bien sûr, à cause de la longue amitié qui les liait, où il y eut un Falstaff, et du temps de Simon Rattle, avec plusieurs productions notables, dont De la Maison des morts de Leoš Janáček (celle de Chéreau venue d’Aix); il devait diriger cette saison Idomeneo (annulé pour cause de virus) et ce sera la saison prochaine une Jenufa qui fera évidemment courir.
Mais on y voit aussi fréquemment Zubin Mehta, amicalement lié à Barenboim comme il l’était à Abbado.
À l’autre bout, Barenboim n’hésite pas à inviter à diriger de jeunes chefs et ainsi les lancer, ce fut naguère le cas de Omer Meir Wellber, c’est aujourd’hui  celui de Thomas Guggeis, arrivé in extremis pour remplacer Christoph von Dohnanyi dont il était l’assistant dans la production de Salomé (Hans Neuenfels) et qui dirige cinq productions cette année.
Mais on a beaucoup accusé Barenboim (78 ans cette année) de s’accrocher à son post : aux tout nouveaux Oper ! Awards 2019, il a eu le prix de la GRÖSSTES ÄRGERNIS (La plus grosse colère) pour la prolongation de son contrat jusqu’à 2027 – il aura alors 85 ans.

Son activité continue d’être débordante entre concerts, récitals de piano, opéras, mais on remarque qu’il va un peu ralentir son rythme la saison prochaine, où il va diriger deux nouvelles productions (Quartett de Francesconi et Le nozze di Figaro. Il devait cette année diriger Cosi fan Tutte, mais le coronavirus en a décidé autrement et Cosi fan Tutte, inscrit dans la saison au titre de répertoire, sera de fait une nouvelle production reportée. Proposant une nouvelle trilogie Mozart/Da Ponte mise en scène par Vincent Huguet, il était important d’afficher un titre par an – il y en aura donc deux la saison prochaine. Et on verra sans doute Don Giovanni en 21/22.
Dans les reprises, il sera au pupitre de ce Così fan tutte (une reprise, qui sera donc une première) et de Parsifal, comme presque chaque année (il ne dirige aucun des trois autres Wagner). Au total  Daniel Barenboim dirige 17 représentations ce qui est peu.
Les apparitions raréfiées cette prochaine saison annoncent-elles un début de retrait ? Quand on connaît l’énergie du personnage, cela ne laisse pas d’étonner. La saison 2019-2020, interrompue l’a vu diriger deux nouvelles productions Die Lustigen Weiber von Windsor et Samson et Dalila et il aurait dû diriger Così fan tutte à Pâques, et les reprises du Ring de Wagner en septembre 2019, et Carmen en mars. Il est nettement moins impliqué dans la saison qui vient.

Alors inévitablement se pose la question de l’après-Barenboim, qui est une question fort lourde pour une institution qu’il a dirigée depuis 1992, soit pour l’instant 28 ans en lui redonnant un lustre international qu’elle n’avait plus (même si c’était quand même un grand théâtre de tradition).
Par ailleurs, cette saison, parmi les chefs invités, on note des noms rares à Berlin (et ailleurs) à l’opéra, comme Matthias Pintscher ( Nouvelle production Lohengrin et Wozzeck de répertoire) ou rares à Berlin mais pas ailleurs comme Antonio Pappano (Nouvelle production La Fanciulla del West), tandis qu’on remarque que Marc Minkowski (Nouvelle production Mitridate Re di Ponto de Mozart et reprise d’Orfeo ed Euridice de Gluck) Simon Rattle (Nouvelle production Jenufa) et Simone Young dans trois productions (reprises) (Khovantschina, Die Frau ohne Schatten, Der Rosenkavalier) seront au pupitre berlinois cette année.
Panorama étrange et contrasté avec des choix incontestables, et d’autres plus étonnants.
Par ailleurs, se pose aussi notamment cette année une autre question : le niveau artistique est un peu en dents de scie, il y a certes des grands chefs et de belles distributions, mais bien des reprises restent d’un niveau modeste, même si on essaie de faire appel à de nouveaux chefs  ou de nouvelles voix  (Vida Miknevičiūtė dans Salomé) et donc c’est l’hétérogénéité de l’offre qui frappe, notamment quand on compare cette saison à celle de Munich, plus imaginative ou surtout à celle de Zurich, plus homogène et aux reprises plus stimulantes. C’est une année un peu en creux, mais sans doute aussi les circonstances l’ont-elles imposée.

 

Nouvelles productions :

 

 

8 Nouvelles productions (sans compter les fausses reprises de productions de 2019-2020 non créées que nous évoquerons dans la partie “Répertoire” ) dont 2 en version chambriste (un opéra pour enfant et un opéra de chambre contemporain)

Oct. 2020
Luca Francesconi, Quartett, (5 repr.), MeS : Barbara Wysoka Dir : Daniel Barenboim avec Mojka Erdmann et Thomas Oliemans
Tandis que la Bayerische Staatsoper crée Timon of Athens (voir notre présentation de la saison bavaroise), Berlin propose l’un des grands succès de Francesconi, Quartett, créé à la Scala en 2011, d’après la pièce d’Heiner Müller, tirée elle-même des Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos. Barenboim dirige, ce qui est un signe important, deux chanteurs, l’excellent baryton Thomas Oliemans et Mojca Erdmann, qui sera aussi à l’affiche plus tard dans la saison dans un autre opéra contemporain de Jörg Widmann, Babylon (l ’opéra contemporain aime les voix suraiguës). La mise en scène est assurée par Barbara Wysocka, qui il y a quelques années avait mis en scène Lucia di Lammermoor à Munich dirigée par Kirill petrenko, qu’on vient de revoir en streaming.

Nov. 2020
W.A.Mozart, Mitridate, re di Ponto
, (5 repr.), MeS : Satoshi Myagi Dir : Marc Minkowski avec Pene Pati, Julie Fuchs, Elsa Dreisig, Jakub Józef Orliński, Anna Prohaska etc…
C’est la production phare des Barocktage 2020, dirigée par Marc Minkowski et surtout mise en scène dans l’esprit du Kabuki par l’un des plus grands metteurs en scène japonais, Satoshi Myagi, ce qui devrait être vraiment intéressant vu ses relectures des grands classiques occidentaux. Dans la distribution, rien que des chanteurs actuellement très demandés, Julie Fuchs, Elsa Dreisig, Jakub Józef Orliński, Anna Prohaska et un nouveau venu, le ténor néozélandais Pene Pati qui a fait des débuts remarqués à San Francisco (mais aussi à Bordeaux dans le rôle de Percy d’Anna Bolena en 2018 et qui devait chanter Romeo en ce dernier mois de mars), voix claire, idéale pour le bel canto.

Déc.2020/Janv. 2021
Richard Wagner, Lohengrin
, (6 repr.), MeS : Calixto Bieito Dir : Matthias Pintscher avec Roberto Alagna, Sonya Yoncheva, Martin Gantner, Ekaterina Gubanova, Adam Kutny
On se précipitera pour le couple vedette Alagna/Yoncheva. Cette production, qui succède à celle un peu irrégulière de Stefan Herheim en 2009, est confiée à Calixto Bieito qui va proposer sa vision aussitôt après avoir proposé son Ring à Paris ( plongeon dans Wagner et jonglage d’agenda en vue ). Roberto Alagna cette fois-ci devrait s’y coller, et Sonya Yoncheva  qui s’essaie à tout s’essaie aussi à Wagner. Plus classiques Martin Gantner et Ekaterina Gubanova dans les rôles des méchants. Et puis au pupitre on expérimentera Matthias Pintscher un nouveau venu à l’opéra autre que contemporain (il a dirigé à la Staatsoper Violetter Schnee de Beat Furrer et à Vienne la première mondiale d’Orlando d’Olga Neuwirth, d’après Virginia Woolf) à qui sera aussi confié Wozzeck dans la saison. Sans doute désire-t-il comme beaucoup de chefs catalogués dans un répertoire, à élargir ses interventions. Au total un Lohengrin plein de nouveautés et de risques, qui va sans nul doute exciter la curiosité.

Février 2021
Leoš Janáček, Jenufa, (6 repr.), MeS : Damiano Michieletto Dir : Simon Rattle avec Hanna Schwarz, Stuart Skelton, Ladislav Elgr, Evelyn Herlitzius, Camilla Nylund etc…
Rattle-Michieletto-Nylund-Herlitzius sont des noms qui sur une affiche ne laissent aucun fan d’opéra indifférent. Damiano Michieletto enfant terrible plus habituel dans le répertoire italien s’attaque à Janáček, Sir Simon Rattle est en général remarquable dans ce répertoire, et Nylund et Herlitzius devraient y faire merveille sans oublier la vénérable Hanna Schwarz, la Fricka du Ring de Chéreau. Voilà qui suffit pour justifier un voyage.

Mars 2021 (Feststage)
W.A.Mozart, Le nozze di Figaro,
(3 repr.), MeS : Vincent Huguet Dir : Daniel Barenboim avec Gyula Orendt, Nadine Sierra, Marianne Crebassa, Siegfried Jerusalem, Waltraud Meier, Elsa Dreisig, Riccardo Fassi, Stephan Rügamer etc…
Il faudra évidemment aller voir Cosi fan tutte et ces Nozze di Figaro, d’abord parce qu’elles marquent le goût ancien pour l’opéra mozartien du maître des lieux : rappelons qu’il enregistra très tôt (dans les années 70) Don Giovanni et Le Nozze di Figaro, un peu plus tard Così fan tutte, et que jamais il n’a marqué une distance par rapport à ce répertoire. C’est donc toujours un événement quand il retourne au pupitre pour diriger un opéra de Mozart. C’est par ailleurs aujourd’hui la mode que de proposer au même metteur en scène la trilogie Mozart/Da Ponte, une mode qui ne me convainc pas ( La trilogie Da Ponte/Mozart n’est pas le Ring) même si cela affiche un projet cohérent de confier à un univers unique les trois opéras de Mozart. Strehler de dix ans en dix ans (grosso modo) l’avait entrepris, mais si Le nozze di Figaro à Paris (1973) étaient un coup de génie, ni Don Giovanni (1987) à la Scala ni Così fan tutte (1998) au Piccolo Teatro de Milan n’avaient atteint ce degré de réussite.
C’est donc Vincent Huguet qui s’y attaque. Les précédents spectacles de Vincent Huguet ne m’ont pas vraiment convaincu. Espérons que ces Mozart casseront cette impression. La distribution faite d’une nouvelle génération d’excellents chanteurs (Gyula Orendt, Marianne Crebassa, Nadina Sierra, Elsa Dreisig etc…devrait exciter la curiosité, et encore plus la présence d’une Marcellina aussi luxueuse qu’inattendue, Waltraud Meier tout comme le Don Curzio de Siegfried Jerusalem: jamais un Don Curzio ne suscitera autant de curiosité. On fait à Berlin comme à Vienne où les gloires du passé furent souvent employées dans les tout petits rôles (je vis à Vienne Erich Kunz dans Benoit de La Bohème par ex). 

Juin 2021
Giacomo Puccini, La Fanciulla del West (7 repr.)
MeS: Lydia Steier, Dir: Antonio Pappano avec Anja Kampe, Yusif Eyvazov, Michael Volle, Graham Clark etc…
Antonio Pappano dirige très peu l’opéra en dehors de Londres, c’est d’autant plus intéressant de le voir à Berlin. Comme c’est un chef au très large répertoire, italien comme allemand, rien d’étonnant à le voir diriger Puccini, et un Puccini pas si fréquent. La production est confiée à Lydia Steier, qui là où elle passe, provoque la polémique dans le public ou la critique, et quelquefois même à la direction du théâtre (Genève). Et dans la distribution Anja Kampe, qui a déjà interprété le rôle de Minnie à Munich (voir le compte rendu dans Wanderersite.com), Michael Volle dans Jack Rance qui devrait être évidemment très attendu et Yusif Eyvazov dans Dick Johnson qui me laisse plus perplexe vu ses capacités d’acteur, et là aussi, dans les « petits rôles » une vieille connaissance, Graham Clark, qui participa y compris à Bayreuth à de nombreuses productions dirigées par Barenboim

Opéras pour enfants et opéras de chambre (dans l’ancienne salle de répétition d’orchestre)

Janv.2021
Lucia Ronchetti, Pinocchios Abenteuer, Instrumentale Komödie (Comédie instrumentale)
(à partir de 6 ans), (15 repr.) pour soprano et cinq musiciens, MeS : Swaantje Lena Kleff,  Dir : Adrian Heger avec en alternance Sophia Aristidou et Hanna Herfurtner.
Adaptation des aventures de Pinocchio pour prouver son courage, notamment en combattant des bêtes, des personnages louches, une baleine.

Avril 2021
Georg Friedrich Haas, Thomas, Kammeroper (2013)
, (8 repr.), MeS: Barbora Horáková Joly Dir: Max Renne avec les membres de l’Opéra Studio et des membres de la Staatskapelle Berlin ainsi que des artistes invités.
Un opéra de chambre sur la réaction devant la mort d’un ami : Matthias meurt à l’hôpital et Thomas, entouré de l’agitation des soignants, est laissé seul, avec ses souvenirs et son deuil. D’une effrayante actualité.

 

 

Répertoire:

 

26 reprises (dont deux ou trois « fausses » reprises de nouvelles productions qui n’ont pas eu lieu en 2019-2020)

Sept.2020
Giuseppe Verdi, Il trovatore,
(6 repr.), MeS: Philipp Stölzl, Dir: Massimo Zanetti avec Liudmyla Monastyrska, Vladislav Sulimsky, Marcelo Alvarez, Violeta Urmana, Adrian Sâmpetrean
Reprise alimentaire : septembre est musicalement très riche à Berlin et il faut proposer des titres qui attirent. Massimo Zanetti est un bon professionnel, la distribution est digne d’intérêt surtout pour Urmana en Azucena et Sulimsky, le baryton qui monte, en Luna. Alvarez est de plus en plus routinier, et Monastyrska qui est une bonne soprano dramatique d’agilité (Abigaille, Odabella), manque de ce lyrisme et de cette apparente fragilité qui font les grandes Leonora.

Otto Nicolaï, Die lustigen Weiber von Windsor, (4 repr.), MeS: David Bösch, Dir: Daniel Barenboim/Thomas Guggeis avec Michael Volle, René Pape, Pavol Breslik, Wilhelm Schwinghammer, Linard Vrielink, Mandy Fredrich, Michaela Schuster, Anna Prohaska, David Oštrek
Deux représentations dirigées par Barenboim et deux par Guggeis. La mise en scène de David Bösch assez réussie et bénéficie surtout d’une distribution splendide de chanteurs acteurs, dominée par les voix masculines, Michael Volle, René Pape, Pavol Breslik et Linard Vrielink, tous remarquables, et les voix féminines ne déméritent pas et sont très homogènes ; à voir sans aucun doute, d’autant que l’œuvre est rare, voire inexistante en France ou en Suisse.

Richard Wagner, Der fliegende Holländer, (4 repr.), MeS: Philipp Stölzl, Dir: Thomas Guggeis avec Matthias Goerne, Peter Rose, Ricarda Merbeth et Stephan Rügamer.
Thomas Guggeis est encore au pupitre, pour cette reprise de la production de Philipp Stölzl, proche par son esprit de la légendaire production d’Harry Kupfer à Bayreuth. La distribution est de bon niveau, Matthias Goerne, Peter Rose, Ricarda Merbeth et l’excellent Rügamer font partie de la crème du chant allemand.

Sept. 2020/Juin 2021
Walk the Walk
, (9 repr.)
Performance du compositeur et installateur danois Simon Steen-Andersen.

Oct. 2020
Modest Mussorgsky, Khovantchina
, (5 repr), MeS: Claus Guth, Dir: Simone Young avec Mika Kares, Sergey Skorokhodov, john Daszak, Vladislav Sulimsky, Alexey Tikhomirov, Marina Prudenskaya etc…
Voilà une reprise qui pourrait bien être une nouvelle production car on peut douter que la première ait lieu en juin 2020, au rythme où vont les choses.Une reprise (?) de 5 représentations qui devraient être prises d’assaut. Un metteur en scène qui fait toujours discuter, mais qui travaille toujours intelligemment, on aurait aimé que Vladimir Jurowski puisse diriger cette reprise, c’est quand même un des grands chefs de ce temps, et ce sera Simone Young, évidemment moins stimulante, même si bonne cheffe. Mais il y a une distribution de très haut niveau, réunissant quelques-uns des meilleurs chanteurs de la nouvelle génération, dont l’excellent Mika Kares, mais aussi Vladislav Sulimsky ou Alexey Tikhomirov. À voir évidemment !

Georges Bizet, Les pêcheurs de perles (3 repr.) MeS: Wim Wenders, Dir: Victorien Vanoosten avec Olga Peretyatko, Pavol Breslik, Alfredo Daza.
Reprise de la production de Wim Wenders du chef d’œuvre de Bizet, avec notamment Olga Peretyatko et Pavol Breslik, et le baryton maison Alfredo Daza. Notons l’appel à Victorien Vanoosten, un des chefs français de nouvelle génération, qui a étudié à Paris, mais aussi à Helsinki notamment avec Esa Pekka Salonen (école finlandaise, aujourd’hui la plus considérée), et d’autres. Il a été l’assistant de Daniel Barenboim pour Les Pêcheurs de Perles et reprend la production qu’il a déjà dirigée en 2018.

Oct-nov 2020/Avril 2021
Richard Wagner, Tannhäuser
(6 Repr.), MeS : Sasha Waltz, Dir : Thomas Guggeis avec Klaus Florian Vogt, Rachel Willis-Sørensen, Wilhelm Schwinghammer, Lauri Vasar, Marina Prudenskaya.
La production chorégraphiée et si originale de Sasha Waltz, dirigée par le très sollicité Thomas Guggeis, dans une distribution nouvelle, dominée par Klaus Florian Vogt avec l’Elisabeth de Rachel Willis-Sørensen et la Venus de Marina Prudenskaya. Si vous êtes à Berlin…

Oct-nov 2020
Benjamin Britten, The Turn of the screw
(4 Repr.), MeS : Claus Guth Dir :  Finnegan Downie Dear avec Stephan Rügamer, Maria Bengtsson, Angela Denoke etc…
La production de Claus Guth (à qui les questions de psychisme conviennent toujours) et la direction de Finnegan Downie Dear, directeur musical du Shadwell Opera, une des compagnies anglaises les plus inventives, peuvent stimuler la curiosité, mais aussi la distribution où l’on note Stefan Rügamer, magnifique chanteur acteur, de la troupe locale, mais aussi le retour de la grande Angela Denoke, dans le rôle de la gouvernante Mrs. Grose.

Nov.2020
Orpheus-festival (dans le cadre des Barocktage 2020)

 Les Barocktage 2020, outre Mitridate re di Ponto proposent un focus sur le mythe d’Orphée, avec trois Orphée différents, celui, berlinois, de Carl Heinrich Graun (1704-1759), celui, italien, de Monteverdi et celui viennois de Gluck

Carl Heinrich Graun, Orfeo (1 repr. concertante) Dir: Howard Arman avec Lucile Richardot, Sophie Karthäuser, Andrew Watts etc…
Akademie für Alte Musik
Jolie distribution pour cette unique représentation concertante dirigée par Howard Arman plus connu comme chef de chœur ( il dirige actuellement le Chor des Bayerischen Rundfunks, l’un des meilleurs sinon le meilleur au monde) que chef d’orchestre. Carl Friedrich Graun, compositeur à la cour de Frédéric II, est lié à Berlin et la distribution est dominée par les remarquables Lucile Richardot et Sophie Karthäuser.

Claudio Monteverdi, L’Orfeo (3 repr.) MeS: Sasha Waltz Dir: Jonathan Cohen avec Georg Nigl, Ana Lucia Richter, Katharina Kammerloher
Le spectacle qui lie opéra et danse a fait le tour de l’Europe (Amsterdam, Lille, Luxembourg, Bergen etc…) avec les mêmes protagonistes Georg Nigl et Ana Lucia Richter, le Vocalconsort Berlin et les Freiburger Barockconsort et donc, si vous l’avez raté, c’est l’occasion de le voir. Vaut le détour.

Christoph Willibald Gluck, Orfeo ed Euridice (3 repr.) MeS: Jurgen Flimm Dir: Marc Minkowski avec Bejun Mehta, Valentina Nafornița, Victoria Random
La version italienne de 1762 de Ranieri de’ Calzabigi, dirigée par Marc Minkowski (qui a souvent dirigé l’œuvre, notamment en français) avec comme particuarité Bejun Mehta en Orfeo contreténor, dans la mise en scène noire de Jürgen Flimm et les décors du grand architecte américain Frank Gehry. Vaut vraiment le détour aussi !

Never look back, ein Orpheus-Festival (5 repr.) dans l’ancienne salle de répétitions d’orchestre, une série de propositions sur le thème d’Orphée des écoles d’art berlinoises.

Nov-déc 2020/Janv.2021
Engelbert Humperdinck, Hänsel und Gretel,
(7 repr.) MeS: Achim Freyer Dir: Thomas Guggeis avec Gyula Orendt, Anna Samuil, Katrin Wundsam, Adriane Queiroz etc..
Reprise tout à fait traditionnelle en période de Noël de Hänsel et Gretel, si populaire en Allemagne…dans la production d’Achim Freyer (2017). Le Freyer plasticien donne à cette production le caractère très particulier de son univers. Encore une fois Thomas Guggeis au pupitre. 

Déc. 2020
Giuseppe Verdi, Rigoletto (5 repr.), MeS: Bartlett Sher Dir: Karel Mark Chichon avec Luca Salsi, Irina Lungu, Piotr Buszewski etc…
Reprise de la nouvelle production de juin 2019 de Bartlett Sher, transposée dans les années 20, dans une ambiance mélangeant l’expressionnisme d’Otto Dix et le maniérisme de Giulio Romano à Mantoue (Palazzo Te), on dirait donc manieristo-expressionniste…Toute nouvelle distribution à commencer le chef  Karel Mark Chichon familier de ce répertoire et assez apprécié en général, Luca Salsi dans Rigoletto, Irina Lungu  dans Gilda tandis que la plus grande curiosité viendra du  Duca du tout jeune ténor polonais Piotr Buszewski, voix claire de ténor lyrique, qui commence à peine à chanter en Europe (Leipzig, Berlin, après quelques apparitions aux USA).

Déc. 2020/Janv-fév-avril2021
W.A.Mozart, Die Zauberflöte
(12 repr.) MeS August Everding, Dir: Oksana Lyniv avec Mauro Peter, Jan Martiník, Evelin Novak, Serena Sáenz, Gloria Rehm, Roman Trekel etc…
Distribution passe partout (avec Mauro Peter, bien installé comme ténor mozartien, qui s’appuie sur la troupe (Jan Martinik comme Sarastro), mais la programmation joue sur les deux productions de Zauberflöte du répertoire de Berlin, la plus récente production Yuval Sharon, présentée en décembre 2019, et celle d’August Everding, légendaire, qui appartient au répertoire de Berlin comme de Munich. En 2019/2020, les deux productions devaient être proposées dans la même saison (décembre et avril) avec des distributions et des chefs différents. C’est en 2020/2021 la production d’August Everding qui est proposée sur 12 représentations (puisque les représentations d’avril ont été annulées). Au pupitre, Oksana Lyniv qui désormais est une inévitable des théâtres.

Janvier 2021
Richard Strauss, Die Frau ohne Schatten,
(4.repr) MeS: Claus Guth Dir: Simone Young avec Eric Cutler, Vida Miknevičiūtė, Michaela Schuster, Georg Nigl, Wolfgang Koch etc…
Une des grandes productions de la maison (Claus Guth), dans une distribution modifiée (Eric Cutler en Empereur, Vida Miknevičiūtė en impératrice) et au pupitre la solide Simone Young.

Janvier 2021
W.A.Mozart, Idomeneo (4 repr.) MeS, David Mc Vicar Dir: Louis Langrée avec Andrew Staples, Lea Desandre, Victoria Randem, Olga Peretyatko etc…
La nouvelle production d’avril 2020 (Festtage 2020, direction Simon Rattle) a été annulée pour cause de virus, elle est proposée en reprise (mais en réalité ce sera donc une nouvelle production) en janvier 2021 avec au pupitre Louis Langrée et une distribution différente, toujours Andrew Staples en Idomeneo, toujours Olga Peretyatko en Elettra, mais Léa Desandre (excellent choix) au lieu de Magdalena Kožená en Idamante et Victoria Randem au lieu d’Anna Prohaska en Ilia.

Janv-fév 2021
L.v.Beethoven, Fidelio (6 repr.), MeS: Harry Kupfer, Dir: Lahav Shani avec Simone Schneider, Greer Grimsley, René Pape, Andreas Schager/David Butt Philip, Evelin Novak, Florian Hoffmann, Arttu Kataja.
Une reprise de la production Kupfer, discutée lors des premières représentations, cette fois dirigée par le très doué Lahav Shani, chef israélien vainqueur du concours Mahler de direction d’orchestre de Bamberg, et aujourd’hui successeur de Nézet-Séguin à Rotterdam. La distribution affiche Andreas Schager sur 4 soirées, David Butt Philip sur les deux dernières, et René Pape en Rocco, Simone Schneider en Fidelio/Léonore, Greer Grimsley en Pizarro. Pour le chef d’abord.

Fév. – mars 2021
W.A.Mozart, Così fan tutte
(3 repr.) MeS : Vincent Huguet, Dir: Daniel Barenboim avec Barbara Frittoli, Elsa Dreisig, Marianne Crebassa, Paolo Fanale, Gyula Orendt, Ferruccio Furlanetto
Ce devait être une reprise, ce sera une première, pour trois représentations du Cosi fan Tutte prévu cette année qui a dû être annulé. Même distribution composée de la nouvelle génération: Elsa Dreisig en Fiordiligi et Marianne Crebassa en Dorabella, ce devrait être excellent, Paolo Fanale en Ferrando et Gyula Orendt en Guglielmo tout autant, Orendt est un magnifique chanteur et Fanale un ténor très sensible. Les surprises viennent de Barbara Frittoli en Despina (dans un rôle où je ne la sens pas trop) et un Alfonso aussi luxueux qu’inattendu, Ferruccio Furlanetto.

Fév-mars 2021
Giacomo Puccini, Tosca,
(6 repr.), MeS: Alvis Hermanis, Dir: Massimo Zanetti/Julien Salemkour avec Angel Blue, Brian Jagde/Marcelo Puente, Lucio Gallo, Jan Martiník.
Pure reprise alimentaire avec la jeune Angel Blue, la Tosca d’Aix, et deux ténors dont on parle Brian Jagde (2 premières rep.) et Marcelo Puente (4 dernières), ainsi qu’en Scarpia Lucio Gallo, qu’on n’a pas vu depuis très longtemps. Direction Massimo Zanetti et pour les deux dernières, Julien Salemkour, ex-assistant de Barenboim. Une reprise sans véritable intérêt

Mars 2021
Richard Strauss, Der Rosenkavalier
, (4.repr) MeS: André Heller / Wolfgang Schilly, Dir: Simone Young avec Camilla Nylund, Günther Groissbock, Adrian Angelico, Nadine Sierra, Jonathan Winell etc…
Simone Young dirige cette reprise avec une belle distribution: Nylund, Groissböck, le meilleur Ochs aujourd’hui et la jeune et fraîche Nadine Sierra en Sophie, ainsi que dans Octavian, Adrian Angelico, le mezzo-trans norvégien qui a tant fait parler et qui a déjà chanté Octavian à Oslo et Stockholm. Un ensemble solide dans une production très « wienerisch »

Mars-avril 2021
Richard Wagner, Parsifal
(3 repr.) MeS: Dmitry Tcherniakov, Dir: Daniel Barenboim, avec René Pape, Marina Prudenskaya, Andreas Schager, Falk Struckmann, John Tomlinson etc…
Reprise de ce Parsifal qui va devenir légendaire, pour trois représentations seulement, avec toujours Andreas Schager (Parsifal) et René Pape (Gurnemanz) les piliers de la production, mais Falk Stuckmann en Klingsor et Marina Prudenskaia en Kundry. Cette dernière fera difficilement oublier Anja Kampe et Waltraud Maier, qui fit ses adieux au rôle dans cette production. Mais si vous n’avez pas vu ce Parsifal, il faut évidemment y aller ventre à terre.

Avril-Mai 2021
Giacomo Puccini, La Bohème,
(5 repr.) MeS : Lindy Hume, Dir : Rafael Payare avec Aida Garifullina, Elsa Dreisig, Dmitry Korchak, Alfredo Daza etc…
Une reprise alimentaire, avec le couple Garifullina/Korchak en Mimi et Rodolfo, Dreisig/Daza en Musetta/Marcello (Adriane Queiroz pour la dernière). Le chef vénézuélien Rafael Payare, issu du Sistema de José Antonio Abreu, qui fut assistant de Claudio Abbado et de Daniel Barenboim est au pupitre.

Mai 2021
Giuseppe Verdi, La Traviata,
(6 repr.) MeS: Dieter Dorn, Dir: Eun Sun kim  avec Elsa Dreisig, Freddie De Tommaso/Rame Lahaj, George Petean etc…
Autre reprise alimentaire avec Elsa Dreisig très présente dans les distributions parce qu’elle appartient à la troupe de la Staatsoper. Et deux ténors à l’orée de la carrière, Freddie De Tommaso et Rame Lahaj, ainsi que l’excellent George Petean comme Germont. Quant à Eun Sun Kim, on la voit de plus en plus diriger en Allemagne.

Alban Berg, Wozzeck, (4 repr.), MeS: Andrea Breth, Dir: Matthias Pintscher avec Matthias Goerne, Eva-Maria Westbroek, Florian Hoffmann, Graham Clark, John Daszak, Katharina Kammerloher, Heinz Zednik etc…
Comme souvent désormais, les gloires du passé dans les productions actuelles et dans de petits rôles c’est le cas de Heinz Zednik ici dans Der Narr (le fou), et des moins petits (Graham Clark dans Der Hauptmann – Le Capitaine). Le couple Wozzeck/Marie c’est Matthias Goerne et Eva Marie Westbroek, John Daszak est le tambour major, distribution très solide, presque référentielle. Le chef est Matthias Pintscher qui aborde le grand répertoire d’opéra.

Richard Strauss, Salomé (4 repr.), MeS : Hans Neuenfels, Dir : Thomas Guggeis avec Vida Miknevičiūtė, John Daszak, Waltraud Meier, Johan Reuter, Siyabonga Maqungo etc…Certes, c’est Waltraud Meier qui chante Herodias, et John Daszak Herodes mais plus d’Ausrine Stundyté en Salomé, on va découvrir Vida Miknevičiūtė qui aura aussi été Die Kaiserin dans Die Frau ohne Schatten cette saison. À découvrir donc, sous la direction de Thomas Guggeis, qui a créé la production encore récente de Hans Neuenfels.

Mai-juin 2021
Carl-Maria von Weber, Der Freischütz
, (5 repr.) MeS: Michael Thalheimer Dir: Alexander Soddy avec Victoria Randem, Evelin Novak, Stephan Rügamer/Andreas Schager, Falk Struckmann etc…
Un Freischütz c’est toujours à prendre, parce que l’œuvre est rare et difficile. C’est une reprise de la production de 2015 de Michel Thalheimer diversement accueillie. Au pupitre Alexander Soddy, GMD du Nationaltheater Mannheim et ex assistant de Petrenko dans le Ring de Bayreuth. Distribution solide comprenant le Max de Stefan Rügamer, ténor excellent de la troupe de la Staatsoper, qui va étrangement alterner avec le puissant Andreas Schager, deux voix très différentes, presque opposées par le timbre et le volume.  Agathe est Evelin Novak dans une distribution largement puisée dans la troupe. Survivant de la création, Falk Struckmann en Kaspar…

Juin-Juil. 2021
Jörg Widmann, Babylon
, (4 repr.) MeS : Andreas Kriegenburg, Dir : Christopher Ward avec Mojca Erdmann, Susanne Elmark, Charles Workman, Willard White, Marina Prudenskaya
La saison s’achève sur 4 représentations de Babylon, l’opéra de Jörg Widmann, livret du philosophe Peter Sloterdijk créé à Munich en 2012 sous la direction de Kent Nagano.
À Berlin, la production d’Andreas Kriegenburg qui remonte à la saison 2018-2019 (mars 2019) a été dirigée à la création par Daniel Barenboim, et sera reprise la saison prochaine par Christopher Ward, GMD d’Aix la Chapelle, et ex-assistant de Simon Rattle pour le Ring d’Aix et de Kent Nagano lorsqu’il dirigeait Munich. La distribution est sensiblement identique à celle de la première. Seule exception Willard White succède à John Tomlinson comme Roi-Prêtre. Saluons le fait qu’un opéra contemporain soit repris et entre au répertoire.

Conclusions :

À vrai dire, l’impression laissée par cette saison est mitigée. Elle semble moins brillante et moins inventive que la précédente. D’abord nous l’avons souligné, l’impression d’un Daniel Barenboim en retrait, ensuite, certains choix de distribution étranges (l’alternance Rügamer/Schager dans Freischütz non par rapport à la qualité intrinsèque des deux artistes, mais à leur voix complètement différentes sur le même rôle).
D’un autre côté, Berlin fait résolument appel notamment dans les reprises de répertoire, à des jeunes chanteurs, quelquefois tout à fait débutants, y compris dans des rôles importants (Vida Miknevičiūtė à la fois Kaiserin dans Die Frau ohne Schatten et Salomé, les ténors Freddie De Tommaso, Rame Lahaj dans Traviata, Piotr Buszewski dans Rigoletto, ou David Butt Philip alternant dans Florestan avec Andreas Schager) et surtout à des jeunes chefs, nous avons signalé plus haut Thomas Guggeis, mais nous pourrions évoquer aussi Victorien Vanoosten, Finnegan Downie Dear, Lahav Shani, sans oublier Matthias Pintscher, pas si jeune mais rare à l’opéra qui aborde des œuvres étrangères à son répertoire habituel. Tout cela peut être défendu, d’autant que dans l’ensemble il est plutôt fait appel dans les productions de référence à la jeune génération des chanteurs (voir les Mozart par exemple : qui connaît Gyula Orendt, qui va chanter et Guglielmo et il conte ? C’est pourtant un chanteur qui fut un Zurga remarquable dans Les Pêcheurs de Perles de Wenders lors des premières dirigées par Barenboim, ou un Galveston de grand niveau dans Lessons in love and violence de George Benjamin (à Lyon la saison dernière).
Du positif et du discutable donc.

Mais la situation elle-même à cause du coronavirus est lourde de conséquences sur la saison prochaine : trois productions prévues Cosi fan tutte, Idomeneo, Khovantchina n’ont pas eu lieu ou n’auront pas lieu cette saison : il est fort douteux que les théâtres rouvrent avant l’été, et à supposer que ce soit possible, dans quelles conditions ? Avec quelle distanciation sociale ? Avec quel public pour un opéra international ou un Festival quand le public international ne sera pas dans les mêmes situations sanitaires selon les pays ?
Pour Berlin, c’est déjà le cas pour Cosi fan tutte et Idomeneo, et Khovantchina prévu en juin reste lourdement menacé. D’où l’affichage de ces titres la saison prochaine qui s’ajoutent de facto aux nouvelles productions prévues et que l’on propose sur de très courtes périodes (3 repr. pour Così fan Tutte, exactement comme prévu la saison actuelle (report sine die dans les mêmes conditions ?), 4 représentations pour Idomeneo au lieu de 5 cette saison, mais avec changement de chef et d’Idamante (Rattle pas libre et donc du même coup Magdalena Kožená), avec l’avantage que ces productions étaient prêtes en mars et n’auront pas besoin de longues semaines de répétitions. Pour Khovantchina prévu pour cinq représentations, au lieu des six affichées en juin, c’est un peu différent. Si la production comme c’est à craindre est annulée en juin, elle sera affichée en octobre (mais avec Simone Young et sans Vladimir Jurowski) , à un moment où tout reprendra progressivement, ce qui laisse le temps pour des répétitions en septembre, voire en juin (si c’est possible). Cela permettra-t-il de valider au moins partiellement des billets déjà achetés, de ne pas dénoncer les contrats, autant de questions qui me paraissent légitime de poser, et pas seulement pour Berlin.

C’est à la fois la conséquence de la situation que nous vivons, et aussi du système de répertoire qui permet un appel fort à la troupe, et d’afficher en peu de temps certaines reprises, notamment quand la troupe est bonne, comme c’est le cas à la Staatsoper de Berlin. Ainsi les grands standards sont-ils forcément affichés chaque saison (ce que j’appelle les productions « alimentaires ») et en 2020-2021, il y en aura au moins cinq Tosca, Traviata, La Bohème, Rigoletto, Die Zauberflöte, susceptibles d’attirer du public.

Ne nous berçons pas d’illusions : le monde du spectacle va se relever lentement de la situation inédite et dramatique qu’il connaît actuellement, et les saisons déjà présentées sur ce blog trahissent en creux pour la plupart, les problèmes que les théâtres affrontent actuellement. Il n’est pas sûr qu’au final elles se déroulent comme elles sont annoncées sur le papier. Mais il faut y croire.

Staatsoper, la salle

OPERNHAUS ZÜRICH, PRÉSENTATION DE LA SAISON LYRIQUE 2020-2021

L’Opernhaus Zürich est une de ces maisons très solides qui déçoivent rarement. On avait craint au départ d’Alexander Pereira pour Salzbourg que la régularité et la qualité en pâtissent, et Andreas Homoki a prudemment mené une politique faite d’idées remarquables, et d’un souci de préserver répertoire et public. Ainsi y-a-t-il à Zürich des productions que chacun devrait avoir vu, comme le Macbeth de Barrie Kosky, ou des productions de Tcherniakov notables, dernière en date, l’Affaire Makropoulos, mais aussi de Bieito (Die Soldaten) ou de Christof Loy (Alcina), ainsi qu’une politique musicale équilibrée où l’on entend des stars comme par exemple Cecilia Bartoli (c’est son incontestable maison) ou Anja Harteros, voire aussi Nina Stemme et des chefs notables: Franz Welser-Möst, Daniele Gatti, Fabio Luisi et bientôt Gianandrea Noseda sont les directeurs musicaux qui se sont succédé. Un orchestre solide fait de deux entités, la Philharmonia Zürich pour le répertoire XIXe et XXe, et L’Orchestra La Scintilla pour le répertoire baroque, un chœur de bon niveau et un plateau technique enviable constituent les forces incontestables de ce théâtre, situé au bord du lac de Zürich.
C’est aussi un théâtre aux dimensions très moyennes (1100 places) mais qui peut représenter tous les répertoires, de Meistersinger à Alcina, avec un des rapports scène-salle les plus confortables qui soient pour les chanteurs et les spectateurs.
Le résultat ? On a là une des scènes européennes les plus enviables, de celles qu’il faut fréquenter avec régularité, d’autant qu’elle est à portée de TGV pour les français, de pendolino pour les italiens, d’ICE pour les allemands et de confortables trains de nuits pour les autrichiens, sans compter son aéroport international.
Tant de motifs de fréquenter Zürich, mis à part des prix suisses, notamment l’hôtellerie, la nourriture et les prix des billets (certes ça fait beaucoup). Une fois n’est pas coutume, on peut s’offrir une exception, mais pour les français comme les allemands, la frontière n’est pas si éloignée et si l’on vient en voiture, on peut dormir en France ou en Allemagne, où les prix de l’hôtellerie sont plus raisonnables ou profiter des dimanches où la plupart des productions sont données en matinée… Mes amis italiens viennent à plusieurs dans une voiture et font l’aller et retour Milan-Zürich dans la journée. Quant aux genevois, ils font régulièrement le voyage, on entend beaucoup parler français à l’Opéra de Zürich.
Pour ceux qui ne connaîtraient pas ce théâtre, nous renvoyons en ce moment à leurs spectacles en streaming, ce qui donnera une idée de leur qualité.
https://www.opernhaus.ch/spielplan/streaming/

Zürich est un théâtre de répertoire, avec une troupe dont fit partie par exemple Jonas Kaufmann, ou plus récemment Julie Fuchs, ce qui donne une idée de la qualité, avec en plus un très bon Opéra Studio, dont les jeunes membres sont très sollicités dans les productions, et pas seulement pour les utilités.

La saison 2021 présente pour le lyrique 10 nouvelles productions (trois pour le ballet) et 17 reprises de répertoire (trois pour le ballet), ce qui fait pour le lyrique 27 productions d’opéra, sans oublier deux productions pour enfants.

Au niveau de la palette de compositeurs, on note Moussorsgki (1), Tchaikovski (1) pour le répertoire russe, Weill(1), Strauss (1) Mozart (1) Gluck (1), Kálmán(1), Haendel (1), Haubenstock Ramati (1) pour le répertoire allemand, Verdi (3), Puccini(1), Donizetti (5), Bellini (1), Pergolesi (1), Rossini( 3) pour le répertoire italien, Offenbach (1), Massenet(2) pour le répertoire français et Sondheim (1), où l’on remarque qu’il n’y aucun Wagner, ce qui est rare pour ce théâtre, et que le répertoire italien se taille la part du lion (14 titres sur 27) avec dans les titres choisis, une particulière insistance sur le Belcanto (5 Donizetti et 1 Bellini); il est vrai que la salle de Zurich est idéale pour se répertoire. Enfin les deux opéras les plus populaires de Massenet sont affichés dans la même saison.

 

Nouvelles productions :

 

Sept-Oct. 2020
Moussorgski, Boris Godounov (7 repr.) MeS: Barrie Kosky, Dir: Kirill Karabits avec Michael Volle, John Daszak, Irene Friedli, Brindley Sherratt, Edgaras Montvidas, Oksana Volkova, Johannes Martin Kränzle etc…
Philharmonia Zurich
La saison s’ouvre sur une production qui va susciter un grand intérêt des mélomanes, d’une part envers une œuvre phare du répertoire et spectaculaire, d’autre part à cause de la curiosité de l’angle qui sera celui de Barrie Kosky, qui a laissé à Zurich des productions devenues des références : Die Gezeichneten et surtout Eugène Onéguine et Macbeth, sans doute la production du chef d’œuvre de Verdi la plus fascinante aujourd’hui en Europe et au-delà. Et puis, troisième élément de poids, la prise de rôle de Michael Volle dans Boris, chanteur de référence pour rôle de référence. Il sera entouré d’une belle distribution dont Johannes Martin Kränzle, John Daszak,  Edgaras Montvidas . Direction musicale de Kirill Karabits, le chef ukrainien, chef du Bournemouth Symphony Orchestra et qui vient de laisser le poste de GMD du Deutsches Nationaltheater Weimar.

Nov-déc. 2020
Pergolesi, L’Olimpiade (9 repr.) MeS: David Marton, Dir: Ottavio Dantone avec Vivica Genaux, Delphine Galou, Carlo Allemano, Anna Bonitatibus, Sophie Junker, Thomas Erlank.
Orchestra La Scintilla
Une rareté de Pergolèse, avec une belle distribution (Vivica Genaux, Delphine Galou) dirigée par Ottavio Dantone, un des spécialistes de ce répertoire.  Et le remarquable David Marton fait pour la première fois des infidélités à Lyon qui fut le seul Opéra où il avait jusque-là travaillé. Ce sera sans doute passionnant.

Déc 2020-janv. 2021
Verdi, Simon Boccanegra
(9 repr.), MeS: Andreas Homoki, Dir: Fabio Luisi, avec Christian Gerhaher, Jennifer Rowley, Christof Fischesser, Otar Jorjikia,Nicholas Brownlee etc…
Philharmonia Zurich
Plus que la mise en scène (Homoki), plus même que la direction musicale (Fabio Luisi), ce qui va exciter les curiosités, c’est Christian Gerhaher, le symbole même du chanteur de répertoire allemand, qui n’a pas de concurrent actuel comme Wozzeck ou comme Wolfram et qui va affronter un grand rôle verdien, Simon Boccanegra – sans doute le plus grand rôle de baryton italien alors qu’il n’est jamais affiché dans ce répertoire. Ce sera sans doute une expérience fascinante. À ne manquer sous aucun prétexte.

Fév-mars 2021
Gluck, Orphée et Eurydice
(9 repr.),  MeS: Christoph Marthaler, Dir: Stefano Montanari, avec Chiara Skerath, Nadezhda Karyazina, Alice Duport Percier et danseurs…
Philharmonia Zurich
L’Orphée de Gluck dans une production qui va sûrement ravir les passionnés de théâtre, puis Christoph Marthaler, plus rare ces dernières années revient pour mettre en scène le plus fameux des opéras composés autour d’Orphée, et c’est sans doute un événement. Stefano Montanari que les lyonnais connaissent bien (L’Opéra de Lyon le premier lui a donné une place de choix parmi les chefs invités, notamment pour les Mozart, mais aussi pour l’Orphée de Gluck qu’il dirigea (Prod.Marton). Vivacité, énergie communicative, précision, voilà les qualités de ce chef (qui est aussi violoniste) auxquels désormais s’intéressent beaucoup de théâtres européens, et c’est heureux. Enfin une distribution jeune, avec l’arrivée dans des grands rôles de chanteurs émergés récemment, Chiara Skerath et Nadezhda Karyazina…Donc un spectacle à voir et qui mérite le voyage.

Mars-avril 2021
Roman Haubenstock-Ramati, Amerika
(7 repr.) MeS : Sebastian Baumgarten, Dir: Gabriel Feltz, avec Paul Curievici, Mojca Erdmann, Robert Pomakov, Ruben Drole etc…
Philharmonia Zürich
Roman Haubenstock-Ramati est un compositeur (1919-1994) qui a travaillé à Cracovie, Tel-Aviv, Vienne où il a été professeur à la Musikhochschule. On lui doit entrle e autres œuvres un opéra (Amerika) et un anti-opéra (Comédie). Amerika, tiré du premier roman de Kafka (écrit à la veille de la première guerre mondiale) a été créé au Deutsche Oper Berlin en octobre 1966. C’est Sebastian Baumgarten qui en assurera la mise en scène (il signa le fameux Tannhäuser dans une usine à Méthane à Bayreuth et ne laissa pas de bons souvenirs), et la direction musicale est confiée à Gabriel Feltz, bien connu dans le monde germanique. Une vraie rareté.

Avril-mai 2021
Jacques Offenbach, Les contes d’Hoffmann,
(10 repr.), MeS: Andreas Homoki, Dir : Antonino Fogliani, avec Saimir Pirgu, Andrew Foster-Williams, Alexandra Kadurina, Katrina Galka, Ekaterina Bakanova, Lauren Fagan etc…
Philharmonia Zürich
Une nouvelle production un peu alimentaire, le titre est de ceux qui attirent la foule, et pour le servir, la mise en scène d’Andreas Homoki, le maître de maison qui signe sa deuxième production de la saison après Simon Boccanegra. Au pupitre, l’excellent Antonino Fogliani qu’on voit de plus en plus un peu partout en Europe et c’est Saimir Pirgu qui chantera Hoffmann, face aux quatre méchants d’Andrew Foster-Williams.

Gioachino Rossini, La Donna del lago (3 repr.) Version concertante, Mise en espace: Stephanie Lenzen, Dir: Antonino Fogliani avec Edgardo Rochas, Vivica Genaux, Karine Deshayes, Stanislav Vorobyov, Sergey Romanovsky
Philharmonia Zürich
Une mise en espace d’un opéra qui aurait peut-être mérité une production, tant il est rare aujourd’hui. A part Antonino Fogliani au pupitre, spécialiste de ce répertoire, Edgardo Rochas et Sergey Romanovsky les ténors qu’on voit de plus en plus sur les scènes rossiniennes, aux côtés du Malcolm de Vivica Genaux, c’est Karine Deshayes qui va reprendre le flambeau du rôle redoutable d’Elena et on sera tout ouïe !

Mai 2021 (au Theater Winterthur)
Gaetano Donizetti, Viva la mamma (5 repr.), MeS: Melanie Huber, Dir: Carrie-Ann Matheson avec Lina Dambrauskaité, Yuriy Hadzetskyy, Andrew Moore etc…
Musikkollegium Winterthur
Traditionnellement, une production de l’année faite par les forces de Winterthur est incluse dans la saison zurichoise, c’est l’opéra-bouffe Viva la Mamma, d’un Donizetti un peu délirant qui est au programme.

Mai-juin 2021
Richard Strauss, Capriccio
(7 repr.), MeS: Christof Loy, Dir: Markus Poschner avec Julia Kleiter, Markus Eiche, Ben Bliss, John Chest, Christof Fischesser, Paula Murrihy etc…
Philharmonia Zürich
C’est Markus Poschner, actuel directeur du Bruckner-Orchester de Linz et directeur musical du théâtre local qui va diriger cette nouvelle édition de Capriccio, mise en scène par le mieux connu Christof Loy (qui signa une Alcina exceptionnelle à Zurich). Zurich diversifie les chefs invités et élargit le spectre. Plus classique la distribution, solide, est dominée par Julia Kleiter et Markus Eiche, tous deux remarquables, et du jeune ténor américain Ben Bliss.

Juin-juil. 2021
Gaetano Donizetti, Lucia di Lammermoor
(7 repr.), MeS: Tatjana Gürbaca Dir: Speranza Scappucci, avec Massimo Cavaletti, Lisette Oropesa, Piotr Beczala, Andrew Owens.
Philharmonia Zürich
Pour cette histoire qui crucifie les femmes isolées, perdues, victimes dans un monde d’hommes, c’est à deux femmes qu’est confiée cette nouvelle production, Tatjana Gürbaca, désormais bien installée dans le paysage des metteurs en scène d’aujourd’hui, et Speranza Scappucci, qui en peu de temps s’est fait un nom dans les chefs d’orchestre, notamment pour le répertoire italien. Et puis une distribution dominée par la magnifique Lisette Oropesa (un must) entourée de rien moins que Piotr Beczala et Massimo Cavaletti. Un petit week-end de début d’été à Zurich ??

 

Répertoire :

 

17 reprises sont prévues avec une moyenne de 5 représentations par titre

Sept-Oct 2020
Guseppe Verdi, I Vespri Siciliani, (5 repr.) MeS : Calixto Bieito, Dir : Fabio Luisi, avec Maria Agresta, Bryan Hymel, Alexander Vinogradov, Quinn Kelsey etc…
Philharmonia Zürich
Une distribution solide sans être exceptionnelle (Bryan Hymel peut-il encore chanter Arrigo?), garantie par la direction musicale d’un expert comme Fabio Luisi. La production de Calixto Bieito avec la même distribution, est prévue en juin 2020…si le coronavirus le permet, ce qui est loin d’être certain.
Il est plus probable que cette reprise sera sans doute une nouvelle production reportée…

Emmerich Kálmán, Die Czardasfürstin
, (5 repr.) MeS : Jan Philipp Gloger, Dir : Ulf Schirmer, avec Annette Dasch, Pavol Breslik, Spencer Lang, Rebeca Olvera etc…
Philharmonia Zürich
Autre production prévue en avril et mai 2020 et de facto reportée: la reprise en début de saison prochaine est sans doute une manière de postposer la création, comme pour I Vespri Siciliani, ce qui signifierait, avec le Boris Godunov prévu, que la saison 2020-2021 commencerait avec trois nouvelles productions, à condition que les répétitions puissent se faire dans de bonnes conditions…que de « si… » ! Il reste que la distribution (Pavol Breslik et Annette Dasch) est prometteuse. et que cette opérette désormais rare est un must, qu’il faut avoir vu. En France, elle fut l’un des grands succès du couple  symbole de l’opérette que fut Marcel Merkès et Paulette Merval .

Oct. 2020
Gaetano Donizetti, Maria Stuarda
, (5 repr.) MeS : David Alden, Dir : Enrique Mazzola avec Salomé Jicia, Diana Damrau, Paolo Fanale, Nicolas Testé etc…
Philharmonia Zürich
Du bel canto et l’affrontement traditionnel entre Elisabeth et Marie Stuart. Cette fois, c’est Diana Damrau qui est la reine prisonnière, et la jeune Salomé Jicia (révélée au Festival de Pesaro dans le rôle de Semiramide) qui sera la méchante Elisabeth. Mise en scène de David Alden spécialiste du répertoire italien et direction experte de Enrique Mazzola. Ce devrait être intéressant

Oct.-nov.2020
Gaetano Donizetti, L’Elisir d’amore
, (5 repr.) (5 repr.)MeS : Grischa Asagaroff, Dir : NN avec
Mané Galoyan, Mauro Peter, Samuel Dale Johnson, Erwin Schrott, etc…
Philharmonia Zürich. Un peu moins intéressant peut être et en tous cas alimentaire cette reprise sans chef annoncé de l’Elisir d’Amore, avec notamment Mauro Peter, le ténor autrichien découvert dans Mozart, et Erwin Schrott, qui devrait en faire des tonnes dans Dulcamara.

Nov.-déc. 2020
Jules Massenet, Manon
, (5 repr.) MeS : Floris Visser, Dir : Fabio Luisi avec Vannina Santoni, Benjamin Bernheim, Audun Iversen, Alastair Miles etc…
Philharmonia Zürich
Couple français pour opéra français sous la direction experte de Fabio Luisi. Vannina Santoni a tôt fait de conquérir les scènes nationales et internationales, et Benjamin Bernheim (né à Paris, grandi en Suisse et ex membre de la troupe de Zurich) est désormais (et justement) le ténor to be heard surtout dans un rôle typique du répertoire lyrique français. Production récente de Floris Visse accueillie diversement à la création, en 2019…

Déc. 2020-janv. 2021
Gioachino Rossini, Il viaggio a Reims, (7 repr.) MeS : Christoph Marthaler Dir : Riccardo Minasi avec Pietro Spagnoli, Anna Aglatova, Serena Farnocchia, Nadezhda Karyazina, Aleksandra Olczyk, Alexey Nekludov etc…
Philharmonia Zürich.
Reprise de la production signée Christoph Marthaler (lire notre compte rendu dans ce blog Viaggio a Reims-Zürich ) dirigée par Riccardo Minasi, qui dirige beaucoup à Zurich, notamment le répertoire XVIIIe  avec une distribution complètement renouvelée où l’on relève les noms d’Anna Aglatova (excellente jeune chanteuse venue de Russie) ou de la plus expérimentée Serena Farnocchia. Un Viaggio a Reims est toujours un moment excitant pour le spectateur.

Déc.-Janvier 2021
Georg-Friedrich Haendel, Alcina
, (5 repr.) MeS : Christof Loy Dir : Giovanni Antonini avec Cecilia Bartoli, Magdalena Kožená, Sandrine Piau, Deniz Uzun, Samuel Boden etc…
Orchestra La Scintilla
Trio de choc pour cette reprise de la magnifique production de Christof Loy (voir notre compte rendu sur ce blog), toujours dirigée par Giovanni Antonini : Cecilia Bartoli, Magdalena Kožená, Sandrine Piau…Ces trois noms et la qualité de la production suffisent pour que vous alliez prendre votre billet de TGV…

Janvier 2021
Stephen Sondheim, Sweeney Todd
, (6 repr.) MeS : Andreas Homoki Dir : David Charles Abell avec Bryn Terfel, Angelika Kirschlager, Elliott Madore, Liliana Nikiteanu…
Philharmonia Zürich
Un Musical de Stephen Sondheim n’est jamais à négliger, surtout cette histoire noire de Barbier Serial killer qui aime les tourtes à la viande (qui a inspiré Tim Burton) et surtout quand les protagonistes s’appellent Bryn Terfel et Angelika Kirschlager . Reprise de la production de 2018 assez bien accueillie, surtout musicalement.

Janv.-Fév. 2021
Gioachino Rossini, Il Barbiere di Siviglia
, (5 repr.) MeS: Joahnnes Polzgütter Dir: Georges Petrou avec Konstantin Shushakov/Dean Murphy, Alasdair Kent, Paolo Bordogna, Aigul Akhmetshina etc..
Une production du Berbier di Siviglia venue de Winterthur pour en quelque sorte, présenter les nouveaux memebres de la troupe de Zurich, assez profondément renouvelée.
Musikkollegium Winterthur

Févr.-mars 2021
Vincenzo Bellini, I Puritani
, (5 repr.) MeS : Andreas Homoki Dir : Daniele Squeo avec Stanislas Voribyov, Wenwei Zhang, Lawrence Brownlee, George Petean, irina Lungu
Philharmonia Zürich
Un chef italien venu de Karsruhe où il est Kapellmeister, une distribution dominée par Irina Lungu, Elvira de choix, Lawrence Browlee (Arturo) et George Petean (Riccardo), du bon niveau. Pour la production d’Andreas Homoki , voir le compte rendu sur ce blog)

Mars.-avr. 2021
Gaetano Donizetti, Don Pasquale
, (6 repr.) MeS : Christof Loy Dir : Sesto Quatrini avec Pietro Spagnoli, Konstantin Shushakov, Edgardo Rocha, Aleksandra Kubas-Kruk, etc…
Philharmonia Zürich
Un Don Pasquale qui met à contribution de nouveaux membres de la troupe, auxquels s’adjoignent des chanteurs de choix, Pietro Spagnoli (Don Pasquale), Edgardo Rocha (Ernesto) et une nouvelle venue qui a déjà quand même beaucoup chanté, y compris au Bolchoi, Aleksandra Kubas-Kruk en Norina.

Jules Massenet, Werther, (5 repr.) MeS : Tatjana Gürbaca Dir : Giedrė Šlekytė avec Charles Castronovo, Stéphanie d’Oustrac, Sandra Hamaoui, Audun Iversen etc…
Philharmonia Zürich
La lithuanienne Giedrė Šlekytė qu’on commence à voir dans les grands théâtres (Komische Oper par exemple) dirige ce Werther signé Tatjana Gürbaca, une production qu’on a vue à Strasbourg (voir le compte rendu de DAvid Verdier dans Wanderersite.com). Deux chanteurs de choix pour cette reprise, l’excellent Charles Castronovo sera Werther, et Stéphanie d’Oustrac Charlotte, comme à Lyon et Paris dans la version concertante, et comme il y a deux ans à Nancy. Bien des motifs de faire le voyage .

Avril-mai 2021
P.I. Tchaikovsky, Yevgeny Oneghin
, (5 repr.) MeS : Barrie Kosky Dir : Kirill Karabits avec Liliana Nikiteanu, Gelena Gaskarova, Konstantin Shushakov, Pavol Breslik, Margarita Nekrasova, David Shipley etc…
Philharmonia Zürich
La merveilleuse production de Barrie Kosky, si poétique, vue à la Komische Oper de Berlin (voir notre compte rendu sur Wanderersite.com) est coproduite avec Zürich et réunit sous la direction de Kirill Karabits (voir plus haut Boris Godunov) Gelena Gaskarova (Tatjana), Konstantin Shushakov (Onéguine) et Pavol Breslik en Lenski, soit une distribution partiellement renouvelée puisque Pavol Breslik était déjà présent lors des premières séries en 2017. La production vaut le voyage, et l’œuvre est l’une des plus belles musiques de Tchaïkovsky

Mai 2021
Bertolt Brecht/Kurt Weill: Aufstieg und Fall der Stadt Mahagonny
, (5 repr.) (5 repr.)MeS : Sebastian Baumgarten Dir : Thomas Søndergård avec Doris Soffel, Cameron Becker, Robert Gleadow, Valentina Farcas, Christopher Ventris etc…
Philharmonia Zürich
Une mise en scène plutôt réussie de cette œuvre si difficile à monter, et si l’on excepte Christopher Ventris et Ruben Drole, la distribution est pleinement renouvelée, Doris Soffel est Leocadia (c’était Karita Mattila) et Valentina Farcas Jenny. Au pupitre le danois Thomas Søndergård, plutôt familier du répertoire XXe et contemporain. Pour fêter le 70e anniversaire de la mort de Kurt Weill .

Juin 2021
Giacomo Puccini, Madama Butterfly
, (6 repr.) MeS : Ted Huffmann Dir : Marco Armiliato avec Ana Maria Martinez, Judith Schmidt/Katia Ledoux, Saimir Pirgu, Brian Mulligan etc…
Philharmonia Zürich
Un chef de bon niveau (Marco Armiliato) pour cette reprise un peu alimentaire du chef d’œuvre de Puccini, dans la production de Ted Huffmann vue à Montpellier en octobre 2019 et créée à Zürich en 2017. On y retrouve Saimir Pirgu (Pinkerton) et Brian Mulligan (Sharpless), Butterfly est Ana Maria Martinez. Si vous êtes à Zurich…

Juin-Juil. 2021
Giuseppe Verdi, Don Carlos
, (5 repr.) MeS : Sven-Eric Bechtolf Dir : Mark Elder avec Marcelo Alvarez, Tatjana Serjan, Vitaly Kovaljow, Simon Keenlyside, Ludovic Tézier, Ekaterina Sementchuk etc…
Philharmonia Zürich
Production banale de Sven Eric Bechtolf, avec une distribution plutôt intéressante avec notamment deux Posa de choix, Simon Keenlyside et Ludovic Tézier pour les deux dernières) et Tatjana Serjan en Elisabetta. Si Alvarez ne fait pas de routine cela pourrait être intéressant, mais pourquoi diable  aller chercher Mark Elder, qui n’est pas réputé pour être un chef verdien pour diriger ce chef d’oeuvre ?

Juil.2021
W.A.Mozart: Idomeneo
, (4 repr.) MeS : Jetske Mijnssen
Dir : Giovanni Antonini avec Sergey Romanovsky, Olivia Vermeulen, Lauren Snouffer, Guanqun Yu etc…
Orchestra La Scintilla
De nouveau Giovanni Antonini (qui l’avait dirigé lors de la première en 2018) déjà présent dans la saison pour monter au pupitre d’un Idomeneo minimaliste mais élégant signé Jetske Mijnssen, à la distribution complètement modifiée (sauf l’Elettra plutôt solide de Guanqun Yu) qui verra Sergey Romanovsky, excellent rossinien, chanter le roi naufragé et potentiel assassin de son fils Idamante (Olivia Vermeulen).

 

Autres productions
(pour enfants et familles)

 

Sept., nov., déc. 2020, janvier 2021
Wolfgang Mitterer, Das tapfere Schneiderlein
(Le vaillant petit tailleur) (21 repr.) MeS : Kai Anne Schuhmacher, Dir : Ann-Katrin Stöcker, avec Luca Bernard/Nathan Haller, Ziyi Dai/Erica Petrocelli, Ruben Drole/ Yuriy Hadzetskyy
Un « Familienoper », opéra pour familles, d’après Grimm, dans une des petites salles de l’Opéra limitée à 50 places, ce qui justifie le nombre de représentations : Kai Anne Schuhmacher est aussi l’auteur des costumes et des marionnettes tenues par les chanteurs. Pour enfants de plus de 6 ans.
Notons dans la distribution le tout jeune canadien Nathan Haller, ce ténor est un futur grand…

Nov., déc. 2020, janv., févr 2021
Pierangelo Valtinoni, Alice in Wonderland
(Alice au pays des merveilles) (13 repr.) Mes:  Nadja Lotschki Dir : Michael Richter avec Sandra Hamaoui/Lina Dambrauskaité Ruben Drole/Gary Martin Valeriy Murga/Andrew Moore
etc…
Donné dans la journée (sauf le 15 décembre), le matin ou en début d’après-midi, c’est une commande de l’Opéra de Zurich dont la création aura lieu le 14 novembre 2020, un « opéra-conte » pour enfants de plus de 7 ans.

Certes, vu la période, rien n’est inscrit dans le marbre et le bon déroulement des saisons dépend de la situation sanitaire. Les fins de saison 2019-2020 de tous les Théâtres d’Opéra du monde sont fortement menacées et cela aura des conséquences notables sur les saisons qui commencent en septembre.
Mais à supposer, ce que nous souhaitons, que tout se passe normalement, la saison 2020/2021 à Zurich est une saison équilibrée, avec des nouvelles productions stimulantes et des reprises solides, cela signifie de toujours garder l’attention sur cette maison à la qualité constante, qui donne souvent sa chance à de nouveaux chanteurs et de nouveaux chefs . Des voyages en perspectives si…